De notre envoyée spéciale
à Barcelone
Dans ses formes modérées ou sévères, le psoriasis peut, lorsque les symptômes ne sont pas amendés par des traitements topiques, nécessiter une prise en charge systémique. Jusqu'à présent, le médecin a le choix entre des molécules, comme le méthotrexate ou la ciclosporine (ou même les corticoïdes), dont l'administration au long cours se heurte à une mauvaise tolérance, les rétinoïdes dont la tératogénicité limite l'emploi, et de séances de PUVAthérapie, traitement contraignant à long terme. Le besoin de traitements efficaces et bien tolérés pouvant être prescrits sur de longues périodes apparaît clairement.
La progression dans la compréhension de la pathogénie du psoriasis a contribué au développement de nouvelles approches thérapeutiques. En effet, les lymphocytes T jouent un rôle clé dans la genèse du psoriasis en plaques. L'élément important semble être la fixation de l'antigène LFA-1 (Leucocyte Function Associated Antigen-1) sur les lymphocytes T ; LFA-1 qui se lie à une molécule d'adhésion intercellulaire l'ICAM-1 ; ce qui facilite l'activation des cellules T dans les ganglions, puis leur liaison aux cellules endothéliales, et donc leur passage de la circulation dans le derme et l'épiderme, et, en définitive, la réactivation des cellules T dans la peau. Cet enchaînement pathogénique a conduit à imaginer des traitements, ciblant le LFA-1. C'est l'option qu'ont choisi les Laboratoires Serono pour le développement de l'efalizumab, un anticorps monoclonal recombinant IgG1, à l'étude dans le traitement du psoriasis en plaques. L'efalizumab agit sur la sous-unité alpha (CD11a) du LFA-1, en empêchant la liaison du LFA-1 et de l'ICAM-1. Il bloque ainsi, dès son origine, toute la cascade des événements aboutissant aux signes cliniques du psoriasis en plaques. En effet, on observe, au cours d'un traitement par efalizumab, une diminution du nombre de cellules T au niveau des plaques de psoriasis, une réduction de l'hyperplasie épidermique, une diminution de l'expression d'ICAM-1 et de la kératine 16.
Une étude de Richard G. B. Langley (Canada) présentée au dernier congrès à l'EADV*, évaluait l'efficacité et la tolérance de l'efalizumab chez des patients atteints de psoriasis modéré ou sévère. Il s'agit d'un essai en double aveugle, randomisé contre placebo, conduit chez 556 patients pendant douze semaines, suivi d'une période en ouvert avec efalizumab seul pendant douze semaines supplémentaires. Après les douze premières semaines de traitement, on a observé une élévation du taux de réponse au PASI (Psoriasis Area and Severity Index) : 26,6 % versus 4,3 % atteignaient un PASI-75 (75 % d'amélioration du score) (p < 0,001) ; et 58,5 % versus 13,9 % atteignaient un PASI-50 (50 % d'amélioration) (p < 0,001).
Après les douze semaines supplémentaires, le taux de patients atteignant le PASI-75 étaient de 43,8 % et celui atteignant le PASI-50 de 66,6 %. Les auteurs ont également montré que le PASI s'améliorait rapidement, la différence devenant significative ( versus placebo) dès le début de la 3e semaine.
Le traitement était bien toléré. Durant les 24 semaines de l'étude contrôlée, les événements survenus étaient peu différents dans le groupe efalizumab et le groupe placebo : céphalées 33 % versus 21%, infections non spécifiques (par exemple rhume) 13 % versus 12 %, frissons 12 % versus 5 %, nausées 11 % versus 7 %, myalgies 10 % versus 4 % et douleurs généralisées 10 % versus 5 %. Les effets secondaires avaient tendance à s'atténuer dans la 2e période.
Un autre travail canadien (M. Gilbert et C. W. Lynde) a également été présenté au congrès de l'EADV. Il se proposait d'évaluer l'intérêt de l'efalizumab à long terme. Après une période de douze semaines de traitement à 2 mg/kg/semaine, 290 des 339 patients inclus au départ et qui avaient répondu au traitement, ont été enrôlés dans la deuxième phase de l'essai, qui durait trente trois mois à la dose de 1mg/kg/semaine. La majorité d'entre eux ont encore amélioré leur score PASI par rapport au mieux observé à la semaine 12. Les auteurs ont montré la progression de l'amélioration chez la majorité des patients et le maintien du bénéfice sur toute la durée de l'étude. Par ailleurs, ils n'ont pas enregistré d'augmentation du risque d'effets secondaires sérieux (ni infectieux ni malin) et ont estimé que le profil de sécurité de ce traitement à long terme était bon.
Un bénéfice très attendu
Ils concluent : « Lefficacité et la sécurité d'emploi à long terme de l'efalizumab offre aux praticiens une nouvelle possibilité de traiter en monothérapie les patients atteints de psoriasis modérés ou sévères, non soulagés par les traitements topiques. L'administration par voie sous cutanée, une seule fois par semaine, sans nécessité de surveillance étroite liée à une éventuelle toxicité, permet une facilité d'emploi très appréciée des patients. »
L'efalizumab (Raptiva) développé par les Laboratoires Serono est en phase de développement clinique. Non encore commercialisé, il vient d'obtenir un avis favorable de la FDA aux Etats-Unis. En attente d'une AMM en Europe, il pourrait être commercialisé d'ici à un an environ.
<*L>*Conférence de presse organisée par les Laboratoires Serono dans le cadre du Congrès de l'EADV à Barcelone. D'après la communication du P Craig Leonardi (université de Saint Louis, Missouri, Etats-Unis).
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