MEDEC 2003

Dépression : obtenir une rémission complète

Publié le 24/04/2003
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La dépression touche 3 millions de Français. Ses répercussions sont importantes en termes de coûts directs et indirects, mais, surtout, elle est responsable d'une mortalité élevée, même si on ne peut pas lui attribuer la totalité des 12 000 suicides recensés chaque année en France. Néanmoins, on sait que la dépression multiplie par 30 le risque de suicide. Des études prospectives de cohorte ont permis d'estimer à 15 % la proportion de déprimés qui mettent fin à leurs jours.

La prise en charge de la dépression reste encore très insuffisante, seule la moitié des patients reconnus déprimés reçoivent un traitement psychotrope et 10 % un traitement antidépresseur à doses efficaces pendant au moins un mois. Pour pallier cette insuffisance, l'ANAES a édicté en mai 2002 des recommandations pour la prise en charge d'un épisode dépressif en ambulatoire. Premier objectif : reconnaître la dépression. L'état dépressif peut en effet être masqué par une symptomatologie trompeuse. Par ailleurs, un certain nombre de patients méconnaissent leur maladie ou sont réticents à une intervention médicale. Deuxième objectif : traiter précocement. Une étude menée auprès de personnes âgées a montré que plus le traitement est retardé, plus le risque de récidive est important. Troisième objectif : établir une relation médecin-malade de qualité. En effet, il faut que le patient reconnaisse sa maladie, qu'il comprenne l'importance de son traitement et qu'il accepte le délai entre sa mise en route et son efficacité clinique, ainsi que d'éventuels effets secondaires et qu'il prenne conscience de la nécessité d'une observance prolongée. C'est un véritable contrat thérapeutique qui doit être passé entre le praticien et son patient ; outre le traitement pharmacologique, celui-ci doit être informé des diverses modalités de prise en charge : psychothérapie de soutien, psychothérapie comportementale, relaxation... Quatrième objectif : obtenir une rémission complète, c'est-à-dire la disparition de toute la symptomatologie. Le risque de récidive est, d'ailleurs, très étroitement lié à l'existence de symptômes résiduels. Il a été estimé à 75 % en cas de rémission partielle contre seulement 25 % en cas de rémission complète. Comme l'a rappelé le Pr Maurice Ferreri : « On conçoit facilement l'importance d'obtenir, lors d'une prise en charge d'un patient déprimé, une rémission complète pour éviter les conséquences, toujours handicapantes et parfois vitales, d'une rémission partielle. »
La prévalence des rémissions partielles varie entre 20 et 40 % selon les études. Cliniquement, en général, les symptômes fondamentaux ont disparu, mais certains signes persistent comme une asthénie, une fatigabilité, une anxiété, accompagnés de perturbations cognitives modestes, mais gênantes, telles des difficultés de concentration et de rétention mnésique. Les conséquences d'une rémission partielle sont délétères pour le patient, source non seulement de récidive, mais aussi d'une augmentation de la résistance au traitement et d'une majoration du risque suicidaire.
La rémission s'apprécie de façon subjective, lorsque le patient déclare avoir retrouvé son état de bien-être antérieur, d'un point de vue symptomatique, devant la disparition des symptômes du DSM-IV caractérisant la dépression, d'un point de vue quantitatif, un score < 8 sur l'échelle de dépression de Hamilton affirmant la guérison de l'épisode aigu dépressif.
Une fois la rémission complète obtenue, il est indispensable de poursuivre le traitement pendant quatre à six mois.

Amphi parrainé par les Laboratoires Wyeth sous la présidence du Pr Maurice Ferreri, avec la participation du Pr Thierry Bougerol et des Drs Jean-Philippe Lenoir et Gilles Frédéric-Moreau.

Les facteurs prédictifs de chronicisation

Plusieurs facteurs peuvent être considérés comme à risque d'échec thérapeutiques partiel et de chronicisation : des troubles de la personnalité, une anxiété, un abus d'alcool, une posologie insuffisante, un traitement trop court et, bien sûr, une mauvaise observance.


Dr Marine JORAS

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7323