Les deux cas de méningite à méningocoque de type C se sont déclarés en dehors du lycée Ambroise-Brugières. Le premier a touché un élève congolais de 24 ans inscrit en BTS d'assurance. Pris de malaise le 17 novembre, il était hospitalisé dans la nuit au CHU de Clermont-Ferrand et décédait quelques heures plus tard.
« Dès le lendemain, nous réunissions ses camarades avec un médecin-conseil du rectorat, le médecin du lycée et un psychiatre, raconte le proviseur, Daniel Lalloz. Tous les élèves de la classe ont bénéficié immédiatement d'une vaccination (A-C de l'Institut Pasteur). Ils ont organisé une collecte pour payer le rapatriement du corps en Afrique et cela a sûrement aidé au travail de deuil. »
Le deuxième cas est survenu le 19 décembre chez un élève de terminale S qui, lui, en a réchappé et a depuis repris normalement sa scolarité. Là aussi, ses camarades ont fait l'objet d'une vaccination.
Et une information médicale leur a été dispensée.
Le lycée Antoine-Brugières est le seul établissement du département a avoir enregistré deux cas. C'est la raison pour laquelle le Pr Lucien Abenhaim l'avait choisi pour une visite officielle mercredi dernier, à l'occasion du lancement de la campagne ciblée de vaccination. Devant les caméras de toutes les chaînes de télévision et sous le crépitement des flashes, le directeur général de la Santé est venu saluer les deux équipes du Service de santé des armées qui, à raison de 30 lycéens par heure et par équipe, soit environ 200 par jour au total, doivent vacciner tout l'effectif d'ici à ce soir.
Deux minutes par lycéen
La cadence est « rentable », comme on dit au Service de santé des armées, lequel a dépêché un total de cinq équipes dans le Puy-de-Dôme, dans le cadre de ses missions d'aide à la défense civile. En moins de deux minutes, le médecin fait subir l'interrogatoire (allergie au vaccin DT-polio, problèmes de coagulation, traitements médicamenteux en cours, symptômes fébriles éventuels) et effectue l'injection intramusculaire dans l'épaule. Chaque élève mineur, s'agissant d'une vaccination conseillée mais non obligatoire, doit être muni de l'autorisation écrite de ses parents. Avant de quitter le local médical, les lycéens doivent encore passer une demi-heure sur place, pour s'assurer qu'aucun choc anaphylactique ne survient. L'infirmier scolaire leur signale les quelques effets secondaires possibles (douleur au point d'injection, légère fièvre) et les met surtout en garde contre la consommation d'alcool et la pratique de sports qui mobilisent les membres supérieurs.
« On était beaucoup plus stressé ce matin par le bac blanc de physique que par le risque d'attraper une méningite », lance à la cantonade une lycéenne de terminale scientifique, approuvée par tous ses camarades. « C'est d'ailleurs dommage de voir qu'on est dans un système où le risque d'échec à l'examen fait plus peur que le risque de mort », ajoute un autre. Un troisième confirme la décontraction sanitaire générale des jeunes troupes : « D'accord, on est rassuré, en étant vacciné. Mais quand même, le principal avantage concret, c'est qu'on va pouvoir rentrer plus tôt cet après-midi, pour pouvoir préparer le bac blanc de géo de demain matin », confie-t-il.
« C'est vrai, remarque le proviseur, les élèves ont un sang-froid que n'ont pas toujours les adultes. Ils sont à l'âge où on est immortel. Les associations de parents ne réagissent pas du tout avec la même sérénité. Certaines n'ont pas hésité à venir exiger la mise en quarantaine de l'établissement et la désinfection des locaux ! Jusqu'aux professeurs qui, pour certains, ne comprenaient pas pourquoi on ne les vaccinait pas également. Parfois, on est passé à côté de l'abandon de poste ! »
Une dizaine de malaises vagaux
Tous les élèves n'ont pas le même détachement que ceux d'Ambroise-Brugières. Un médecin militaire, le Dr Nicolas Biance, de la base aérienne 942 de Lyon, raconte que jeudi matin, il a enregistré une dizaine de malaises vagaux, coup sur coup, au lycée professionnel Anna-Rodier. « Un phénomène de groupe, des élèves qui se sont mis à décalquer les mêmes symptômes, céphalées, vertiges, dysesthésies. Sur le coup, nous nous sommes inquiétés au sujet du lot de vaccin utilisé et, vérification faite, comme il s'agissait du même lot que celui administré sans aucun problème par les autres équipes, nous avons conclu à un syndrome purement subjectif, avec un phénomène d'autoentraînement. » De fait, en quelques heures, les dix lycéens concernés étaient de nouveau sur pied.
La presse locale a publié dès mercredi dernier le calendrier détaillé des vaccinations dans la totalité des 279 établissements concernés par la campagne. Ainsi, à l'école primaire Jules-Vallès, on sait qu'il faudra attendre le 5 février. Tout à côté, l'école maternelle du même nom sera « servie » à partir du 28 janvier. Un délai qui n'inquiète nullement ni la directrice ni l'infirmière de l'établissement. La première, Marie Saillard, se désole surtout de l'alarmisme des médias nationaux. « Des journaux télévisés ont traité le sujet à la une, alors que tant de drames agitent le monde, relève-t-elle. Du coup, c'est la panique chez les vacanciers qui annulent leurs réservations dans notre région. En fait, nous devrions surtout être fiers de notre département, le premier à appliquer une méthode préventive sans qu'il y ait urgence. »
« Quelques parents préfèrent cependant aller plus vite que le calendrier, signale l'infirmière, Sylvie Prud'homme. C'est possible en s'adressant directement aux centres de PMI. »
Des centres spécialisés, comme celui de la Croix-de-Neyrat, dans la ZUP Nord de Clermont-Ferrand. « Beaucoup de familles immigrées viennent ici avec des fratries importantes, raconte le Dr Florence Robin-Terver, pédiatre dans ce centre de PMI depuis sept ans. Ils ne sont pas inquiets, mais sont contents de se faire vacciner sans tarder. C'est la même chose avec les familles de gendarmes en garnison à côté d'ici. Aucune angoisse, mais le désir d'être en règle le plus vite possible. »
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