MALGRÉ L'AVIS d'un médecin-inspecteur de la Ddass, la préfecture de Lyon a refusé en avril dernier de régulariser une Camerounaise, âgée de 29 ans, arrivée en France en avril 2004 et qui a découvert sa séropositivité au stade de sida, trois mois plus tard. La préfecture a estimé que les preuves et la durée de résidence en France de la requérante étaient insuffisantes pour lui délivrer une carte de séjour, normalement accordée aux étrangers malades qui ne peuvent être soignés chez eux.
Deux recours.
Après deux recours en référé, la situation de la jeune malade n'est toujours pas régularisée. Le premier recours a été rejeté sans audience le 15 juillet dernier, alors que, une semaine plus tard, un autre juge saisi pour le cas assez semblable d'une femme centrafricaine séropositive faisait suspendre la décision de la préfecture. Deux décisions divergentes pour la même situation.
Pour tenter d'adopter une position identique, le tribunal administratif a choisi d'étudier en formation plénière le deuxième recours déposé par la plaignante.
Les neuf présidents de chambre qui constituaient le tribunal se sont réunis le 12 septembre dernier. Au cours de l'audience, l'avocate de la préfecture, Me Dominique Schmitt, a expliqué que « l'administration n'a pas la partie facile. Elle doit apprécier en fonction du droit et des éléments dont elle a connaissance ». Elle a aussi rappelé l'augmentation exponentielle des demandes de régularisation d'étrangers au titre de leur état de santé : 72 dossiers déposés dans le Rhône en 2000, 420, pour les six premiers mois de 2005. Le commissaire du gouvernement, pour sa part, indiquait que la France « n'avait pas vocation à accueillir toute la misère du monde », mais demandait la suspension de la décision, « afin de donner à la jeune femme toutes les chances d'être encore en vie lorsque son dossier serait examiné sur le fond », le délai prévu étant d'au moins un an. Me Schmitt précisait alors : « Si la préfecture prenait une décision d'éloignement, vous savez mieux que moi qu'elle ne pourrait être effective. »
« Un juridisme un peu fou ».
D'abord mise en délibéré, la décision du collège a été rendue publique à la fin de la semaine dernière. Considérant que « les décisions litigieuses de la préfecture n'ont pour effet ni de mettre fin à son traitement ni, par elles-mêmes, de la contraindre à regagner son pays », les juges ont estimé qu'il n'y avait pas de « situation d'urgence » justifiant la suspension en référé. La requérante devra attendre l'examen de fond de son dossier.
« On est dans un juridisme un peu fou, a commenté Jean Costil, représentant à Lyon de la Cimade (service œcuménique d'entraide et d'accompagnement des migrants). Le préfet maintient dans une situation irrégulière une personne qu'il jure de ne pas reconduire à la frontière. » La Cimade regrette cette décision collégiale qui « va faire jurisprudence ». Selon l'association, la première conséquence pratique pour les étrangers sera qu'aucun recours-suspension ne sera déposé auprès du tribunal administratif. « Cela ne sert plus à rien », a conclu Jean Costil.
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