Il est désormais possible d'observer la croissance et la dynamique de cellules nerveuses individuelles dans le cerveau d'animaux vivants. Cette prouesse technologique repose sur l'utilisation de la microscopie multiphotonique et d'animaux génétiquement modifiés, dont les neurones expriment une protéine émettant un signal fluorescent quand on les illumine avec une longueur d'onde spécifique.
Cette nouvelle technologie a conduit deux équipes new-yorkaises à étudier la plasticité de structures microscopiques impliquées dans la mise en place des synapses, les épines dendritiques, dans le cerveau de souris vivantes. Les deux équipes ont regardé si ces petites protrusions étaient stables ou si elles disparaissaient puis réapparaissaient au cours du temps, chez la souris adulte.
Trachtenberg et coll. ont identifié trois populations d'épine dendritique possédant des durées de renouvellement distinctes : les épines stables, les semi-stables et les transitoires. Les épines dites « stables » sont majoritaires (60 %). Elles ont une durée de vie qui est malgré tout limitée à environ 100 jours. Les auteurs ont montré, en outre, que lorsque l'influx nerveux arrivant à l'aire de projection des vibrisses est modifié (après qu'on a coupé les moustaches d'une souris), le nombre d'épines dites « transitoires » augmente de manière significative. En revanche, les dendrites et les axones restent parfaitement stables. Les auteurs ont conclu de ces expériences que la plasticité structurelle du cortex adulte est limitée aux épines dendritiques.
Grutzendler et coll. ont montré, quant à eux, que 96 % des épines étaient stables durant plus de treizemois. Par conséquent, des synapses pourraient persister tout au long de la vie d'une souris.
Les éditorialistes Ole Ottersen et Johannes Helm (Oslo, Norvège) attirent l'attention sur le fait que les deux équipes américaines ont examiné des neurones dans des régions différentes du cortex (l'aire de projection des vibrisses pour la première équipe et le cortex visuel pour la seconde). Le degré de plasticité de ces régions cérébrales pourrait ne pas être identique, ce qui permettrait d'expliquer pourquoi les deux équipes n'aboutissent pas au même résultat.
Quoi qu'il en soit, les avancées technologiques illustrées par les travaux des deux équipes américaines devraient permettre de progresser rapidement dans la compréhension de la dynamique des structures neuronales impliquées dans la mise en place de la mémoire.
J.T. Trachtenberg et coll., « Nature » du 19-26 décembre 2002, pp. 788-794, J. Grutzendler et coll., pp. 812-816, et O.P. Ottersen et P.J. Helm, p. 751.
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