LES DEPUTÉS de la majorité qui composent la Mission d’information sur la famille et les droits des enfants de l’Assemblée (18 UMP, 2 UDF, 8 PS, 2 PC), mise en place il y a un an par son président, Jean-Louis Debré, disent « non » à l’union entre homosexuels, car le mariage constitue «un cadre exigeant de droits et de devoirs conçu pour l’accueil et le développement harmonieux de l’enfant». L’UMP se déclare attachée «au principe fondamental de la filiation, un père, une mère, un enfant». «Quand l’enfant est en jeu, il faut être prudent», souligne la rapporteur Valérie Pécresse. En conséquence, il semble hors de question d’étendre l’adoption au couple homosexuel.
De même, la majorité souhaite «conforter» le «modèle bioéthique français» en maintenant l’interdiction du recours aux mères porteuses et de l’insémination des femmes vivant seules ou avec une compagne. Au sein de l’Union européenne, la Belgique, les Pays-Bas, l’Espagne et le Royaume-Uni tolèrent les mariages entre personnes du même sexe, et certains de ces pays autorisent l’adoption et l’insémination artificielle. En France, quelque 200 000 enfants seraient élevés actuellement dans des familles homosexuelles, selon les associations. «La société française ne se trouve pas en retard, c’est la majorité (UMP-UDF) qui a de sérieux blocages, commente Alain Piriou, porte-parole de l’Interassociative lesbienne, gaie, bi- et trans. Tout le droit de la famille est mis sous cloche.»
Délégation de responsabilité parentale.
En revanche, majorité et opposition, d’une même voix, veulent faire des pactes civils de solidarité (Pacs, 40 100 en 2004, soit + 23 % en un an) «un contrat de couple cohérent». Le rapport propose «d’ouvrir un droit à pension de réversion aux partenaires pacsés depuis cinq ans» en cas de décès du conjoint. Dans les familles recomposées après une séparation, la mission plaide en faveur de la reconnaissance du rôle de la belle-mère ou du beau-père, qui pourrait s’appliquer d’ailleurs à des homosexuels, dans l’éducation des enfants de leur conjoint, via une «délégation de responsabilité parentale». Le statut du «délégué», qui pourrait être aussi un grand-parent ou un frère, notamment, serait légalisé, alors qu’aujourd’hui il doit demander une autorisation pour prendre l’enfant à la sortie de l’école.
En ce qui concerne la résidence alternée, la mission demande au ministère de la Justice de diffuser un «guide des bonnes pratiques» et au juge de trancher au cas par cas, ce qu’il fait déjà. Pour sa part, la défenseure des enfants, Claire Brisset, avait préconisé «d’exclure» de la résidence alternée les moins de 5 ou 6 ans, s’inquiétant de l’impact psychologique de ce mode de garde.
A quoi s’ajoute une série d’autres recommandations. Au chapitre de la naissance, l’accouchement sous X devient accouchement « dans la discrétion », afin que le nouveau-né puisse connaître son origine à 18 ans. Et un double guichet pour les gamètes destinées à l’aide médicale à la procréation assurerait pour l’un l’anonymat du donneur, pour l’autre, l’accès à son identité.
En matière de droits des enfants, tous les projets de loi seraient à soumettre au défenseur des enfants. A 7-8 ans, les enfants auraient le droit de saisir le juge pour une modification des conditions de résidence. S’ils le souhaitent, leur présence dans toute procédure qui les concerne serait autorisée, mais ils auraient la possibilité de refuser une audition sollicitée par l’autorité judiciaire.
Après une fécondation in vitro, eten cas de décès du père, l’épouse serait autorisée à bénéficier d’une implantation de l’embryon entre le sixième et le douzième mois suivant la mort. En ce qui concerne le Pacs, le rapport parlementaire suggère la création d’un devoir de soutien entre partenaires, un droit de jouissance gratuite du logement pendant un an au partenaire survivant, une absence professionnelle d’un jour pour la conclusion du pacte et la prise en compte comme employée à domicile de la personne travaillant avec son partenaire.
La parentalité après une séparation fait aussi l’objet d’une attention particulière : diffusion d’un guide de la Justice sur les bonnes pratiques de la résidence alternée, adaptation du régime des prestations familiales à la résidence alternée, médiation obligatoire lors de mésentente des parents, action de la justice renforcée (circulaire) à l’encontre des parents qui ne respectent pas leurs pensions alimentaires, et retrait total ou partiel de l’autorité parentale quand un parent n’exerce pas son droit de visite et d’hébergement. Enfin, la personne qui élève l’enfant en cas de décès du parent doit en avoir la garde si elle en fait la demande au juge. Seul l’intérêt du jeune peut s’opposer à son droit d’entretenir des relations avec ses ascendants.
Autant de mesures susceptibles de faire l’objet de propositions de loi.
Des pistes pour la prévention de la maltraitance
La Mission d’information de l’Assemblée nationale sur la famille et les droits des enfants appelle à l’action préventive plutôt qu’au diagnostic en matière de maltraitance infantile. Le conseil général, doté d’une cellule de signalements centralisant toutes les informations (« le Quotidien » du 26 janvier), est désigné comme le responsable de la détection des mineurs en danger. Seules les situations extrêmes relèvent directement de la justice. Les travailleurs sociaux doivent bénéficier d’une formation qui les prépare à découvrir les signes avant-coureurs du mal et non plus seulement les dégâts de sévices, de violences et de privations.Le repérage de la maltraitance passe par des programmes adhoc au sein des instituts universitaires de formation des maîtres. Toujours en amont, la politique de protection de l’enfance en danger nécessite une attention particulière des intervenants médico-sociaux lors de l’entretien du 4e mois de grossesse, puis pendant le séjour à la maternité. Les maisons de naissance et les services de maternologie, trop rares à ce jour, devraient être développés. Par ailleurs, il est indispensable de faire figurer la notion de «secret social partagé» dans l’arsenal législatif en vue d’améliorer la tâche des professionnels. Les visites médicales pour les moins de 3 ans constituent également des outils de choix. D’une part, il convient de réaffirmer le bien-fondé des trois examens fixés à 1 semaine, à 9 mois et à 2 ans et, d’autre part, il importe d’imposer un rendez-vous à 3 ans.
En direction des familles, il faut donner à l’Aide sociale à l’enfance les moyens de suivre les parents, tandis que l’accueil de jour des enfants à risque est à multiplier. Enfin, la Mission demande un remboursement par la Sécurité sociale des consultations enfant-parents chez le psychologue.
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