DE NOTRE CORRESPONDANT
L'INTITULÉ d'une des expériences relatées au cours du congrès national de la fédération nationale des directeurs d'EHPAD peut surprendre : « L'effet clown auprès des résidents âgés souffrant de la maladie d'Alzheimer ». Mais, derrière ce titre, émerge, dès les premières images du petit film projeté, toute la pertinence de la démarche. «Nous cherchons surtout à éviter de mettre le patient en situation d'échec, résume le Dr Dominique Huvent, gériatre au sein de l'unité de vie Alzheimer de l'hôpital gériatrique des Bateliers (CHU de Lille). C'est notre leitmotiv . L'atelier s'inscrit dans la démarche de soins pour maintenir ses capacités en tenant compte de l'évolution de ce qui est la maladie de la communication.»
Au milieu de la salle commune de l'unité de vie Alzheimer de l'hôpital des Bateliers, Philippe Herreman et sa consoeur du jour, « clowns en soins d'accompagnement » de l'association Ch'tiClown (Nord)*, tous deux habillés en clown – nez rouge et couleurs vives, comme il se doit – passent d'une table à l'autre, d'un résident à l'autre. Pas d'intrusion, mais une distance juste, «une approche en douceur», comme le souligne le Dr Huvent. Mimique, regard, présence silencieuse, mouvements doux, toucher aussi, comme avec cette dame, le cou tendu, les yeux fermés, appelant par son attitude d'autres caresses… «Il ne s'agit pas de faire le “clown”, ce n'est pas un spectacle, avance la gériatre. Il s'agit d'éveiller le désir de la rencontre, de redonner une place.» Ce jour-là, à cet instant précis, une résidente confie à Philippe Herreman : «Je veux être libre de rentrer chez moi…» Une fois l'histoire racontée à l'équipe au cours du débriefing, une soignante avoue : «Pour nous, ce n'est pas évident de rentrer dans cette bulle, elle ne nous avait jamais parlé de sa liberté.»
Un chien apaisant.
Même conséquence qu'avec les clowns du Nord, à la maison de la Sainte-Famille à Saint-Gildas-des-Bois (Loire-Atlantique), l'équipe constate l'effet apaisant des « médiateurs » sollicités pour intervenir auprès de la quinzaine de personnes désorientées et atteintes de la maladie d'Alzheimer qui y sont hébergées. Mais, cette fois-ci, les médiateurs sont des chiens, pas des clowns. «C'est impressionnant de voir l'effet apaisant que la présence d'un chien peut avoir sur certains résidents, qui, en dehors de ces moments, ont une communication tout à fait inexistante», témoigne Luc Grousset, directeur de l'EHPAD. Et de raconter comment une résidente très renfermée, que l'on n'avait pas vue sourire depuis cinq ans, avait réagi quand un berger allemand s'est dirigé spontanément vers elle. «C'était une révélation pour toute l'équipe, précise Luc Grousset. Elle avait eu elle-même un berger allemand et nous avons pu apprendre plein de choses sur elle. Le contact était établi.» Proposées par deux associations, Chiens Soleil et Pas à pattes, ces séquences sont animées par une éducatrice accompagnée d'un chien formé pour devenir à l'origine guide d'aveugle. Rien n'est laissé au hasard. Le chien va être un formidable stimulateur des cinq sens. La caresse, le brossage, les jeux d'adresse ou la récompense, par exemple, ont un impact sur le comportement du résident loin d'être anodin. «Après deux séances, il a été proposé à une résidente de brosser le chien, raconte à nouveau Luc Grousset. Elle ne tenait pas sa fourchette, il fallait la nourrir à la petite cuillère. Maintenant, elle mange seule une partie de son dessert…» Cette expérience avec des chiens a conduit l'équipe de l'EHPAD à l'intégrer dans un projet de création d'une unité pour malades d'Alzheimer.
Stimulations sensorielles.
Outil différent, mais effet similaire à ceux des deux premières expériences, l'espace Snoezelen du Chêne de la Cormière, à Guenrouet (Loire-Atlantique), est une invitation au calme, au repos, lancée aux 80 résidents de l'établissement. «L'espace apporte une sensation indéfinissable de langueur, langueur à partir de laquelle va être déclenchée une excitation neurosensorielle», explique le Dr Frédéric Maraval, gériatre et médecin coordonnateur. Expériences motrices, spatiales, temporelles et sensorielles s'effectuent dans cette petite salle de 9 m2 grâce à un matériel spécifique (galets au sol, tableau tactile, diffuseur d'huiles essentielles…) et dans une ambiance créée par des jeux de lumière et de la musique. Les observations sont nombreuses (réaction à l'invitation, à l'environnement, manifestations physiques, socialisation, refus de sortir, etc.), comme les améliorations constatées, principalement sur les résidents qui ont des troubles cognitifs.
* Contact : Ch'tiClown, tél. 06.10.88.26.38, chticlown@free.fr.
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