E NVIRON 10 % des personnes sans-abri sont considérées comme souffrant de troubles psychotiques, selon une étude commune du SAMU social de Paris et des laboratoires Lilly France menée en collaboration avec des experts universitaires. L'auteur de l'enquête, le Dr Priscille Poitrinal, recommande de manier ces chiffres avec précaution, ce travail ayant été mené auprès d'une population très ciblée, les usagers du SAMU social de Paris.
Les personnes interrogées ont en moyenne 46,5 ans, sont des hommes en majorité (91 %) et vivent seules (82 %). Le temps de leur errance est en moyenne de 5,5 ans. « Ce qui est très important, quantitativement », note le Dr Poitrinal.
La dépendance ou l'abus alcoolique concerne 54 % des personnes. 9 % de cette population a recours à d'autres substances que l'alcool. Quant au risque suicidaire, il est notable chez 37 % des personnes interrogées. Un épisode dépressif majeur est diagnostiqué chez 27 % de la population et une anxiété généralisée chez 27 % également. Enfin, 9 % des personnes présentent un syndrome psychotique vie entière, c'est-à-dire si l'on considère l'intégralité de leur existence, avant et pendant l'enquête. Ces 9 % représentent un groupe de 63 personnes, dont 30 sont considérées comme schizophrènes, après entretien avec un psychiatre.
La première étude française
Ainsi, les premières analyses permettent d'estimer entre 2,5 et 4 % la prévalence de la schizophrénie dans la population étudiée.
Comparée à la population des sans-abri, la population des schizophrènes est plus jeune (42 ans en moyenne contre 46,5 ans), plus dépendante à une substance autre que l'alcool (28 % contre 9 %), plus exposée au suicide (59 % contre 37 %), plus sujette à l'anxiété généralisée (45 % contre 27 %).
Cette étude est la première réalisée en France sur les troubles mentaux de la population de sans-abri. Les Etats-Unis ont montré leur avance en la matière : plusieurs études révèlent une surmorbidité psychiatrique chez les personnes sans-abri. Aux Etats-Unis, la prévalence de la schizophrénie, et des troubles délirants notamment, est dix fois plus élevée chez ces personnes que dans la population générale. « C'est pourquoi nous avons eu l'idée de faire une étude en France, explique le Dr Poitrinal. On ne s'attendait pas à avoir la même prévalence qu'aux Etats-Unis, mais l'on pensait bien que le taux de prévalence de la schizophrénie chez les sans-abri (4 % environ) serait supérieur à celui de la population générale (1 %). »« Ce n'est pas le fait d'être dehors qui vous rend schizophrène, précise le Dr Poitrinal. En revanche, une partie des schizophrènes se retrouvent dehors parce qu'ils n'ont pas bénéficié d'une prise en charge, familiale par exemple, au moment où le mal se déclare, chez l'adulte jeune en général. »
(1 L'étude a été menée entre novembre 1999 et janvier 2001. 689 des 780 questionnaires (le Mini International Neuropsychiatric Interview ou MINI), recueillis dans 8 structures du SAMU social de Paris, ont pu être analysés.
Bertrand Delanoë au SAMU social de Paris
C'est pour « témoigner de l'implication de la collectivité parisienne dans la lutte contre l'exclusion » que le maire de Paris, Bertrand Delanoë, a rendu visite au SAMU social de Paris. Dans un communiqué, la Mairie de Paris fait part de son souhait de « participer très activement à l'amélioration des réponses à l'urgence sociale ». « Les besoins restent forts et évoluent, lit-on dans le communiqué. La Ville de Paris a la volonté de s'impliquer, dès 2001, dans une action partenariale forte pour humaniser les lieux d'accueil, pour les adapter à l'accueil des femmes et d'enfants, pour trouver des issues à l'urgence à travers des solutions de logement plus durables et une amélioration des dispositifs d'insertion. » Le département de Paris participe au fonctionnement du SAMU social à hauteur de 10,7 millions de francs (budget 2000), auxquels s'ajoutent 4 millions de francs de mise à disposition par la Ville de personnels et de locaux.
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