Déficit de l'AP-HP : divergences au sommet

Publié le 09/07/2003
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Les finances de l'Assistance publique des hôpitaux de Paris (AP-HP) n'en finissent plus de se dégrader : « Le déficit cumulé à la fin de 2003 pourrait dépasser les 350 millions d'euros », annonce le président suppléant de son conseil d'administration, Alain Lhostis, dans un communiqué.

Des prévisions reprises par la directrice générale de l'AP-HP en personne, dans une interview accordée le 7 juillet au journal « Libération ». Rose-Marie Van Lerberghe déclare : « En 2002, on a 140 millions d'euros de reports de charges et, à la fin de l'année, 350 millions d'euros, soit 7 % du budget ». « C'est l'équation dramatique que j'ai à résoudre », ajoute-t-elle. Au « Quotidien », elle précise qu'elle est en cours de réflexion sur les moyens à mettre en oeuvre pour réduire le déficit. « Cela ne se fera pas en un an. Et les restructurations ne feront pas tout. Cela passera surtout par la réallocation des moyens. Deux exemples : la chirurgie interventionnelle se développe, les stents coûtent cher. Mais, en parallèle de ces évolutions, il faut admettre que les services hospitaliers ont moins de travail, on peut récupérer de l'argent de ce côté. Même raisonnement en ophtalmologie, avec le développement des interventions de la cataracte en ambulatoire. J'espère bloquer le dérapage de l'AP-HP en utilisant les moyens que l'on a et en mettant en œuvre mon plan stratégique. En parallèle, je me suis tournée vers les tutelles pour obtenir des aides supplémentaires. Mais il ne faut pas trop compter sur elles. »
Alain Lhostis regrette de son côté que le ministre de la Santé n'ait pas lancé à l'AP-HP un plan d'urgence « sur des bases assainies », comme il le lui avait demandé. Le président du CA de l'AP-HP, adjoint (PC) au maire de Paris, ne cache pas son « extrême inquiétude sur la situation budgétaire actuelle et à venir de l'AP-HP ». Les dépenses médicales progressent fortement (+ 70 millions d'euros de dépassement en 2002), les dotations destinées à couvrir les dépenses nouvelles obligatoires sont loin des sommes demandées par la direction (30 millions d'euros au lieu de 130 millions). Un tableau d'autant moins tolérable qu'en parallèle « l'offre de soins se dégrade », selon Alain Lhostis, qui a noté la fermeture de 3 200 lits et une baisse de l'activité de plus de 3 % depuis janvier 2003.

Mouvements de directeurs

Le président du CA de l'AP-HP s'inquiète aussi de la manière dont Rose-Marie Van Lerberghe entreprend la réforme du plus gros établissement hospitalier de France. Dix-sept directeurs seraient, selon ses dires, sur le point de changer d'affectation, et ce « sans aucune logique ».
Le président du Syndicat national des cadres hospitaliers (SNCH), Jean-Olivier Arnaud, a eu vent de ce projet par certains cadres de l'AP-HP alarmés : « On annonce des mouvements de directeurs, sans transparence, sans publication, dit-il . Certes, l'AP-HP a besoin de se réformer, peut-être encore plus que certains hôpitaux compte tenu de sa taille. Mais cette évolution ne doit pas se faire sans concertation et sans respecter la place des cadres hospitaliers et des cadres de direction. »
Alain Lhostis prévient : « La présidence du CA prendra les initiatives nécessaires » pour permettre à l'AP-HP de continuer à remplir ses missions. Son directeur de cabinet, Christian Do Huu, commente : « On ne se relève pas de 350 millions d'euros de déficit même en décidant de réorganiser fortement, ça ne suffira pas. Le conseil d'administration compte reprendre en main le plan stratégique de l'AP-HP, et veut apporter sa vision d'élu et de service rendu à la population, différente de la vision du gestionnaire, en posant les bonnes questions : faut-il faire des économies ? Faut-il ne plus acheter de PET-scan ni de molécules coûteuses ? Ou bien faut-il accepter que cela coûte cher ? »

Delphine CHARDON

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7367