« Automne et Hiver », de Lars Norén

Dans l’enfer délicieux des familles

Publié le 14/03/2006
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C’EST UN SPECTACLE très intéressant dont il ne faut pas craindre la forme audacieuse. La lenteur, le chuchotement. Mais, attention, rien d’excessif : 1 h 50 qui valent la peine car l’auteur, Lars Norén, travaille sur un domaine inépuisable, l’enfer des familles.

Un père médecin (David Jeanne-Comello). Il est apparemment doux et silencieux. Une mère très volubile qui ne travaille pas, la soixantaine enfantine (Catherine Riaux). Deux filles. L’aînée qui donne le sentiment d’être forte, indépendante, adulte. Mais elle ne l’est pas et souffre (Valérie Schwarcz). La benjamine, allure d’adolescente. Mais elle a un petit garçon que garde son père ce soir là. La parole vient d’elle. Elle a des comptes à éclaircir. Une fois encore. Mélanie Leray, qui l’incarne, signe également la mise en scène en compagnie de Pierre Maillet (qui joue dans « Eva Peron », la mère d’Evita, ils sont de la compagnie Les Lucioles).

On ne comprend pas tous les partis pris. La manière étrange dont est vêtue Valérie Schwarcz, les étiquettes encore sur les meubles comme si l’on était dans un magasin. Mais on comprend que l’on est à la fin d’un dîner chez les parents. Sûrement souvent recommencé. Et s’il y a crise ce soir-là, ce qui est intéressant c’est que malgré – ou à cause – des horreurs qui s’échangent, des règlements de comptes épouvantables, tout reprend de la douceur à la fin. La grande raccompagne en voiture la petite, papa écoute Léo Ferré tandis que maman se démaquille.

Qui est le démon, ici ? Tous. C’est très bien traduit par Jean-Louis Jacopin, Per Nygren, Marie de la Roche. Très bien resserré : le texte joué en entier, le spectacle durerait des heures. Et c’est très bien mis en scène : vrai-faux naturalisme, leurre du réalisme. Jeu profond, subtil, engagé des quatre protagonistes. On ne vous en dit pas plus.

C’est passionnant. Mais il faut accepter sans crainte les décisions audacieuses de la représentation...

Théâtre de la Bastille, salle du haut, à 21 h du mardi au samedi et le dimanche en matinée à 17 h jusqu’au 26 mars, puis à 19 h du 28 mars au 7 avril, du mardi au dimanche compris. Durée : 1 h 50 sans entracte (01.43.57.42.14). Texte publié à L’Arche.

> A. H.

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7919