LE TRAITEMENT du cancer bronchique non à petites cellules a considérablement évolué au cours des dernières années et, s'agissant des tumeurs de stades I, II et IV, la prise en charge est aujourd'hui bien codifiée. Dans les stades I, l'approche généralement adoptée est une chirurgie seule, parfois complétée par une chimiothérapie ; les stades II relèvent, eux aussi, d'un traitement chirurgical, précédé ou suivi d'une chimiothérapie ; quant aux stades IV, leur prise en charge repose sur une chimiothérapie exclusive.
Comment faut-il traiter les stades III ?
En revanche, pour les cancers bronchiques de stade III, deux modalités de traitement sont possibles, consistant respectivement à associer une chimiothérapie à une chirurgie ou à une radiothérapie, mais les avis demeurent très partagés quant à la stratégie la plus appropriée. Les patients affectés de cancers de stade III N2 sont ceux qui posent le plus de problèmes du fait de l'extrême hétérogénéité de ces tumeurs N2, ce qui implique de leur consacrer davantage de temps en réunions de concertation pluridisciplinaires (RCP).
Il convient de distinguer les stades III apparaissant apriori résécables de ceux qui ne le sont pas. Cela impose de réaliser une cartographie histologique complète des lésions et, donc, de l'extension ganglionnaire. Jusqu'à une période récente, cette évaluation reposait sur le scanner et la tomographie à émission de positons (TEP), une médiastinoscopie étant ensuite réalisée pour confirmer les lésions. Malheureusement, aussi bien le scanner que la TEP peuvent fournir des résultats faussement positifs ou négatifs et la médiastinoscopie ne permet pas d'accéder à tous les ganglions. Ces dernières années, d'importants progrès technologiques ont toutefois été accomplis, de sorte que les médecins disposent désormais de l'écho-endoscopie digestive et, depuis quelques mois, de l'écho-endoscopie bronchique qui, toutes deux, autorisent une meilleure appréciation de l'envahissement ganglionnaire. Cela est particulièrement intéressant dans les stades III N2, car, lorsque le praticien opte pour l'administration préopératoire d'une chimiothérapie éventuellement associée à une radiothérapie, il lui est possible de pratiquer une telle écho-endoscopie avant et après le traitement d'induction afin de juger de son effet au niveau ganglionnaire.
La chirurgie a-t-elle encore une place ?
Alors que, face à une tumeur de stade III non résécable, le traitement repose classiquement sur l'association d'une chimiothérapie et d'une radiothérapie, dans le cas d'une tumeur résécable, la question qui se pose est celle de savoir s'il faut opérer le patient. Deux grandes études randomisées – dont l'une a été publiée (1) et l'autre seulement rapportée (2) – ont conclu que la chirurgie ne présentait pas d'intérêt dans un tel contexte. Néanmoins, une analyse attentive des données de ces études montre que la résection chirurgicale a un impact bénéfique dans deux sous-populations de patients : ceux pouvant bénéficier d'une lobectomie (par opposition à une pneumectomie) et ceux qui ont répondu à un traitement d'induction.
Dans ces conditions, si l'on considère que la chirurgie a encore une place dans le traitement des stades III N2, il y a lieu de ne l'envisager que précédée d'une chimiothérapie, chez les patients dont la tumeur est résécable et a répondu à la chimiothérapie (avec, notamment, une forte réponse médiastinale), lorsqu'il est possible de limiter l'intervention à une lobectomie.
Cette approche apparaît beaucoup plus pertinente que celle consistant à opérer tous les patients atteints de cancers bronchiques de stade III, quelles qu'en soient les caractéristiques, et à faire suivre l'intervention d'une chimiothérapie.
En effet, nombre des patients ainsi opérés ne tireront aucun bénéfice de la chirurgie.
Qu'en est-il de la radiothérapie et de la chimiothérapie ?
Pour tous les malades jugés non résécables d'emblée ou récusés après un traitement d'induction, la radiochimiothérapie concomitante est le traitement standard, comme dans les stades III B.
Chez les patients opérés, si la nature N2 du cancer constitue une découverte peropératoire, la chimiothérapie est, bien sûr, instaurée après l'intervention puisque plusieurs essais de phase III ont pleinement démontré son intérêt.
Quant à la radiothérapie, une métaanalyse publiée en 1995 a montré que, dans les stades I et II, celle-ci a un effet délétère et que, dans les stades III N2, son apport est incertain. Il était donc hautement souhaitable de mener un essai thérapeutique pour lever cette incertitude. C'est ce que se propose de faire l'essai IFCT 0503 LungART mené en France par l'Intergroupe francophone de chirurgie thoracique (3) ; ce vaste essai de phase III compare la réalisation d'une radiothérapie médiastinale conformationnelle postopératoire à l'abstention de radiothérapie après chirurgie complète, éventuellement suivie d'une chimiothérapie périopératoire, chez des patients présentant un cancer bronchique non à petites cellules avec envahissement médiastinal N2.
Force est de constater que, en dépit de l'amélioration intervenue, le pronostic des cancers bronchiques de stade III demeure très sombre puisque, pour les tumeurs non résécables traitées par radiothérapie, la survie est de l'ordre de 40 à 50 % à deux ans et voisine de 10 % à cinq ans ; pour les stades N2 résécables, la survie est d'environ 20 % à cinq ans.
D'après un entretien avec le Dr Bernard Milleron, service de pneumologie-phtisiologie, hôpital Tenon, Paris.
(1) Van Meerbeeck JP, Kramer GW, Van Schil PE et coll. Randomized controlled trial of resection versus radiotherapy after induction chemotherapy in stage IIIA-N2 non-small-cell lung cancer. J Natl Cancer Inst 2007;99:442-50.
(2) Albain K, Swann R, Rush V et coll. Phase III study of concurrent chemotherapy plus radiotherapy (CT/RT) vs CT/RT followed by surgical resection for stage IIIA(pN2) non-small cell lung cancer (NSCLC): outcomes update of North American Intergroup 0139 (RTOG 93-09). Proc Am Soc Clin Oncol 2005; 23:624S.
(3) Pour de plus amples détails, veuillez vous reporter au site : www.ifct.fr.
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