LES CHIENS seraient-ils en voie de devenir de précieux bras droits pour les médecins ? Il a déjà été rapporté que l'animal est capable de repérer un cancer cutané ou une hypoglycémie chez les diabétiques (« le Quotidien » n° 7298). Aujourd'hui, une étude britannique indique qu'un chien bien dressé peut, en outre, détecter un cancer de la vessie en flairant l'urine d'un patient.
Il a été établi que les tumeurs produisent des substances organiques volatiles qui peuvent éventuellement diffuser dans l'atmosphère via l'haleine, la transpiration ou d'autres sécrétions corporelles. Certaines de ces substances pourraient posséder des odeurs spécifiques, détectables par l'odorat développé des chiens.
Une signature olfactive particulière.
En se fondant sur cette théorie, Willis et coll. ont émis l'hypothèse que l'urine des malades atteints d'un cancer de la vessie pouvait être associée à une signature olfactive particulière, repérable par des chiens dressés à cet effet. Pour tester leur hypothèse, les chercheurs britanniques ont dû apprendre à des chiens à reconnaître « l'odeur d'un cancer de la vessie ». Mais comment s'y prendre ? Les chiens policiers qui détectent la présence de drogue ou d'explosif sont dressés grâce à des échantillons purs de la substance qu'ils doivent rechercher. Mais, dans le cas des chiens destinés à diagnostiquer un cancer, d'évidents problèmes de sécurité sanitaire rendent impossible l'utilisation d'échantillons de tumeurs non fixés (et les fixateurs modifient largement l'odeur des tissus).
En outre, les analyses de chromatographie et de spectrométrie de masse réalisé à partir de l'urine des malades n'ont pas permis l'identification de substances particulières qui pourraient devenir la cible des chiens.
Willis et coll. ont donc dû procéder de manière détournée. Ils ont fait sentir à 6 chiens de race et d'âge variables 81 échantillons d'urine, 27 recueillis auprès de patients atteints d'un cancer de la vessie et 54 recueillis auprès de témoins sains ou souffrant d'une pathologie différente du cancer de la vessie. Les chiens ont été dressés à établir la distinction entre les deux groupes d'échantillons. En plaçant des échantillons d'urine de malades dans le groupe « témoin », les chercheurs se sont assurés que les chiens ne risquaient pas d'associer au cancer de la vessie des odeurs qu'on retrouve dans d'autres pathologies. Il était en particulier très important que les odeurs associées à l'inflammation, à l'infection ou à la présence de sang dans les urines ne soient pas reconnues comme spécifiques du cancer de la vessie.
54 essais et 22 identifications.
A l'issue de la période de dressage, les chercheurs ont testé les animaux en leur présentant des groupes de sept échantillons d'urine qu'ils n'avait jamais sentie. Chaque groupe d'échantillons en comprenait un provenant d'un malade souffrant d'un cancer de la vessie et six provenant de témoins. Sur 54 essais (six chiens et neufs tests par chien), 22 ont conduit à l'identification de l'échantillon recueilli à partir d'un patient souffrant d'un cancer de la vessie.
Les chiens ont réussi à repérer 41 % des malades. S'ils avaient choisi les échantillons d'urine au hasard, ce taux de réussite n'aurait été que de 14 %.
Les chiens sont donc réellement capables de détecter une signature olfactive dans l'urine des malades atteints d'un cancer de la vessie. Reste maintenant à trouver comment améliorer le protocole de dressage de manière à augmenter les performances diagnostiques des animaux.
C. M. Willis, « BMJ » du 25 septembre 2004, pp. 712-715.
Infaillibles ?
Au cours de la phase d'apprentissage, les chercheurs ont été intrigués par le fait que les chiens classaient systématiquement un échantillon d'urine du groupe des témoins dans le groupe des malades. Ce patient « témoin » a été convoqué pour un nouvel examen. Alors que sa vessie ne présentait aucune anomalie, les médecins ont découvert qu'il souffrait d'un carcinome rénal.
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