D E même qu'on utilise, à des fins de transplantation, des organes (rein, cur, foie, poumon) provenant de donneurs décédés, peut-on imaginer de prélever et de cultiver des échantillons de cerveau d'humains morts, afin de les greffer ?
On sait maintenant cultiver des cellules progénitrices nerveuses de rongeurs adultes. On sait aussi le faire à partir de foetus humains, ce qui a soulevé des questions éthiques. En revanche, la culture de tissu cérébral provenant de bébés et d'adultes humains s'est pour l'instant heurté à des problèmes. « Bien que la justification thérapeutique de cellules progénitrices adultes et foetales doit encore être évaluée, nos résultats peuvent étendre les applications de ces progéniteurs au traitement des maladies neurodégénératives », indiquent Theo Palmer et coll. (Salk Institute, La Jolla, Californie) dans une lettre publiée aujourd'hui dans « Nature ».
Les auteurs ont tout d'abord étudié deux sources de cellules : d'une part, du tissu cérébral d'un petit garçon de 11 mois, décédé de complications extracérébrales d'une myofibromatose ; d'autre part, la résection du cortex cérébral d'un jeune homme de 27 ans.
Le tissu cérébral du bébé a fait l'objet de sections (hippocampe, zone ventriculaire, cortex moteur, corps calleux) deux heures après le décès ; les échantillons ont été placés dans une solution saline de Hank additionnée d'antibiotiques, puis mise en culture trois heures plus tard.
La zone de résection de l'adulte a été mise en culture au bout de trois heures (hippocampe, substance blanche, matière grise corticale).
Sans entrer dans les détails des techniques de culture, pour obtenir des résultats, il a fallu ajouter du milieu de culture de cellules souches de rats manipulées génétiquement pour produire en excès du FGF-2 et son cofacteur. Ainsi, tous les échantillons cultivés ont donné des cellules nerveuses progénitrices, les meilleurs résultats étant observés avec l'hippocampe et la zone ventriculaire.
Neurones et astrocytes
Les cellules provenant de l'enfant de 11 mois a permis d'obtenir 70 populations de doublement avant que l'on observe des signes de sénescence ; pour les cellules provenant de l'adulte, on a obtenu 30 doublements avant l'apparition de ces signes.
Une différenciation a été observée à toutes les étapes. Les cultures de l'enfant et de l'adulte ont permis d'obtenir des proportions similaires de neurones et d'astrocytes ; toutefois, le nombre de neurones générés spontanément a été moins grand que dans les cultures ftales.
Les auteurs indiquent qu'ils ont déjà travaillé sur 23 échantillons provenant de sujets d'âge différent. La plupart des tissus ont produit des cellules progénitrices, le plus grand délai entre le décès et la mise en culture étant de vingt heures. Les tissus qui proviennent de sujets jeunes donnent davantage de cellules et ont de plus grandes capacités à proliférer.
« L'utilisation de cellules cultivées à partir de tissu embryonnaire (...) soulève des questions éthiques et sociétales. Une précieuse évaluation de l'apport respectif de cellules progénitrices post mortem ou provenant d'adultes ou d'embryons est nécessaire », concluent les auteurs.
« Nature », 3 mai 2001, pp. 42-43.
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