C’EST EN 1964, dans une école religieuse du Bronx, que John Patrick Shanley situe l’action de cette pièce créée aux Etats-Unis la saison dernière. C’est d’un épisode de sa propre adolescence que s’est inspiré l’écrivain, scénariste, réalisateur aussi bien que dramaturge, et c’est peut-être cette profonde intimité avec le propos qui donne à son ton ce caractère très particulier.
On pourrait circonscrire le sentiment étrange qu’il inspire en disant qu’il tient à distance des faits qui relèvent de l’irréductible, du consubstantiel. Des faits qui l’ont marqué pour jamais et qu’il transfigure sans rien ôter pourtant à ce qui tient au temps.
Roman Polanski opte pour une rigueur qui ne dessèche en rien le style de Shanley et permet aux interprètes de s’engager de toute leur sensibilité. Ces comédiens, quatre virtuoses, apportent au texte ce supplément qui n’est en rien excès d’affect, mais donne une émotivité et une puissance plus grandes aux paroles échangées et aux silences qui creusent la représentation. La traduction de Dominique Hollier semble aller à l’essentiel, le style strict du dramaturge.
Questions sans réponses.
Dans une école religieuse, en 1964. La soeur qui dirige l’institution, Soeur Aloysius (Dominique Labourier, composant une femme rigide, autoritaire, qui laissera pourtant affleurer les signes de lézardes intérieures), soupçonne le prêtre qui dispense les cours d’instruction religieuse et également de sport d’être trop proche d’un des jeunes élèves, noir. L’homme de Dieu semble pourtant loyal, pur, noble (Thierry Frémont, excellent, sensible, nuancé). Soeur Aloysius convoque la mère du garçon (Félicité Wouassi impose un personnage très touchant et digne) et prend à témoin une jeune religieuse (Noémie Dujardin). C’est tout. On ne saura rien de définitif. C’est ce qui passionne dans ce spectacle dense, au rythme excellent et qui nous laisse sur des questions, des doutes qui dépassent bien ceux de l’anecdote tragique qui est au centre de la pièce.
Roman Polanski se montre un directeur d’acteurs ferme et sans raideur qui laisse aux interprètes un champ large. C’est intéressant intellectuellement, moralement, socialement, mais c’est également intéressant du point de vue du jeu. > ARMELLE HÉLIOT
Théâtre ébertot à 21h 00 du mardi au samedi, en matinée à 18 h 30 le samedi, à 15 h 30 le dimanche. Durée : 1 h 40 sans entracte (01.43.87.23.23). Texte paru à L’Avant-Scène Théâtre n° 1201 (12 euros).
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