Répétition d’un triplet
L’anomalie génique se situe sur le bras court du chromosome 4 (4p16.3) ; le gène est nommé IT15 et se caractérise par la répétition d’un triplet cytosine-adénine-guanine (CAG). Normalement, ce triplet se répète 11 à 34 fois. Dans la maladie de Huntington, il est observé une répétition excessive anormale de ce trinucléotide (qui peut dépasser 100 répétitions). Le diagnostic génétique, quelle que soit la nature du prélèvement (sang, biopsie chorionique pour un diagnostic prénatal, blastomère pour un diagnostic pré-implantatoire), consiste à mettre en évidence cette amplification anormale de trinucléotides (le test a une sensibilité de 98,8 % et une spécificité de 100 %). Il existe une corrélation entre la longueur de la répétition du triplet et l’âge de début de la maladie (plus grandes répétitions dans les formes juvéniles). La protéine produite par le gène IT15 est dénommée huntingtine. Sa fonction et le mécanisme par lequel la répétition excessive du trinucléotide conduit à la mort cellulaire des neurones spécifiques restent à découvrir. L’augmentation du nombre de répétitions de triplets à chaque génération explique le phénomène d’antéposition (apparition plus précoce des symptômes). L’évolutivité clinique serait corrélée au degré de l’extension du triplet CAG.
Dans une forme sporadique, trois explications sont évoquées : mutation dynamique (le nombre de triplets a alors franchi un seuil critique), fausse paternité, décès précoce de l’un des parents. Des mutations ont été décrites dans d’autres gènes dans des familles présentant des caractéristiques cliniques de maladie de Huntington ( «Huntington’s Disease-Like» – HDL), mais sans amplification d’un triplet CAG dans le gène IT15 (HDL1, gène de la protéine prion ; HDL2, gène de la junctophyline3 ; atrophie dentato-rubro-pallido-luysienne, gène de l’atrophine ; ataxie cérébelleuse autosomique dominante SCA17, gène de la TATA-binding protéine).
Information et consentement
Une information complète et un consentement préalable sont nécessaires pour la réalisation d’un test génétique, que ce soit chez un sujet symptomatique ou non symptomatique. Avant d’effectuer un diagnostic prédictif, il faut au préalable que la maladie ait été étiquetée par une étude génétique réalisée chez un apparenté symptoma- tique. Ce test permettra de distinguer la maladie de Huntington d’autres affections neurologiques d’expression clinique proche.
Les conditions de réalisation de ces tests prédictifs ont fait l’objet de recommandations afin de limiter l’impact parfois néfaste des résultats sur le plan psychologique et social.
Diagnostic prédictif
Le diagnostic prédictif s’inscrit dans le cadre du décret 20006570 du 23 juin 2000 qui fixe les conditions de prescription et de réalisation des examens des caractéristiques génétiques d’une personne. Cinq grands principes sont définis afin d’encadrer la bonne pratique de ces tests : le bénéfice pour le sujet demandeur et les membres apparentés ; l’exigence d’autonomie, le respect du droit de l’individu à prendre une décision informée sur la pratique d’un examen pour révéler la présence d’un gène muté ; un choix éclairé ; la confidentialité vis-à-vis d’autres membres de la famille ou de tiers ; la justice et l’égalité dans la possibilité d’accès à ces tests dans le cadre du système de protection sociale.
Différentes règles découlent de ces principes. Les tests prédictifs s’adressent à des sujets à risque, volontaires, majeurs et informés. La demande de tests doit être effectuée librement, sans aucune pression médicale, sans contrainte familiale, sans obligation socioprofessionnelle. L’information reçue, orale et écrite, doit être répétée pour vérifier si elle est intégrée. Cette analyse doit être effectuée par un laboratoire garantissant le meilleur niveau technique lié à un centre universitaire réunissant une équipe pluridisciplinaire (généticien, neurologue, psychologue, infirmière et assistante sociale). Le généticien communique personnellement et oralement le résultat du test à la personne à risque qui en a fait la demande ; ce résultat n’est donc donné ni par écrit ni transmis à une tierce personne.
Le test prédictif se déroule en trois phases successives. L’étape de prétest est d’une durée de quelques mois et au minimum d’un mois chez des sujets informés avec plusieurs entretiens ; l’objet de cette étape est d’éclairer la demande du sujet volontaire et d’aboutir ou non à la réalisation du test. Le test nécessite un prélèvement sanguin pour le recueil d’ADN. Le résultat est donné oralement au demandeur dans un délai fixé au préalable. La phase de post-test reste essentielle, avec un contact dès la première semaine et un suivi dont les modalités ont été décidées avec le demandeur avant la pratique du test, quel que soit le résultat.
Diagnostic prénatal
Un diagnostic prénatal peut être demandé par biopsie chorionique au cours d’une grossesse par un couple qui veut éviter de mettre au monde un enfant porteur de l’anomalie génique (si l’un des deux parents appartient à une famille atteinte) ou qui a l’intention d’effectuer une interruption de grossesse si le foetus est porteur du gène. L’un des deux parents peut être porteur (connu ou non) de la mutation. Il peut souhaiter connaître ou non son statut génétique. Ce diagnostic prénatal peut être réalisé par certains laboratoires par PCR sur des cellules foetales contenues dans le sang de la mère, évitant ainsi une biopsie.
Il est possible également d’avoir recours au diagnostic préimplantatoire. Il nécessite une fécondation invitro, l’analyse se faisant sur une cellule de blastomère. A l’issue de celle-ci, seuls les embryons sains seront transplantés.
Traitements
La prescription de neuroleptiques peut être proposée en cas de mouvements choréiques invalidants, en tenant compte de leurs effets secondaires potentiels sur la dysarthrie et la dystonie. La survenue d’états psychotiques ou de troubles dépressifs sévères justifie la prescription de psychotropes. Une prise en charge sociale reste souvent indispensable, de même que le soutien associatif et les soins de kinésithérapie. Plusieurs essais thérapeutiques menés afin d’évaluer l’effet neuroprotecteur de différentes molécules se sont révélés pour le moment négatifs.
La tétrabénazine (Xenazine), qui réduit le stockage vésiculaire présynaptique des monoamines (dopamine, sérotonine, noradrénaline), permet de limiter les mouvements involontaires dans la maladie de Huntington. Cette molécule a obtenu récemment une autorisation de mise sur le marché dans cette indication. Ce traitement peut être responsable d’un syndrome dépressif avec anxiété et d’un syndrome parkinsonien avec akathisie ; il est contre-indiqué en cas d’allongement de l’intervalle QT (risque de troubles du rythme ventriculaire). Sa posologie, à atteindre progressivement, est de 25 à 200 mg par jour. Les inhibiteurs de l’acétylcholinestérase n’ont pas d’efficacité reconnue sur les fonctions cognitives et motrices des patients Huntington.
Les perspectives thérapeutiques s’orientent vers la greffe de neurones foetaux, mais aussi vers la thérapie génique qui constitue une thérapie de protection des neurones : des cellules peuvent être modifiées par un vecteur (thérapie génique indirecte) dans lequel on a introduit le gène codant pour certains facteurs, comme le Cntf (Ciliarin Neurotrophic Factor), et que l’on administre chez l’hôte ; les cellules de l’hôte intègrent alors le gène et se mettent à produire le Cntf. La thérapie cellulaire pourrait être associée à une stratégie de neuroprotection via l’administration de facteurs neurotrophiques.
Le suivi pendant six ans de cinq patients ayant participé à un essai de transplantation de neurones foetaux au niveau du striatum au CHU de Créteil a montré un bénéfice prolongé tant sur le plan clinique qu’en termes de métabolisme cérébral chez trois d’entre eux, la greffe ne s’étant pas développée chez les deux autres. Après une amélioration progressive au cours des deux premières années, l’état des patients s’est ensuite stabilisé, avec néanmoins une forte variabilité, puisqu’une dégradation de l’état moteur est réapparue après quatre ans chez tous les patients et une dégradation de l’état cognitif chez l’un d’entre eux.
Les effets de la stimulation électrique chronique du pallidum externe chez l’homme sont actuellement en cours d’évaluation.
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