C'EST LE terme de mort inattendue du nourrisson (MIN) qui remplace aujourd'hui celui de mort subite du nourrisson (MSN), afin de prendre en compte « tous les décès survenant brutalement chez un nourrisson, alors que rien dans ses antécédents connus ne pouvait le laisser prévoir ». Ces décès représentent aujourd'hui 18 % des morts avant l'âge de 1 an, souligne le Pr Elisabeth Briand-Huchet. « Ces décès ont des causes peu claires et sont actuellement comptabilisés dans deux catégories“fourre-tout” de la CIM de l'OMS: les morts liées à des symptômes ou états morbides mal définis comprenant la MSN et les morts de cause inconnue et les traumatismes, dont les circonstances et l'intention ne sont pas toujours claires.» Au total, on dénombre chaque année environ 600 MIN, dont 320 classés comme MSN. Nombre de ces MIN restent inexpliquées faute d'explorations.
L'élaboration de nouvelles recommandations a été dictée par le manque actuel d'une stratégie de prise en charge standardisée. « Les MIN doivent être prises en charge pour plusieurs raisons: mener les investigations nécessaires pour établir la cause du décès, organiser la prise en charge et le suivi de la famille et des personnes présentes au moment du drame, identifier les décès accidentels qui pourraient être à l'origine de mesures de prévention, faire la part des éventuels cas de maltraitance relevant de la prise en charge judiciaire et améliorer la qualité des statistiques de mortalité.»
Ces recommandations s'adressent à tous les professionnels de santé amenés à intervenir en cas de MIN, dans l'immédiat ou à plus long terme, essentiellement les médecins généralistes, les pédiatres, les urgentistes, les légistes, les anatomopathologistes, les psychiatres et les psychologues, les professionnels de PMI, les travailleurs sociaux du secteur sanitaire et les équipes de centre de référence. Tous les cas de MIN doivent être explorés dans une structure hospitalière, et donc, logiquement, par les centres de référence régionaux des MSN qui existent déjà et qui devraient adapter leur organisation et modifier leur intitulé en « centre de référence pour la mort inattendue du nourrisson ».
Dans la synthèse des recommandations professionnelles présentées par E. Briand-Huchet, plusieurs mesures pratiques sont à connaître de tous les intervenants : l'alerte systématique du centre 15, l'établissement d'un contact entre le 15 et le centre de référence MIN, le transport de l'enfant au centre MIN avec l'accord des parents.
Une fiche d'intervention.
Le médecin appelé doit remplir une fiche d'intervention afin de recueillir tous les éléments observés sur place. Au centre de référence, plusieurs points clés sont inscrits dans les recommandations :
– accueil immédiat et attentionné des parents par un entretien médical et un accompagnement auprès de l'enfant ;
– mener les explorations médicales à visée diagnostique le plus rapidement possible après accord signé des parents, réaliser une autopsie médicale, après information et accord signé des parents selon la procédure définie par le protocole et si possible dans les 48 heures ;
– informer les parents des résultats des examens pratiqués ;
– proposer un soutien psychologique et/ou associatif aux parents.
Une confrontation multidisciplinaire au centre MIN doit permettre d'analyser les éléments du dossier et de faire une synthèse diagnostique. Dans ce contexte, l'établissement du certificat de décès doit être fait en deux étapes. Lors de la constatation du décès, un certificat est rempli par le médecin avec mention de la cause la plus probable et, sur la partie administrative, en cochant soit la case « prélèvements en vue de rechercher la cause du décès » si celui-ci ne semble pas suspect, soit, en cas de doute, la case « obstacle médico-légal ». A l'issue des explorations diagnostiques, un certificat médical complémentaire doit être rempli et transmis au CépiDC (centre d'épidémiologie sur les causes médicales de décès).
A long terme.
Il ne faut pas négliger la prise en charge ultérieure de la famille et des tiers présents lors du décès, qu'il s'agisse d'un soutien psychologique, d'un accompagnement ou d'informations complémentaires.
Enfin, les recommandations proposent la mise en place de comités de revue des cas de décès d'enfants, comités multidisciplinaires ayant des objectifs épidémiologiques, d'évaluation des pratiques et de prévention. Ces comités pourraient contribuer à l'élaboration d'actions prioritaires dans le domaine de la prévention, visant à réduire le nombre de décès de nourrissons.
D'après la communication du Pr Elisabeth Briand-Huchet, service de réanimation néonatale, centre de référence MSN, hôpital Antoine-Béclère, Clamart.
Des facteurs de risque de mort subite...
– Le mode de couchage : la position en décubitus ventral (DV) ou latéral et, encore plus, le retournement du côté sur le ventre sont clairement reconnus comme des facteurs de risque majeur ; le DV est particulièrement à risque chez le prématuré ou le nouveau-né de petit poids ;
– l'environnement du couchage : le risque de MSN augmente avec l'utilisation de couvertures ou de couettes, avec un risque d'étouffement, lorsque la température de la chambre est élevée, avec le risque d'hyperthermie maligne en cas d'infection ;
– le partage du lit ou cosleeping : le risque est augmenté si la mère fumait pendant la grossesse, si les parents fument, s'ils ont bu de l'alcool, pris des drogues ou sont très fatigués. Pour les mères qui ne fument pas, l'odds ratio est faible et n'est significatif que les huit premières semaines de vie ;
– le partage d'un canapé : le risque serait encore plus important ;
– le tabagisme : le risque est d'autant plus élevé que la mère a fumé pendant la grossesse, il baisse d'autant plus que l'arrêt du tabac intervient tôt au cours de la grossesse ; le risque augmente avec le nombre de fumeurs ;
...et des facteurs de protection
– le partage de chambre ou room-sharing ;
– l'identification précoce d'un épisode de maladie ;
– la vaccination.
Communication du Dr Michel Roussey
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