CHEZ L'HOMME, l'inexistence de processus conduisant au renouvellement des neurones vieillissants ou au remplacement de ceux qui ont été endommagés ne serait pas dû à l'absence de cellules souches neurales, mais à un blocage des mécanismes autorisant leur exploitation.
Une équipe de l'université de Californie vient de démontrer l'existence de cellules souches neurales dans le cerveau humain adulte. Ces cellules sont très semblables à celles qui permettent le turnover des neurones du bulbe olfactif dans le cerveau des rongeurs. Mais chez l'homme, les cellules progénitrices ne se différencient plus qu'en cellules gliales. De plus, la voie de migration qui permettrait à ces cellules de gagner d'autres aires corticales, une fois différenciées en neurones, est visiblement absente du cerveau humain. Les mécanismes impliqués dans ces deux niveaux de blocage restent à identifier.
Une région frontale du cerveau de la souris, la zone subventriculaire (également appelée zone subépendymale), contient des cellules qui, malgré leur allure banale de cellules gliales, possèdent une propriété des plus intéressantes : elles permettent chaque jour la génération de milliers de neurones du bulbe olfactif. Elles se différencient et utilisent le courant rostral de migration pour se déplacer de la zone subventriculaire jusqu'à la partie du cortex impliquée dans l'odorat. Ces cellules sont donc ce qu'il est convenu d'appeler des cellules souches neurales.
La zone subventriculaire
Les similitudes qui existent entre l'homme et la souris autorisaient à espérer que de telles cellules souches étaient également présentes dans le cerveau humain. Sanai et coll. ont donc entrepris d'analyser l'organisation et la fonction des cellules de la zone subventriculaire du cerveau humain.
Les chercheurs ont recueilli et étudié plus de cent échantillons de tissu cérébral humain obtenus lors de résections neurochirurgicales ou d'autopsies. A partir de ces échantillons, ils ont réussi à identifier une couche de cellules gliales semblables aux cellules souches neurales identifiées chez la souris : dans la zone subventriculaire, cette couche de cellules forme un ruban longeant le ventricule cérébral latéral.
Environ 0,7 % des cellules du ruban expriment un marqueur associé à la prolifération des cellules. Cette observation suggère qu'une partie de la population de cellules gliales en ruban est capable de se multiplier. Si ces cellules sont prélevées et mises en culture in vitro, elles vont effectivement se multiplier. Dans des conditions de cultures adéquates, elles sont alors non seulement capables de donner naissance à deux types de cellules gliales (des astrocytes et des oligodendrocytes), mais elles peuvent également se différencier en neurones. Cependant, cette dernière propriété ne semble pas effective in vivo dans le cerveau humain : dans les échantillons analysés, si les cellules du ruban qui se multiplient expriment des marqueurs typiques des astrocytes et des oligodendrocytes, elles n'expriment jamais les marqueurs associés aux cellules neurales matures ou immatures.
Pas de courant de migration.
En outre, il est apparu que le courant rostral de migration observé chez les rongeurs n'existe pas chez l'homme. Aucune voie permettant aux cellules progénitrices de quitter la zone sub-ventriculaire ne semble exister chez l'homme.
Mais pourquoi les cellules souches neurales humaines identifiées par Sanai et coll. ne permettent-elles pas le renouvellement des neurones dans le cerveau humain? Dans l'éditorial accompagnant l'article, Pasko Rakic, de l'université de Yale (New Haven, Connecticut), suggère que les blocages conduisant à ce phénomène sont le résultat d'une adaptation permettant de « garder pour la vie entière des populations de neurones et toute leur expérience accumulée ».
N. Sanai et coll., « Nature » du 19 février 2004, pp. 740-744 et éditorial p. 685.
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