COMME les autres types d'allergie, l'allergie aux protéines du lait de vache (APLV) voit sa fréquence augmenter de façon significative. D'après les données épidémiologiques actuelles « qui doivent probablement être réactualisées », estime le Pr Dupont, 20 % des nourrissons ont un eczéma, qui est lié à une APLV dans 40 % des cas. Ce qui représente 8 % de la population infantile eczémateuse de moins de 1 an affectés par cette allergie. Il en est de même pour le reflux gastro-oesophagien (RGO), également très fréquent en pédiatrie et dont on sait aujourd'hui que près de 40 % sont en rapport avec une APLV. Cette notion récente constitue un des facteurs impliqué dans l'augmentation de la fréquence de l'APLV.
Les avancées dans la connaissance de l'APLV concernent aussi sa physiopathologie. Grâce à une recherche active, on commence à mieux connaître les épitopes et les allergènes. Pour illustrer ce propos, le Pr Dupont prend l'exemple de la bêtalactoglobuline, autrefois considérée comme l'allergène essentiel du lait de vache en raison de sa résistance à la chaleur et de son absence du lait de femme. Or il apparaît que les enfants avec APLV sont plus souvent sensibles à la caséine, présente dans le lait de la mère. L'analyse de la réactivité à la caséine montre que les enfants avec certains épitopes plus particuliers sont ceux dont les manifestations vont être les plus durables. En outre, les épitopes des protéines de lait de vache sont plutôt non conformationnels (uniquement liés à la séquence d'acides aminés) et, donc, moins altérés par la chaleur que les épitopes conformationnels que l'on retrouve dans l'oeuf. Ainsi, contrairement à ce dernier, la cuisson du lait n'améliore pas la tolérance.
L'apport du patch-test dans les APLV non IgE-dépendantes.
Par ailleurs, si le diagnostic de l'APLV reste essentiellement clinique, des progrès ont été réalisés dans l'exploration à la fois des formes non IgE-dépendantes et IgE-dépendantes. Les premières ont particulièrement bénéficié de la mise au point d'un patch-test qui, pour le Pr Dupont, « est manifestement la meilleure solution actuelle ». Cet outil fait l'objet d'un nombre croissant de travaux et son intérêt dans la détection de l'APLV a notamment été démontré dans une étude faite par à Saint-Vincent-de-Paul (1). Quant aux APLV IgE-dépendantes, leur diagnostic peut être affirmé sur la base de dosages des IgE actuellement dotés d'une bonne fiabilité, surtout pour la prédiction de la réaction allergique. « Alors qu'on se contentait d'une évaluation quantitative, les investigations biologiques fournissent désormais des données qualitatives », fait remarquer le Pr Dupont.
En ce qui concerne l'évolution de l'APLV, si la notion de guérison spontanée reste valable, elle doit être modulée. Certes, à partir de l'âge de 2 ans, les enfants deviennent tolérants au lait de vache et leur qualité de vie s'améliore alors considérablement. Mais il s'agit assez souvent d'une tolérance partielle, alors qu'on pensait auparavant qu'elle était totale (2) et des études ont retrouvé une fréquence plus élevée d'anomalies digestives chez ces enfants que chez les ceux qui n'ont jamais eu d'APLV.
Recommandations diététiques.
Enfin, dans le domaine de la prise en charge de l'APLV, les familles tirent un bénéfice important d'une meilleure reconnaissance de la maladie, explique le Pr Dupont. « Les recommandations diététiques commencent à être relativement bien connues et des produits de très bonne qualité sont disponibles » : les hydrolysats de protéines, les formules d'acides aminés en cas de mauvaise tolérance de ces derniers, et les laits hypoallergéniques dont l'utilisation chez les enfants ayant des antécédents familiaux d'allergie fait partie des recommandations du Programme national nutrition santé (Pnns).
Amphi MEDEC « L'allergie au lait et sa prévention », présidé par le Pr Christophe Dupont et parrainé par Menarini. Jeudi 17 mars, de 10 h à 13 h. 15 Pour s'inscrire : secretariat@lemedec.com, tél. 0.800.204.408.
(1) De Boissieu D., Waguet J.-C., Dupont C. The Atopy Patch Tests for Detection of Cow's Milk Allergy with Digestive Symptoms. « J Pediatr » 2003 ;142(2) : 203-205.
(2) Bougnères P., Chanson P., Dupont C., Zeller-Sigalla J. Que devient l'allergie aux protéines du lait de vache à 10 ans ? « Médecine thérapeutique/Pédiatrie » 2001 ; 4 (2).
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