« L’agence régionale de santé n’est pas la juxtaposition des services préexistants de l’État et de l’assurance maladie. Elle représente un nouveau mode de régulation du système de santé », avance Pierre-Emmanuel Blanc, directeur général de l’ARS de Poitou-Charentes. Chaque agence avait carte blanche pour s’organiser. Plus grande région française, Midi-Pyrénées s’est divisée en 8 territoires de santé et 33 bassins de santé, tandis que le Limousin, la plus petite, se contente d’un seul territoire de santé et de 11 territoires de proximité. En Poitou-Charentes, l’ARS appuie son découpage tant sur le diagnostic de l’Observatoire régional de santé pour les cinq territoires de santé, que sur la vie des acteurs pour choisir les zonages. Polytechnicien avec une expérience de la grande distribution, Xavier Chastel a en outre imprimé une coloration particulière à l’agence Midi-Pyrénées : placée sous le signe de « l’efficience », elle est organisée comme une entreprise, avec trois directions : financière, stratégie et qualité.
Proximité et démocratie sanitaire
En Limousin et en Poitou-Charentes, le plan régional de santé devrait être arrêté à l’automne. « Depuis deux ans, nous travaillons à fédérer les acteurs de santé dans une région réputée pour son individualisme et où il manque une stratégie en santé claire. À côté des instances de démocratie sanitaire, nous avons donc ajouté des instances de concertation pour les professionnels, qui font des propositions et que je rencontre deux jours par semaine. Le projet stratégique et le plan régional de santé en sont certes un peu retardés, mais leur mise en œuvre n’en sera que plus rapide », poursuit Xavier Chastel. L’ambition de pratiquer la démocratie sanitaire s’inscrit souvent dans le fonctionnement même de l’agence. Ainsi, en Poitou-Charentes, « l’organisation de l’agence reflète-t-elle la volonté d’être proche du terrain : nous avons adopté un modèle de pyramide inversée, où chaque délégation territoriale se trouve en contact avec la totalité des acteurs de terrain. Les services techniques de l’agence n’interviennent qu’en appui », reprend le directeur général. Autre point cardinal de cette démocratie sanitaire : elle tend à devenir quotidienne. « La loi HPST impose un partage constant entre les compétences de l’État et du conseil général. Il n’existe donc pas d’autres solutions que de travailler avec les élus », souligne Michel Laforcade, directeur général de l’ARS du Limousin. Une position que partage son collègue de Midi-Pyrénées : « Tout le monde entend se faire soigner à Toulouse, ce qui déséquilibre l’offre de soins. Nous cherchons donc à renforcer le système de soins en périphérie, ce qui nous amène à être proche des élus. Car toutes nos décisions ont un impact en termes d’emploi et d’aménagement du territoire. »
Des solutions locales aux problèmes partagés par tous
« Les infirmières et aides-soignantes occupent leur poste pendant cinq ans en moyenne, puis changent radicalement de voie. Il faut accompagner ces personnels paramédicaux, depuis leur formation jusqu’à leur maintien en poste », relève également Xavier Chastel. Pour contrer cet écueil, Pierre-Emmanuel Blanc avance une piste : « Au travers de notre schéma directeur des ressources humaines, nous nous intéressons au recrutement des aides-soignants, ainsi qu’au développement des compétences des aidants familiaux. L’une de nos ambitions est d’offrir des analyses fines du terrain, permettant de mettre en adéquation l’offre et la demande de travail dans le domaine de la santé. » Le Limousin et Midi-Pyrénées affrontent l’inégale répartition des médecins en explorant tous deux la piste de l’exercice collectif au sein de maisons de santé, mais suggèrent aussi d’autres pistes : « J’ai demandé à ce que les hôpitaux locaux servent d’appuis à des consultations avancées dispensées par les spécialistes libéraux et hospitaliers », explique Michel Laforcade. Visant le développement des hôpitaux dans les chefs-lieux de canton, l’ARS de Midi-Pyrénées entend aussi peser sur l’offre de soins en travaillant sur l’attractivité des hôpitaux, sur la répartition des stages des internes ou encore sur la création de cabinets secondaires pour les médecins, en collaboration avec les élus communaux.
Un regret, cependant, se fait jour : l’oubli de la dimension sociale dans les attributions des ARS. « En matière de santé, seuls 10 à 12 % des déterminants relèvent du soin. Nous devons être en capacité de travailler avec les Départements sur la santé des plus précaires, car ces populations ne vont jamais au-devant des soins. Nous devons imaginer des points d’accès de proximité : le psychiatre a toute sa place dans le camion du Samu social, par exemple et les délégués cantonaux de la MSA pourraient nous aider à relayer l’information entre pairs », estime ainsi Michel Laforcade.
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