UNE ÉQUIPE de biologistes de Tokyo (Dr Kazihisa Nakao) a mis en place un travail complexe afin d’analyser les possibilités de développer, par des techniques de bio-ingénierie, des bourgeons dentaires. Ils ont utilisé des cellules uniques dissociées provenant de tissus épithéliaux et mésenchymateux extraits d’ébauches dentaires, prélevées dans la mâchoire inférieure d’une souris ED14.5.
Pour reconstituer un bourgeon composé d’un contingent normal de cellules épithéliales et mésenchymateuses, les auteurs ont injecté des cellules à haut taux de renouvellement issues des deux compartiments dans un gel de collagène. En moins de vingt-quatre heures, ces cellules se sont organisées avec une compartimentation appropriée entre les deux types de cellules, avec des connexions intercellulaires. Cette ébauche néoformée a ensuite été introduite dans la capsule rénale de souris pour une période de 10 jours à l’issue de laquelle une analyse histopathologique a été effectuée.
Ce travail a permis d’observer que le tissu injecté pouvait donner naissance à plusieurs incisives et qu’elles étaient composées de différents tissus : odontoblastes, dentine, tubules, améloblaste, émail, pulpe dentaire, analogue des racines, vaisseaux sanguins, os alvéolaire et ligaments péri-odontaux. Ce résultat a été obtenu chez 50 à 100 % des animaux testés. L’hybridation in situ de la dent reconstituée a mis en évidence de l’ARNm pour la sialoprotéine, l’amélogénine et la périostine, qui constituent des marqueurs spécifiques des odontoblastes, des aménoblastes et des ligaments péri-odontaux, respectivement.
Les auteurs ont ensuite examiné les capacités des bourgeons produits à régénérer des dents en culture in vitro. Ce qu’ils ont pu prouver, puisqu’il existait in vitro des structures complexes et minéralisées contenant les différents types cellulaires attendus.
Une dent néoformée à la place de la dent enlevée.
Le Dr Nakao a placé dans la mâchoire d’une souris, chez laquelle une dent avait été ôtée, un bourgeon dentaire qui avait été cultivé pendant une dizaine de jours dans la capsule rénale de l’animal. Dans les semaines qui ont suivi, une dent néoformée a pris la place de la dent enlevée, et sa structure était tout à fait fonctionnelle.
Enfin, les auteurs ont analysé les relations intercellulaires et ont ainsi pu déterminer que les lympho-cytes CD29 représentent des éléments essentiels, issus du tissu mésenchymateux, qui permettent l’établissement de liaison entre les cellules au moment de l’organogenèse.
«Ces résultats indiquent qu’un bourgeon dentaire et une dent reconstituée par des procédures de bio-ingénierie sont transplantables et qu’ils peuvent se développer en une dent normale dotée d’une structure complète. En outre, ce travail suggère fortement que, grâce à ce type de remplacement, il est possible d’obtenir une reconstitution des structures biologiques et fonctionnelles chez un animal adulte.»
Les travaux menés sur les cellules souches laissent penser que la thérapie régénérative ne pourra être fonctionnelle que si elle s’accompagne d’étapes de reconstitution structurelle en trois dimpensions. «Notre travail constitue donc une contribution essentielle dans le développement des technologies de bio-ingénierie et la future reconstitution des organes primordiaux in vitro », concluent les auteurs.
« Nature Methods », édition avancée en ligne.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature