LES CAPACITES de transdifférenciation des cellules souches animales adultes en neurones et cellules gliales sont connues depuis quelques années. Chez l'homme, le devenir de ces cellules transplantées par le biais d'une greffe de moelle restait encore mal élucidé.
Une équipe de biologistes a pu préciser cette donnée en pratiquant un examen autopsique du cerveau chez trois femmes qui avaient subi une greffe de moelle provenant d'un donneur de sexe masculin. La présence de cellules contenant un chromosome Y, découvert par recherche immunohistochimique chez ces femmes, a traduit, en effet, l'existence de cellules d'origine masculine qui se sont développées par transdifférenciation à partir des cellules souches greffées. Pour limiter encore de risque d'erreurs, les auteurs ont choisi de ne retenir que des femmes qui n'avaient pas donné naissance à des enfants de sexe masculin en raison de la possible existence d'un microchimérisme.
Des cellules contenant un chromosome Y.
Pour les trois patientes, il a été mis en évidence des cellules contenant un chromosome Y au niveau de l'hippocampe. Il s'agissait de cellules de la microglie et d'astrocytes chez les deux premières (de 1 à 2 % des cellules gliales présentes) et, chez la troisième - celle qui avait déjà subi une transplantation -, il existait en outre des neurones dotés de chromosomes Y (environ 1 % des neurones totaux). L'analyse histologique du système nerveux de cette patiente n'a pas permis de retrouver des caryotypes anormaux (type XXY ou XXXY), signe de l'absence de phénomènes de fusion des cellules souches avec les cellules de la receveuse.
Pour les auteurs, « des lignées nerveuses autonomes peuvent se développer après transdifférenciation et persister pendant une durée relativement longue (six années au moins) ».
Le mécanisme de la transdifférenciation des cellules souches en cellules du système nerveux central n'est pas encore élucidé. Les cellules circulantes pourraient migrer au sein du tissu nerveux en raison de l'existence de facteurs chemo-attractifs, tels que le SDF-1 (stromal-cell-derivated factor-1), sécrétés par les cellules exprimant le récepteur CXCR4 présentes au cours du développement au sein de différentes zones cérébrales et tout au long de la vie au niveau de l'hippocampe.
« Lancet », vol. 363, pp. 1432-1437, 1er mai 2004.
Les trois patientes
Le premier cas décrit dans le « Lancet » est celui d'une femme de 45 ans atteinte d'une leucémie myéloïde aiguë qui a subi, après une chimio- et une radiothérapie, une greffe de moelle prélevée sur son propre frère. Elle est décédée, 12 jours après la greffe, des suites d'un rejet aigu.
La deuxième patiente souffrait elle aussi d'une leucémie myéloïde aiguë. Elle n'a survécu que 63 jours à la greffe de moelle, donnée par son frère, en raison de l'apparition d'une infection mycosique et d'une réaction de rejet qui se sont compliquées d'une embolie pulmonaire bilatérale massive.
Le troisième cas est celui d'une femme de 29 ans atteinte de leucémie myéloïde chronique et qui a subi une première greffe de la moelle de son frère en 1993. En raison d'une rechute de la maladie, une seconde greffe a été tentée en 2000. La patiente n'a pas survécu à un syndrome de détresse respiratoire aigu survenu 13 jours après la greffe.
Une autre étude présentée aux Etats-Unis
Le Dr Alexander Storch (Ulm, Allemagne) a présenté à l'Académie américaine de neurologie des résultats histologiques similaires sur l'homme. Il a conclut sa présentation en avançant qu' « à l'avenir on pourrait imaginer restaurer les fonctions neuronales des sujets atteints de maladie de Parkinson, d'Alzheimer, d'accident vasculaires cérébraux ou de maladies neurodégénératives ».
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