Thromboses veineuses profondes
ON DENOMBRE entre 50 000 et 200 000 morts chaque année aux Etats-Unis par embolie pulmonaire, alors que le nombre de décès par accidents de la route est de 42 116, celui par cancer du sein, de 40 200, et celui dû aux infections par le VIH, de 14 999. L'incidence des embolies pulmonaires est de 1 pour 1 000 par an dans la population caucasienne de plus de 18 ans.
L'âge, l'ethnie, le sexe et, peut-être, la saison interviennent dans le risque de thrombose veineuse profonde (TVP). L'âge est le facteur le plus important : l'incidence est de 0,5 pour 1 000 chez les 50-59 ans, de 1 pour 1 000 chez les 60-69 ans, de 2 pour 1 000 chez les 70-79 ans et de 4 pour 1 000 chez les plus de 80 ans. Les Caucasiens et les Noirs sont plus touchés que les Hispaniques et, surtout, que les Asiatiques. Une mutation du facteur V de Leiden est trouvée chez 5 % des Caucasiens et chez seulement 0,5 % des Asiatiques. En revanche, on ne note pas de différence chez l'homme et la femme jusqu'à 75 ans, mais, au-delà, l'homme est le plus touché. Enfin, en ce qui concerne l'influence des saisons, une étude française a montré qu'il y a davantage de TVP l'hiver que l'été. Les facteurs de risque sont les lésions vasculaires, la stase veineuse et les anomalies de la coagulation.
La majorité des TVP sont dites idiopathiques (entre 25 et 50 %, selon les études) ; la phlébite est secondaire à un cancer dans 15 à 25 % des cas et à une intervention dans 20 % des cas.
Vingt pour cent des phlébites ont une extension proximale ; parmi ces dernières, 70 % se compliquent d'une embolie pulmonaire, dont 10 % sont mortelles et 90 % régressent sous traitement.
Face à la fréquence et à la gravité de cette pathologie, on s'est efforcé de stratifier le niveau de risque pour adapter les stratégies préventives. A titre d'exemple, la chirurgie orthopédique et abdominale et les traumatismes multiples sont considérés à très haut risque, les néoplasies exposent à un risque modéré, et une hormonothérapie à un risque faible.
Les résultats d'essais récents apportent des informations sur de nouvelles molécules, telles que le fondaparinux (Arixtra, Sanofi-Synthélabo), ou en développement, comme l'idraparinux (Sanofi) et le ximélagatran (Exanta, AstraZeneca).
Le fondaparinux est un inhibiteur sélectif du facteur Xa aussi efficace et sûr que les héparines de bas poids moléculaire (Hbpm), comme le montrent les essais Matisse-PE et Matisse-DVT, dans le traitement curatif des embolies pulmonaires et des phlébites.
L'idraparinux est un pentasaccharide synthétique en cours de développement, qui, comme le fondaparinux, inhibe le facteur Xa. Van Vogh PE, Van Gogh DVT et Van Gogh Extension sont trois essais de phase III qui ont pour objectif de montrer que l'idraparinux est au moins aussi efficace et plus sûr que les AVK en prévention secondaire chez des patients qui ont fait une phlébite ou une embolie.
Egalement en développement, le ximélagatran appartient à une nouvelle classe d'anticoagulants ; c'est un inhibiteur sélectif et direct de la thrombine, actif par voie orale. Il a l'avantage d'avoir une action rapide, prévisible à dose fixe. Ce médicament ne nécessite pas de suivi biologique de la coagulation (seules les transaminases sont à surveiller en début de traitement). L'essai Thrive, qui compare le ximélagatran à l'énoxaparine, a mis en évidence une efficacité identique et un bénéfice sur les saignements peu graves. En outre, l'étude Exult-A a montré la supériorité du ximélagatran sur la warfarine chez des patients en postopératoire, avec un bénéfice sur le risque d'embolie pulmonaire d'EP et de TVP, et sur la mortalité globale (20,3 % d'événements versus 27,6 %, p = 0,03). On n'a pas constaté de différence sur le taux de saignement dans les deux groupes.
En ce qui concerne les molécules disponibles, la warfarine a été comparée en prévention secondaire à l'énoxaparine ou à la daltéparine ; les auteurs n'ont pas observé de différence en termes d'efficacité, mais une meilleure tolérance avec les Hbpm. Une autre étude chez des patients cancéreux a montré que les Hbpm sont plus efficaces que la warfarine.
Il semble donc que, chez les patients à haut risque, les Hbpm soient préférables aux AVK.
Par ailleurs, la question de la durée et de la dose optimales des AVK se pose. Pour la durée du traitement, l'essai Prevent a comparé la warfarine à faible dose à un placebo, après six mois de traitement conventionnel par l'AVK à pleine dose (après un accident thromboembolique). Cet essai a montré l'intérêt de poursuivre le traitement, l'AVK à faible dose étant plus efficace que le placebo (réduction de 64 % des récidives), sans augmentation du taux d'hémorragies. En revanche, pour la dose optimale, l'étude Elate qui comparait warfarine à faible dose et warfarine à pleine dose (après trois mois de traitement conventionnel) a montré l'intérêt de poursuivre le traitement à pleine dose, sans augmentation du taux d'hémorragie. D'autres essais ont montré le bénéfice de la réduction de dose sur les saignements.
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