LE DIAGNOSTIC d’embolie amniotique est difficile en raison d’une expression clinique polymorphe : hypoxie, hypotension, choc, Civd, troubles neurologiques. Si cette pathologie reste rare, sa gravité est telle que près d’une mère sur quatre décède des suites d’une telle embolie. Au Canada, entre 1988 et 1992, sur les 99 décès du post-partum immédiat recensés, treize étaient liés au passage dans la circulation de liquide amniotique. Il s’agit de la troisième cause de décès maternel après les hémorragies cérébrales et les accidents hypertensifs et avant les hémorragies du post-partum ou les embolies pulmonaires. Connaître les facteurs épidémiologiques prédictifs d’une telle pathologie pourrait permettre de la reconnaître précocement et de mettre en place les mesures de réanimation les mieux adaptées.
Une équipe d’épidémiologistes coordonnés par le Dr Michael Kramer a analysé les registres de naissance qui détaillent les conditions de naissance de 70 % des enfants nés entre 1991 et 2002 au Canada. Sur les 3 018 781 accouchements, 33 805 ont donné lieu à des naissances multiples. Sur les 2 984 977 naissances simples, 180 cas d’embolie amniotique ont été recensés et 24 d’entre elles ont conduit au décès maternel (soit respectivement 6 pour 100 000 naissances et 0,8 pour 100 000). Pour les naissances multiples, seulement cinq cas ont été recensés et aucun n’a entraîné de décès. Les auteurs ont fondé leur analyse sur les complications des naissances simples. Le nombre de cas d’embolie amniotique variait selon les années passant de 3 pour l’année 1999 à 6 pour 1997.
Diabète gestationnel, césarienne, naissance instrumentale.
Les auteurs ont analysé les différents facteurs de risque qui pouvaient être associés à ce type d’embolie. Lorsque l’accouchement avait été induit par traitement médical, le risque pour la mère était multiplié par deux. Les auteurs ont aussi établi une liste de facteurs pouvant influencer le passage de liquide amniotique dans la circulation maternelle : âge maternel de plus de 35 ans (risque multiplié par deux), diabète gestationnel, macrosomie, césarienne, accouchement aidé par la mise en place de ventouses ou de forceps, placenta praevia, lésions du col de l’utérus de type lacération ou rupture utérine. En revanche, l’existence d’une éclampsie ou d’une prééclampsie, d’un polyhydramnios, la présentation de l’enfant, la parité, le retard de croissance intra-utérin et l’induction chirurgicale de l’accouchement n’influent pas sur le risque. Les auteurs soulignent que, «en raison du polymorphisme clinique de cette pathologie, il est possible que certains cas aient été qualifiés à tort d’embolie amniotique. Pourtant, l’incidence de 13% de décès –qui, elle, est réelle car fondée sur les résultats d’autopsie– correspond à celle habituellement décrite».
Un nombre stable.
La plupart des facteurs de risque décrits dans ce travail ne s’opposent pas aux causes présumées d’embolie amniotique déjà suspectées : contractions utérines intenses, excès de liquide amniotique et rupture de la vascularisation utérine. Ils pourraient s’y associer ou y participer. L’induction médicale de l’accouchement pourrait, en majorant les contractions utérines et en agissant sur la vascularisation, augmenter le risque de passage de liquide amniotique dans la circulation maternelle.
Pour conclure, les auteurs soulignent que, en dépit d’une majoration du nombre des cas d’accouchement par césarienne et du nombre des déclenchements médicaux, le nombre des cas d’embolie amniotique reste peu variable selon les années (de 3 à 9). Il est possible que la baisse simultanée du nombre des accouchements aidés par ventouse ou forceps ait pu limiter l’apparition des modifications de ce nombre.
« The Lancet », vol. 368, pp. 1399-1402 et 1444-1448.
Les diagnostics différentiels de l’embolie amniotique
Embolie pulmonaire
Embolie gazeuse
Hémorragie
Aspiration du contenu gastrique
Complications anesthésiques
Anaphylaxie
Sepsis ou syndrome inflammatoire systémique
Infarctus du myocarde
Cardiomyopathie
Eclampsie
Réactions transfusionnelles
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