De notre envoyée spéciale
« Pourquoi 2004 ? », lance un étudiant. « Pourquoi pas 2008, 2010 ou 2015 ? », lui réplique depuis la tribune le Dr Jean-Pierre Castioni, de l'Union nationale des omnipraticiens français (UNOF, qui regroupe les généralistes de la CSMF). Le débat, organisé à Besançon par l'Association nationale des étudiants en médecine de France(ANEMF) sur le futur diplôme d'études spécialisées (DES) de médecine générale, a été souvent vif et animé.
« Nous ne sommes pas du tout contre cette réforme », assure un étudiant. « C'est le fait qu'elle ait été avancée à 2004 qui nous pose problème. »
En effet, avec l'entrée de la médecine générale (MG) dans le nouvel examen national classant qui va remplacer l'internat, les jeunes étudiants, qui entamaient leurs études médicales en envisageant une carrière en médecine générale, se trouvent désormais contraints à préparer pour ainsi dire un concours.
« Il est temps que cette réforme se mettre en place et que le délai d'attente se termine », insiste le Dr Bernard Bros. La présence à Besançon du premier président de l'ANEMF (en 1965) était tout un symbole, dans cette ville où avait eu lieu précisément l'un des premiers congrès de l'ANEMF. C'est lui qui a dressé un historique de la réforme du troisième cycle, en évoquant « l'hyperspécialisation » de la médecine d'aujourd'hui et une certaine « déshumanisation » pour expliquer le malaise de la MG. « Vous avez beaucoup de chances d'être étudiants en médecine actuellement car vous disposez des meilleurs moyens pour devenir de bons médecins », a assuré Bernard Bros. Et pour le Dr Pierre-Louis Druais, président du CNGE (Collège national des généralistes enseignants), cette réforme « doit contribuer à améliorer l'acquisition des compétences ».
En rappelant que « le généraliste était (souvent aujourd'hui) celui qui avait échoué à l'internat », le Pr Jean-Luc Debru, vice-président de la Conférence des doyens, a enfoncé une porte ouverte, désormais sur le point de se refermer.
Quelles conséquences pratiques impliquera le nouvel examen national classant (ENC) ? Concernant notamment la liberté d'installation du médecin ? « Il faudra trouver une solution avant qu'on nous en impose une », a admis Olivier Marchand, porte-parole de l'ISNAR, le syndicat des résidents, futurs généralistes.
Le problème du deuxième cycle
Devant la possible remise en cause de ce principe, un étudiant s'insurge : « Serait-ce envisageable dans le pays des droits de l'Homme ? »
Et quid encore de la rémunération du généraliste ? La tarification à l'acte sera toujours en vigueur, a rassuré le Dr Castioni, et les inégalités d'honoraires avec les spécialistes s'estomperont.
Finalement, pour que la médecine générale soit « réhabilitée », elle doit d'abord faire son entrée dans le deuxième cycle. Or les stages pratiques de MG en deuxième cycle n'existent encore que sur le papier, faute de budget... et de décret d'application.
De son côté, le « troisième cycle doit devenir le cycle d'apprentissage et de perfection de la formation, avec le soutien des aînés », a affirmé le Dr Bros. Et notamment via le tutorat. L'étudiant en 3e cycle doit devenir responsable de sa formation.
Le stage chez le spécialiste est également considéré comme un outil pédagogique fondamental, qui lui permet de « prendre conscience du réseau qui entoure le généraliste », d'après le président du CNGE.
Le colloque a également été l'occasion de débattre sur les tendances de la médecine générale. De la prise en charge d'un patient, on passe à « l'accompagnement de ce patient dans sa propre prise en charge », a expliqué le Dr Patricia Mercier, généraliste. « Nous devons revoir nos modes d'organisation et notamment songer à l'exercice pluridisciplinaire et interprofessionnel. »
« Des généralistes-professeurs d'université... à quand des PU-PH de campagne ? » La question des carabins qui s'affiche à l'écran souligne la satisfaction de voir les généralistes accéder à l'enseignement et à la recherche. Ou à un statut universitaire.
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