A U moment où le gouvernement s'interroge sur les moyens à mettre en uvre, pour éviter la pénurie de médecins qui s'annonce dans certaines zones géographiques et certaines spécialités, une étude du ministère de l'Emploi et de la Solidarité fait opportunément le point sur les mesures déjà mises en place dans cinq pays européens et nord-américains (1).
Mais que la régulation soit très administrée comme en Angleterre ou plus libérale comme aux Etats-Unis, aucune de ces mesures ne semblent avoir permis d'atteindre le niveau « idéal » de médecins. En fait, la détermination de l'offre médicale semble davantage liée au contrôle qu'entendent exercer les gouvernements sur les dépenses de santé.
C'est le cas notamment au Royaume-Uni et au Québec où les dépenses de santé, financées par l'impôt, sont contrôlées a priori et où l'intervention des instances de régulation dans la gestion du système de protection sociale est qualifiée de « forte ».
Une offre médicale souvent inférieure aux besoins
Au Royaume-Uni, c'est l'administration centrale, qui fixe, à la fois, le nombre d'étudiants admis dans les facultés de médecine et le nombre d'étudiants admis dans chaque spécialité. Cette régulation est doublée au niveau local, pour le secteur ambulatoire, de listes de médecins habilités à pratiquer par district et qui est fonction du nombre de patients inscrits chez les médecins généralistes (general practitioners).
Au Québec, en dehors des contrôles sur le nombre d'étudiants et du nombre de postes de résidents par spécialité, le système de régulation est axé sur la répartition géographique des médecins en raison des fortes inégalités existantes. Plusieurs mesures ont été prises dans ce sens, comme des tarifs d'actes différentes suivant les régions, un soutien financier à la formation et des primes d'installations dans les régions, dites éloignées. Mais si une amélioration de la densité médicale a été observée, l'ensemble de ces mesures sont partiellement des échecs. Au total, dans ces deux pays, « l'offre médicale apparaît globalement inférieure aux besoins avec un appel complémentaire à l'immigration », souligne l'étude.
En Allemagne et en Belgique, où les systèmes de protection sociale sont financés par les cotisations et gérés par les partenaires sociaux, le contrôle de la régulation se fait moins au niveau de la formation qu'à celui de l'installation par le biais du conventionnement avec la Sécurité sociale. En Allemagne, l'installation n'est possible qu'en dessous des seuils de « saturation » définis pour neufs types de district de planification, même s'il existe des exceptions. En Belgique, c'est le nombre total de médecins ayant accès au conventionnement qui est limité sur la base d'une évaluation des besoins réalisée par une commission spécifique. Ensuite, l'installation n'est ni limitée ni orientée.
Le cas des Etats-Unis
Enfin, à l'autre extrême, on trouve les Etats-Unis où, en l'absence de système de protection sociale collective, c'est le marché qui décide de l'offre médicale, la régulation se faisant a posteriori. Les « Managed Care » Organizations (MCO), soucieuses de contrôler les dépenses ont cherché à revaloriser les soins primaires, ce qui a poussé de nombreux médecins à se reconvertir à la médecine générale. Toutefois, les difficultés de toute une partie de la population à accéder à des soins primaires a contraint le gouvernement à créer de nouveaux métiers intermédiaires : les « physicians assistants » qui travaillent sous contrôle des médecins ou les « nurse practitioners » ou « nurses midwives » qui pratiquent les accouchements.
Entre le premier groupe de pays où existent des listes d'attentes, les seconds où au contraire l'offre médicale est pléthorique et les Etats-Unis où la domination du marché a conduit à une réorganisation de l'offre de soins et une redéfinition des rôles des professionnels, aucun système de régulation ne paraît idéal. C'est sans doute pourquoi la direction générale de la Santé (DGS) en France, qui vient de rendre un rapport sur ce sujet à Elisabeth Guigou et à Bernard Kouchner, les invite à jouer sur toutes ces mesures à la fois.
(1)Pour toute information complémentaire, consulter le site Internet de la DREES : http://www.sante.gouv.fr/drees
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