La supériorité du recours au défibrillateur automatique externe (DAE) sur la seule réanimation cardio-pulmonaire ne fait aucun doute. En France le taux de survie à un arrêt cardiaque (AC) est de 5 %, soit 4 à 5 fois moins que dans les pays largement équipés en DAE et où la population est spécifiquement formée. Ainsi, dans certaines villes des USA, il est possible d’atteindre 40 % de survie à la sortie de l’hôpital. Il existe une inadéquation entre la répartition des AC et celle des DAE. Ainsi, leur répartition ne doit pas suivre une logique purement démographique. En 2010 les recommandations européennes du « Ressuscitation Council » ont supprimé la notion d'implantation dans les lieux où la probabilité d'un arrêt est d’au moins un tous les deux ans pour ne garder que des endroits spécifiques comme les aéroports, les casinos et les structures sportives. Résultat : une étude menée à Copenhague montre que sur 1200 arrêts cardiaques extrahospitaliers, 29 % étaient théoriquement proches d’un DAE, mais que seulement 2 % en ont bénéficié.
Pour pallier cette insuffisance, une étude a comparé l’incidence des arrêts cardiaques et la répartition de la population à Paris intra-muros. Elle ne retrouve pas de corrélation entre incidence des AC et densité de la population, mais une bonne relation avec l'intensité du flux de population, les AC étant plus nombreux dans les lieux les plus fréquentés. En comparant plus finement les 7 gares et les 7 lieux touristiques ayant une densité de passage similaire, le nombre d’AC est nettement supérieur dans les gares (138 vs 30), le risque relatif après ajustement étant multiplié par 4.61 (p<0.0001). Comme dans les aéroports, le stress physique et psychologique n'y est pas étranger. « Il faut accepter que la répartition des DAE soit hétérogène et corrélée à la fréquence des arrêts cardiaques dans un lieu donné plutôt que basé sur la densité et même le flux de population », explique Wulfran Bougouin (hôpital Bichat, centre d’expertise de la mort subite de l’adulte) .
Maillage du territoire
En Italie, le recours à un médecin correspondant du SAMU et équipé d’un DAE situé dans un rayon d’un kilomètre autour de la victime d’un AC permet d’atteindre un taux de 24 % de survie à un mois. Le maillage du territoire par un médecin ou un sauveteur référent serait aussi une option intéressante pour les trois quarts des arrêts cardiaques survenant à domicile. À Nancy, un système de sauveteurs volontaires de proximité (SVP) donne satisfaction : le plus proche est contacté dès que le SAMU a l'appel, il prend le DAE et va sur les lieux. Il a été suggéré dans les grands ensembles d’implanter un DAE que pourraient utiliser les gens formés aux premiers secours. La formation du grand public est le maître mot, quand on sait que la majorité des témoins n'osent pas utiliser le DAE : sur 820 cas de mort subite au cours d’une activité sportive, le témoin a refusé de s'en servir dans 1/3 des cas malgré les conseils téléphoniques des premiers secours. L'éducation permettrait aussi de rassurer : aucun accident grave n’a jamais été déploré dans la littérature chez un sauveteur utilisant le DAE. « Il faut rappeler que la priorité absolue reste au MCE, martèle Lionel Lamhaut (SAMU de Paris). Il ne faut pas arrêter de masser pour chercher le DAE ! Ils devraient être plus clairement signalés. Quant à certaines applications de géolocalisation, c'est du gadget. »
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