DEPUIS LES ANNÉES 1990, des stratégies de prévention ont été développées pour améliorer la sécurité des soignants et éviter notamment la transmission du VIH lors des accidents d'exposition au sang (AES). L'application systématique des précautions standards a permis de diminuer la fréquence des AES.
Parallèlement à la surveillance des AES mise en place au sein de chaque établissement de soins, une surveillance nationale permet de recenser les contaminations survenues chez des soignants dans les suites des AES pour le VIH depuis 1991, pour le VHC depuis 1997 et pour le VHB depuis 2005.
Le dernier bilan publié, arrêté au 31 décembre 2007, rend compte d'une situation plutôt satisfaisante. Depuis plus de vingt ans, 14 séroconversions VIH et 34 infections présumées (découverte d'une séropositivité chez un personnel de santé qui a exercé au contact de patients infectés et chez qui on ne retrouve aucun autre mode possible de contamination) ont été déclarées. Sur une période plus récente (1996-2007), 4 séroconversions et 2 infections présumées ont été notifiées.
La première séroconversion par contact cutanéo-muqueux.
La dernière l'a été en 2004 chez un secouriste dans les suites d'une projection massive de sang sur le visage et dans les yeux lors de la prise en charge d'un patient VIH+. Un rinçage rapide a été effectué sur les lieux de l'accident et un lavage plus complet plusieurs heures plus tard. Faute d'avoir consulté, le secouriste n'a pas pu bénéficier d'une prophylaxie antirétrovirale. Cette séroconversion «constitue la première séroconversion documentée déclarée suite à un contact cutanéo-muqueux en France», précise Florence Lot, auteure du bilan. «Même si le risque de séroconversion est plus faible qu'après accident percutané (0,03 % contre 0,32 %) , le risque existe et mérite d'être rappelé, notamment en cas de contact sanguin massif et prolongé», souligne-t-elle. Neuf autres cas de ce type ont déjà été signalés dans d'autres pays : 2 en Italie, 2 en Allemagne et 5 aux Etats-Unis. Dans la majorité des cas, il s'agissait d'une exposition sanguine sur le visage (yeux, bouche).
Le risque est également présent pour le VHC, même si, comme pour le VIH, les accidents percutanés (piqûres et coupures) restent les plus fréquents. S'il n'existe aucun recensement européen ou mondial, la littérature a néanmoins fait état d'au moins 3 séroconversions chez des personnels de santé après projection au niveau du visage, et notamment des yeux. Après le pic de 1996 qui a suivi la mise en place de la surveillance des contaminations VHC, le nombre annuel des séroconversions (pas de distinction séroconversion/infections présumées comme pour le VIH) s'est stabilisé entre 0 et 5 cas par an (3 en 2004, 0 en 2005, 1 en 2006 et 5 en 2007).
Respect des précautions standards.
Que ce soit pour le VIH ou pour le VHC, les tâches en cours au moment des AES sont le plus souvent des prélèvements sanguins. Néanmoins, les activités de rangements, de nettoyage ou de transport de déchets, qui ne devraient pas être la cause d'accidents percutanés, ont été impliquées dans au moins 8 séroconversions VIH et 12 infections présumées, ainsi que dans 25 séroconversions VHC (45 %). «Près de la moitié des séroconversions professionnelles VIH ou VHC auraient donc pu être évitées par le respect des précautions standards», souligne l'InVS. Les efforts réalisés en matière de prévention des AES depuis de nombreuses années doivent encore être poursuivis : actions de sensibilisation régulière auprès des professionnels de santé et notamment des infirmières qui sont les plus concernées.
Au moins une contamination récente par le VIH aurait pu être évitée par la prescription en urgence d'une prophylaxie antirétrovirale pour un mois. Les premières recommandations dans ce sens datent de 1995. «La prise en charge thérapeutique d'un AES repose sur une information des soignants en amont de l'exposition et sur la mise en place d'une organisation rigoureuse de la gestion des AES au sein de chaque service», rappelle encore Florence Lot. Le bilan au 31 décembre 2007 montre que, sur les 14 soignants pour lesquels la séroconversion a été documentée, 6 seulement avaient bénéficié d'une prophylaxie antirétrovirale. Toutefois, on ne peut parler d'échec que chez 4 d'entre eux, qui ont poursuivi le traitement au moins quinze jours avec une observance correcte.
Enfin, aucun cas de contamination par le VHB n'a été recensé depuis l'élargissement de la surveillance à ce virus en 2005. Compte tenu d'un taux de couverture vaccinale inférieur à 100 % chez les professionnels, de la possibilité de non-réponse à la vaccination et du caractère particulièrement transmissible de ce virus, l'absence de contamination déclarée «ne reflète sans doute pas la réalité», s'étonne Florence Lot. Un appel est donc lancé aux médecins afin qu'ils déclarent à l'Institut de veille sanitaire toute contamination par le VHB chez un professionnel de santé.
Pas de geste bénin
Les aiguilles utilisées pour des gestes en intraveineux ou intra-artériel (aiguille IV) sont le plus souvent le matériel en cause dans les AES. Toutefois, les aiguilles à suture et les aiguilles sous-cutanées représentent 20 % des matériels en cause dans les AES et dans neuf des séroconversions VHC. D'où une nécessaire application des précautions standards et d'une démarche systématique après AES, «quel que soit le geste, même lorsqu'il présente a priori un moindre risque de contamination virale».
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