Des résultats récents de grandes études observationnelles montrent que le traitement par anti-TNF n'est pas un facteur de risque de cancer tous types confondus, ni de cancers solides. En revanche, il semble y avoir une augmentation du risque de lymphomes, selon les informations obtenues par l'observatoire RATIO.
Le TNF joue un rôle important dans l'inflammation, mais aussi dans le contrôle de la croissance tumorale. Les effets exercés par le TNF sur la carcinogenèse humaine sont cependant mal connus. La relation entre la suppression de la fonction naturelle du TNF et le risque de cancer reste un sujet de controverse. Si une métaanalyse, publiée dans le « JAMA » en 2006, mettait en évidence une augmentation du risque de cancer chez les patients ayant une polyarthrite rhumatoïde (PR) traités par anti-TNF, il semble qu'il existe un conflit entre les données provenant des études cliniques et celles issues des études observationnelles. Les premières manquaient probablement de recul pour évaluer au mieux les effets carcinologiques potentiels des anti-TNF sur le long terme. De nouvelles données observationnelles sont aujourd'hui disponibles. Une grande étude de cohorte suédoise a rassemblé une vaste majorité des patients ayant une PR, traités en Suède entre 1998 et 2006, à partir de registres nationaux, ce qui représente près de 67 000 patients, dont 6 403 traités par anti-TNF. La réponse thérapeutique aux biothérapies était prise en compte dans l'analyse et évaluée par le score d'activité clinique de la maladie (DAS28) et le score de qualité de vie (HAQ).
Une incidence de tumeurs solides stable.
Cent soixante-neuf cancers ont été diagnostiqués chez les patients sous anti-TNF. Comparés aux 3 746 cas survenus chez les rhumatisants non traités par biothérapies, le risque relatif de cancer sous anti-TNF n'est pas augmenté (RR = 0,94 {O,80-1,12}). La durée cumulée de prise d'un anti-TNF ne modifie pas ce risque (RR avant 1 an = 1 vs RR à plus de 3 ans = 0,93). De même, la réponse aux anti-TNF n'est pas un facteur prédictif de cancer (RR bonne réponse DAS 28 versus pas de réponse DAS28 = 0,90). Les auteurs ont également comparé ces données à celle de la population générale suédoise et n'ont, là encore, pas mis en évidence d'augmentation du risque (RR = 1,04 [0,89-1,21]).
Ces résultats, qui concernent les cancers dans leur globalité, sont confirmés pour les cancers solides, par l'étude de la cohorte de PR prospective allemande RABBIT. Il s'agit d'une étude cas-témoins dans laquelle les cas de cancers solides survenus chez des patients traités par anti-TNF et les témoins ont été appariés selon l'âge, le sexe, le statut tabagique, l'indice de masse corporelle et l'activité de la maladie (DAS28). D'éventuelles comorbidités chroniques (pathologies hépatiques, rénales, pulmonaires…) ont aussi été prises en compte. Cinq mille patients ont ainsi été suivis pendant trois mois à six ans. Soixante-neuf patients ont développé un cancer solide, correspondant à une incidence de 5,8/1 000 patients-années. Les deux types de cancers les plus fréquents sont les cancers du poumon et du sein. Les auteurs n'ont trouvé aucune différence d'incidence entre les patients exposés et non exposés aux anti-TNF.
Un risque de lymphome majoré.
En France, le registre national RATIO a relevé tous les cas de lymphomes survenus chez les patients traités par anti-TNF, depuis trois ans. Cette étude de cohorte prospective, menée auprès de services de rhumatologie hospitaliers français, a dénombré 38 cas de lymphomes, dont 27 patients traités pour polyarthrite rhumatoïde. Chaque diagnostic a été validé par un comité d'experts avec relecture anatomopathologique. Il s'agissait d'un lymphome non hodgkinien dans 81 % des cas. Sur les 7 lymphomes de Hodgkin ou Hodgkin-like, 4 étaient positifs pour le virus Epstein-Barr. La durée médiane de traitement par anti-TNF a été de deux ans. Le dernier anti-TNF prescrit avant diagnostic de lymphome est l'infliximab dans 18 cas, l'adalimumab dans 13 cas et l'étanercept dans 7 cas. L'étude cas-témoins, impliquant 2 témoins pour 1 cas, montre que, comparé à la population générale française de référence, les patients sous anti-TNF ont deux fois plus de risque de développer un lymphome non hodgkinien et cinq fois plus de risque en ce qui concerne les lymphomes hodgkiniens (SMR respectivement 2,14 et 5,05). En revanche, dans la spondylarthrite ankylosante, il ne semble pas exister de surrisque, mais le nombre de cas colligés est beaucoup moins important.
D'après la session « anti-TNF therapy in RA », communication orale du Dr J. Askling, (Suède) et les présentations de posters du Pr Xavier Mariette (hôpital Bicêtre) et de A. Strangfeld (Allemagne).
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