LE MOINS que l'on peut dire, c'est que les sifflets ne se sont pas calmés face à l'« Iphigénie en Tauride » mise en scène par Krzysztof Warlikowski dans une maison pour riches retraitées américaines, avec force lavabos sur scène, sa grande signature esthétique. Le Polonais, qui ne se contente pas de venir saluer à la première mais aussi aux représentations suivantes, semble se délecter de cet accueil négatif. On ne reviendra donc pas sur cette mise en scène, à la direction d'acteurs captivante cependant (« le Quotidien » du 19 juin 2006), mais on soulignera la force de sa distribution.
Mireille Delunsch, très à l'aise dans le style tragique de Gluck, donne une interprétation très convaincante du rôle d'Iphigénie, dont elle maîtrise parfaitement les difficultés et la grande étendue du registre. Nouveau venu aussi, le baryton français Stéphane Degout est un Oreste de belle stature, même si la voix laisse parfois des doutes sur sa texture. Yann Beuron a encore approfondi son approche du rôle de Pylade et son timbre, gagné en splendeur. On retrouve aussi avec plaisir Salomé Haller dans le rôle épisodique de Diane. Ivor Bolton a su trouver, à la tête de l'excellent Freiburger Barockorchester, l'équilibre que refusait à la création Marc Minkowski, pêchant par excès sonore.
La nouvelle star.
Curieuse idée, pour les débuts parisiens de la grande soprano lyrique du moment, la Russe Anna Netrebko, dont les apparitions déclenchent l'hystérie sur les scènes de Salzburg, New York, Vienne, Munich…, que de l'avoir invitée à chanter un rôle belcantiste, celui de Juliette dans « les Capulets et les Montaigus », de Bellini. S'il est une voix admirable pour la rectitude de son émission, la splendeur de son timbre et son imposant volume, c'est bien la sienne. Mais elle est incapable de toutes les subtilités d'émission, des variations de timbre que réclame le bel canto romantique. À ses côtés, la mezzo américaine Joyce DiDonato, rompu à ce répertoire, se tire mieux du rôle travesti de Roméo, même si elle n'y est jamais passionnante.
La partie masculine de la distribution ne laissera pas un souvenir impérissable, pas plus que la production fonctionnelle mais si peu romantique de Robert Carsen, ressortie des magasins douze ans après. Evelino Pidò a dirigé avec une belle énergie un orchestre de l'opéra de Paris lui aussi peu rompu à ce style mais avec de très belles interventions d'instruments solistes. La saison s'achèvera par les reprises de « Don Carlo », de Verdi, dans l'assez sobre production de Graham Vick, avec une distribution renouvelée, en bonne partie composée des chanteurs qui ont assuré l'an dernier le succès de « Simon Boccanegra », puis de la bien discutable mise en scène par André Engel de « Louise », où Mireille Delunsch, qui était un peu dépassée par le rôle-titre, laissera la place à l'admirable soprano finlandais Soile Isokoski.
Opéra de Paris, tél. 0892.89.90.90 et www.operadeparis.fr. Prochaines reprises : « Don Carlo », de Verdi, dir. Teodor Currentzis, mise en scène Graham Vick, jusqu'au 11 juillet ; « Louise », de G. Charpentier, dir. Patrick Davin, mise en scène André Engel du 20 juin au 12 juillet. Prix des places : 10 à 150 euros.
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