« Personnellement, je me soigne par l'homéopathie depuis des années comme beaucoup de Français - 40 % selon les statistiques - et j'en suis très satisfait. »
Ces mots coulent tout droit de la plume d'André Bergeron, 81 ans, qui vient d'adresser une lettre au président de la République pour protester contre la baisse programmée de 65 à 35 % du taux de remboursement des médicaments homéopathiques. Grande figure du syndicalisme, l'ancien secrétaire général de FO - qui finit son épître en présentant au président ses sentiments « respectueux et amicaux » - met donc son poids dans la balance des prohoméopathie, reprenant à son compte leur argumentaire. « S'il s'agit de faire réaliser des économies à la Sécurité sociale, c'est un non-sens », écrit-il, rappelant que les médicaments homéopathiques ne pèsent pas lourd dans les dépenses d'assurance-maladie ( « O,8 % des remboursements » des caisses) et pronostiquant un report des malades jusque-là soignés par l'homéopathie « vers des médicaments classiques, plus chers et mieux remboursés ». André Bergeron n'hésite pas à faire partager au chef de l'Etat son expérience personnelle : « Je connais le coût des ordonnances (homéopathiques) qui me sont prescrites, c'est sans commune mesure avec le montant de celles portant sur des médicaments allopathiques. »
Autre reproche : la mesure, en transférant une partie des remboursements de l'homéopathie vers les organismes complémentaires, est « socialement très injuste » - en vieil habitué du jeu politique, André Bergeron signale aussi qu'elle « sera mal vécue par un certain nombre d'électeurs se soignant par homéopathie ». Enfin, le projet du gouvernement est, pour l'ancien patron de FO, « éthiquement » contestable et prématuré. André Bergeron demande à l'Elysée de laisser aux homéopathes « le temps et aussi de leur donner des moyens financiers institutionnels pour avoir les éléments nécessaires leur permettant de juger de la place que doit occuper la médecine homéopathique dans le système de soins de demain ». Fort de sa démonstration, André Bergeron le dit sans ambages à Jacques Chirac : le gouvernement serait bien « avisé » de « suspendre » sa décision.
S'appuyant sur ce soutien inattendu, le Syndicat national des médecins homéopathes français (SNMHF) continue de réclamer « l'ouverture d'un vrai dialogue avec les pouvoirs publics ». Il précise dans un communiqué que « les différentes pétitions lancées en protestation » contre la future baisse du taux de remboursement « ont recueilli plusieurs centaines de milliers de signatures ».
Du côté des industriels du médicament, le laboratoire Pierre Fabre - dont la filiale Dolisos est le deuxième fabricant mondial dans le domaine de l'homéopathie - est lui aussi entré en résistance. « Fausse économie », « mesure socialement discriminatoire »... : le laboratoire reprend des arguments qui ressemblent comme des jumeaux à ceux d'André Bergeron. Il y ajoute l'idée que la mesure prévue de déremboursement partiel « soulève une vraie question médicale en ce sens qu'elle réduit de fait le choix du patient et sera à l'origine de sérieux problèmes sur l'activité des médecins prescripteurs » et pose le problème de « l'image de l'homéopathie pour laquelle, rappelle-t-il, la France est un acteur majeur au niveau mondial, les deux premiers laboratoires étant français ».
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