LA DYNAMIQUE de la résistance bactérienne ne sera pas réglée par l'antibiothérapie. En effet, en raison du génie adaptatif des bactéries, il est clair que la course est perdue d'avance. Plus le nombre d'antibiotiques augmente, plus les résistances augmentent ! D'où la nécessité de mettre en place une stratégie associant la prévention de la dissémination bactérienne et le bon usage des antibiotiques afin que les résistances restent peu fréquentes. Ce qui impose de diminuer la consommation des antibiotiques, de réduire la transmission des bactéries entre les individus et de développer des solutions ponctuelles pour résoudre des problèmes particuliers de résistance.
De nouveaux antibactériens ont été développés avec plusieurs objectifs, le principal étant la lutte contre la résistance de certaines bactéries aux antibiotiques : c'est le cas des staphylocoques Aureus résistants à la méthicilline (SARM), des stapylocoques Aureus de sensibilité intermédiaire aux glycopeptides (GISA), des entérocoques résistants à la vancomycine (VRE), des entérobactéries productrices de bêtalactamases à spectre élargie (EBLSE) et d'autres bactéries résistantes à tous les antibiotiques comme Acinetobacter, Pseudomonas ou Stenotrophomonas. Les autres objectifs visent à obtenir une activité intrinsèque meilleure que celle de la vancomycine, des concentrations dans les tissus « difficiles » supérieures et une amélioration de la tolérance.
Parmi les molécules récentes, on distingue : une nouvelle classe d'antibiotiques - les oxazolidinones - dont le chef de file est le linézolide, des lipoglycopeptides (daptomycine, telavancine, oritavancine), des carbapénèmes (doripénème), des glycylcyclines (tigécycline) et
des céphalosporines (ceftobiprole, ceftaroline).
Une réponse microbiologique différente vis-à-vis des VRE et des GISA
Le linézolide se caractérise par un mode d'action original : il empêche la formation du complexe ribosomal d'initiation 70S. Il est bactériostatique vis-à-vis des staphylocoques (SARM, GISA) et des entérocoques VRE. Il n'entraîne pas de résistance croisée avec les autres antibiotiques. Son inconvénient est l'apparition d'une toxicité hématologique et neurologique au-delà de quinze jours de traitement. Le linézolide constitue une alternative thérapeutique en cas d'infections rares compliquées de la peau et des tissus mous, ou en cas d'intolérance à la vancomycine. Il a l'avantage d'être administrable par voie injectable ou orale.
La daptomycine est un lipopeptide, bactéricide, d'action rapide. Il est actif sur les staphylocoques Aureus, notamment GISA et SARM résistants à la vancomycine, mais insuffisamment sur les entérocoques pour une efficacité clinique satisfaisante. En outre, une exposition préalable à la vancomycine semble réduire son activité sur certaines souches.
La télavancine, bactéricide, est un antibiotique très proche structurellement de la vancomycine. Elle se fixe, comme elle, sur la terminaison D-Ala D-Ala du peptidoglycane des staphylocoques. Son inconvénient par rapport à la vancomycine reste à préciser.
L'oritavancine, bactéricide, est également très proche de la vancomycine. Il se fixe sur le dipeptide terminal (D-Ala-D-Ala) du précurseur du peptidoglycane des staphylocoques. Il est actif sur les staphylocoques Aureus GISA et les VRE.
Une efficacité comparable à celle de la vancomycine dans les infections à SARM.
Le linézolide est aussi efficace que la vancomycine. C'est ce qui a été montré dans deux essais pivots linézolide versus vancomycine chez des patients atteints d'une pneumonie nosocomiale à SARM (Rubinstein, 2001 et Wunderink, 2003). Il constitue donc une alternative thérapeutique administrable oralement.
Les indications de la daptomycine sont les infections compliquées de la peau et des tissus mous, dans l'endocardite infectieuse du cœur droit du à Staphylococcus aureus, et les bactériémies à S. aureus quand elles sont associées à une endocardite infectieuse du cœur droit ou une infection compliquée de la peau et des tissus mous : ce qui la rend difficilement utilisable... d'autant plus qu'elle est moins efficace que la vancomycine et que des résistances apparaissent en cas de traitement prolongé. En outre, elle est inefficace au niveau pulmonaire.
L'oritavancine a montré dans un essai clinique une efficacité comparable à celle de la vancomycine dans les infections à SARM, lorsque la durée du traitement est de sept jours.
Absence de réponse pertinente vis-à-vis des autres bactéries : EBLSE, P. aeruginosa, Stenotrophomonas,Acinetobacter.
La doripénème et les céphalosporines n'apportent rien de plus, notamment dans les infections à EBLSE. Quant à la tigécycline, antibiotique bactériostatique, des résistances se sont développées très rapidement, en cours de traitement. Ils ne doivent donc pas être prescrits en première intention, mais sur antibiogramme.
Il est nécessaire de poursuivre l'évaluation clinique de ces nouvelles molécules, et de considérer, comme pour tous les antibiotiques, les conséquences écologiques de leur utilisation comme leur effet indésirable le plus dangereux.
D'après un entretien avec le Dr Jean-Pierre Bru, chef de service des maladies infectieuses, Annecy
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