Journée mondiale sans tabac

Des espaces 100 % libres de fumée

Publié le 29/05/2007
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LA JOURNÉE MONDIALE sans tabac, qui se tient pour la 20e année consécutive le 31 mai, est placée sous le thème « Des espaces sans tabac », avec comme slogan « Pas de fumée à l'intérieur - Des espaces 100 % non-fumeurs ». Cette mesure, «au coût minime», est la seule qui soit «réellement valable pour protéger de l'exposition au tabagisme passif le public, les femmes, les enfants» et les travailleurs, affirme l'Organisation mondiale de la santé (OMS), qui organise la journée. «Même des fumeurs préfèrent souvent aller dans des endroits libres de fumée», observent les experts. La prévention y est gagnante, «particulièrement chez les jeunes», notent-ils.

A cet égard, la convention-cadre pour la lutte antitabac (Cclat) de l'OMS constitue un sésame. Adoptée en juin 2003, elle couvre aujourd'hui plus des trois quarts de la population mondiale. Là où une législation visant à supprimer la cigarette dans les lieux publics a été promulguée, la consommation des produits tabacoles diminue. Et, ajoute l'OMS, «il n'existe aucune preuve rigoureuse» permettant de prétendre que la prohibition a «un impact économique négatif».

Dix millions de victimes par an.

Cependant, tous les signataires de la Cclat ne sont pas encore infaillibles. Ici, on croit que la ventilation ou la filtration, seules ou associées, arrivent à réduire l'exposition à la fumée, là où les cigarettiers font la loi. Quelque 400 millions de mineurs, soit presque la moitié des enfants de la planète, respirent de l'air vicié par la combustion de cigarettes, notamment à leur domicile. L'enquête Global Youth Tobacco Survey, élaborée par l'OMS et les CDC(Centers for Disease Control and Prevention) américains, réalisée auprès des 13-15 ans dans 132 pays entre 1999-2005, fait apparaître que 44 % des jeunes subissent la fumée secondaire chez eux et 56 % dans les espaces publics. Pour sa part, l'Organisation internationale du travail estime qu'au moins 200 000 salariés meurent chaque année du tabagisme des autres. Parmi les Vingt-Sept, l'European Respiratory Society fait état de 80 000 décès, et aux Etats-Unis, l'Agence de protection de l'environnement parle de 3 000 morts par an dus au cancer du poumon chez les non-fumeurs, ce qui entraînerait un coût annuel de 10 milliards de dollars.

Pour les fumeurs, ce sont 10 millions de victimes annuelles qui pourraient être recensées autour de 2020, prévoit l'OMS. Le tabagisme provoquera alors plus de décès que le sida, la tuberculose, la mortalité maternelle, les accidents de voiture, les suicides et les homicides réunis.

Pourtant, les preuves des effets nocifs du tabac ne cessent de s'accumuler. Il y a un consensus scientifique fondé sur des centaines d'études. En conséquence, les recommandations de l'OMS ne font pas dans la nuance. Un espace 100 % non-fumeurs est la seule solution efficace. Une législation exigeant des lieux de travail et des espaces publics sans tabac s'impose. Des stratégies éducatives afin de réduire l'exposition à la fumée secondaire à domicile sont indispensables.

Sur le terrain, la principale opposition vient de l'industrie du tabac. Les cigarettiers prônent une ventilation spécifique et jugent les lois antitabac attentatoires aux droits des fumeurs et au développement des restaurants, des bars et des casinos. Or, en Finlande, en Irlande, en Nouvelle-Zélande, en Uruguay et en Californie, il a été démontré que des dispositions facultatives ne protègent pas suffisamment la santé du public, tandis que les lois pour des espaces 100 % non-fumeurs y parviennent.

«Il faut rappeler aussi que la majorité des gens ne fument pas» et que la plupart de ceux qui sont dépendants «souhaitent arrêter», insiste l'OMS. A ce jour, le bras de fer avec l'industrie du tabac n'est pas encore gagné, mais les supercheries de certains cigarettiers sont éventées. On n'ignore plus par exemple l'opération « Blouse blanche » que Philip Morris a lancée à la fin des années 1980 et qui consistait à recruter secrètement des scientifiques pour défendre le tabac et convaincre les gens de l'innocuité de la fumée des autres.

> PHILIPPE ROY

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8174