D ES soins mal orientés, coûteux et mal remboursés : c'est le constat dressé par le rapport sur la prise en charge des soins dentaires remis à la fin de juillet élaboré par Michel Yahiel au ministère de l'Emploi et de la Solidarité, et qui préconise une importante réforme dans ce domaine.
L'absence de revalorisation des tarifs de soins courants et, à l'inverse, la liberté tarifaire en vigueur pour les prothèses ont conduit à un certain nombre de dérives aujourd'hui unanimement dénoncées.
Ainsi, les dépassements d'honoraires des dentistes n'ont cessé de se multiplier, et la part des soins restant à la charge des patients est de plus en plus importante. Selon la CNAM, sur 38 milliards de francs de dépenses en 2000, un tiers était pris en charge par l'assurance-maladie, un tiers par les assurances complémentaires et un tiers pesait sur les ménages. En outre, le rapport précise que le CREDES estimait dans une étude que 43 % des cas de renoncement aux soins relèvent du secteur dentaire.
Une réforme étalée
sur quatre ans
Les pistes de réforme proposées par cet Inspecteur général des Affaires sociales pour remédier à ces travers sont déjà connues et ont été souvent évoquées. En effet, la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM) avait déjà tenté d'élaborer une réforme allant dans ce sens avec les deux principales organisations professionnelles, la Confédération nationale des syndicats dentaires (CNSD) et l'Union des jeunes chirurgiens-dentistes (UJCD). Il s'agit pour l'essentiel d'améliorer la prévention, notamment en direction des enfants, de revaloriser les soins conservateurs et de plafonner et de mieux rembourser certains travaux prothétiques. Mais le coût de cette réforme était estimé dans sa dernière version entre 5 et 7 milliards de francs par an, soit, somme le soulignait récemment un responsable de l'assurance-maladie, plus que la progression autorisée par le Parlement pour l'ensemble des dépenses d'assurance-maladie en 2001.
« De fait, le retard pris dans la valorisation des soins conservateurs et la prise en considération d'actes les plus médicalement justifiés est tel que toute refonte de la nomenclature se révèle devoir être substantielle et donc assez coûteuse, dans un contexte financier exigeant », remarque Michel Yahiel.
Il préconise donc une application progressive de la réforme étalée sur quatre ans, dont la première étape aurait lieu dès 2002. Concernant les soins, il suggère une revalorisation significative des soins courants les plus faiblement honorés, à savoir les soins canalaires, les extractions et les obturations coronaires. Il se prononce pour le renforcement de la prévention, en instaurant, dès 2002, un bilan diagnostic gratuit des enfants entrant en classe de CP et de 6e.
En matière de prothèses, la démarche est plus novatrice, puisqu'elle consiste en la mise en place de tarifs-plafonds ou de référence pour l'ensemble des actes, en distinguant ceux qui relèvent « d'un panier de soins essentiels », dont la prise en charge serait améliorée (50 %) et les possibilités de dépassements limités, et les autres actes, dont les possibilités de dépassements seraient supérieures et la prise en charge de 30 %. Enfin, il propose de mettre fin à la procédure d'entente préalable et d'améliorer le versement des honoraires aux dentistes dans le cadre de la CMU.
Largement approuvée par la Caisse nationale d'assurance-maladie qui « se félicite des orientations préconisées par le rapport », la réforme ébauchée est cependant condamnée par la CNSD qui juge le projet « incohérent, insuffisant et déséquilibré », et rappelle que c'est le gouvernement qui a bloqué pendant trois ans la réforme qu'il avait négociée avec la CNAM dans la convention de 1997.
L'UJCD, de son côté, tout en se félicitant de la réforme envisagée, demande que des négocations s'ouvrent avec la profession pour la mise en application rapide des principales dispositions de ce texte.
Quant au gouvernement, s'il se dit intéressé par les propositions faites en matière de promotion de la qualité et de la prévention, notamment les deux bilans gratuits proposés au cours de la scolarité, il ne s'est pas engagé pour l'instant sur l'amélioration des tarifs et des remboursements.
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