La connaissance des mécanismes physiopathologiques et la prise en charge thérapeutique des formes progressives de sclérose en plaques s'améliorent, mais des progrès paraissent encore nécessaires. Ces formes évolutives de la maladie continuent, en effet, de poser des difficultés thérapeutiques.
LES FORMES de SEP progressive primaire (SEP-PP) et secondairement progressive (SEP-SP) se distinguent par la date de début de la progression de la maladie. Étant difficile à préciser, celle-ci est habituellement définie rétrospectivement, «avec un délai plus ou moins long», note le Dr Sandrine Wiertlewski (CHU de Nantes)*. Alors que les SEP-PP se caractérisent par une aggravation progressive dès le début de la maladie, les SEP-SP surviennent après une phase initiale d'évolution par poussées.
De nombreuses inconnues demeurent sur la physiopathologie des SEP progressives. Il y a, notamment, pas encore de consensus sur les mécanismes de passage d'une SEP rémittente à une SEP-SP. «Malgré les progrès techniques de l'IRM, la compréhension de la physiopathologie in vivo des SEP-PP demeure limitée», constate pour sa part le Dr Ayman Tourbah (CHU de Reims)*, en soulignant le contraste qui existe dans cette forme entre «la pauvreté de la charge et de l'activité lésionnelle et l'accumulation irréversible du handicap clinique observé dans cette forme de la maladie».
Sur le plan clinique, le profil des patients ayant une SEP-PP est assez stéréotypé. La maladie se manifeste le plus souvent par une myélopathie progressive. « Son diagnostic est difficile, mais il a bénéficié de travaux de Thompson et de McDonald sur les critères diagnostiques, qui ont fait disparaître le groupe “SEP-PP possible”», rappelle le Dr Wiertlewski. La question du diagnostic différentiel, notamment avec un syndrome de Gougerot-Sjögren, reste d'actualité.
Neuropathologie.
Des études neuropathologiques ont récemment permis d'identifier des lésions caractéristiques des formes progressives de la maladie. L'analyse de biopsies cérébrales a ainsi montré l'existence fréquente d'une inflammation diffuse de la substance blanche et de lésions de démyélinisation corticale (1), et, dans les méninges de patients atteints de SEP-SP, de structures ressemblant à des organes lymphoïdes secondaires (2). Comme le signale le Pr Bruno Brochet (hôpital Pellegrin, Bordeaux)** , les lésions de démyélinisation corticale touchent surtout les couches sous-piales «au contact de zones d'inflammation méningée et prédominantes à la base des sillons corticaux».« Quant aux structures “lymphoïde-like”, qui sont composées principalement de cellulesB en prolifération, elles sont fréquemment associées à l'atteinte corticale(3), explique le Pr Patrick Vermesrsch (hôpital Roger-Salengro, Lille)**. Ces follicules ectopiquessont les éléments probablement dominants de l'inflammation dans les phases progressives de la maladie».
Une plasticité cérébrale.
En ce qui concerne l'apport des nouvelles techniques d'imagerie, le Pr Jean Pelletier (hôpital de la Timone, Marseille)** souligne la démonstration récente, par des études utilisant l'IRM fonctionnelle, de l'existence de processus de neuroplasticité chez des patients atteints de SEP. Observée dès le stade le plus précoce de la maladie, cette réorganisation fonctionnelle «pourrait contribuer à maintenir des performances motrices normales malgré les dommages tissulaires»(4).
La prise en charge thérapeutique des formes progressives de SEP reste difficile. Le traitement des SEP-SP repose actuellement principalement sur deux molécules : l'interféron bêta-1b, «ce d'autant qu'il persiste des poussées surajoutées», et la mitoxantrone, «lorsque la persistance d'une activité inflammatoire est identifiée à l'IRM», précise le Pr Pelletier*. Certains immunosuppresseurs sont utilisés hors AMM dans cette indication. Dans les SEP-PP, à l'heure actuelle, aucun médicament n'a obtenu une autorisation de mise sur le marché. «Le recours aux immunosuppresseurs est toutefois fréquent à titre compassionnel, et hors cadre de toute autorisation officielle.» Enfin, les travaux sur les processus de réorganisation fonctionnelle pourraient ouvrir de nouvelles pistes thérapeutiques dans le domaine de la rééducation (entretien de l'effet compensatoire par un entraînement spécifique) et du traitement ciblé des troubles moteurs et cognitifs de la SEP.
* Réunion du Club francophone de la sclérose en plaques.
** Journées d'enseignement supérieur de neurologie.
(1) Kutzelnigg A et coll. Brain 2005;128:2705-12.
(2) Serafini B et coll. Brain Pathol 2004;14:164-74.
(3) Magliozzi R et coll. Brain 2007;130(Pt4):1089-104.
(4) Rocca MA et coll. Neuroimage 2003;19:1770-7.
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