Curieusement, Muriel Robin elle-même l'exprime en disant, dans le programme du spectacle que « La Griffe » est « une pièce avec un parfum de cinéma ». Elle a deviné quelque chose. Un déséquilibre. Une écriture qui appelle des plans serrés, des cadrages différents, des contre-plongées, une écriture qui aurait besoin d'une liberté que n'offre en rien ce décor hyper-réaliste (très joli travail de Stéfanie Jarre) qui, au lieu de fournir des appuis aux interprètes et au metteur en scène, les ligote. Les enferme.
Les auteurs ont voulu un huis clos qui permette la confrontation. N'y avait-il pas d'autre situation pour réunir une fille, sa mère, sa sœur, son amant ? La station-service n'apporte rien, strictement rien, n'était le personnage du pompiste, merveilleusement interprété par Erwan Creignou. Mais en pure perte dramaturgique.
Claude d'Anna et Laure Bonin ont du métier. Mais tout ici est un peu laborieux et l'on devine immédiatement tout dès que l'un des protagonistes lit quelques paragraphes du roman de l'absente, la fille d'Irène Coleman, qu'incarne avec une finesse et une émotion remarquables Muriel Robin. C'est dommage. La pièce s'intitule « La Griffe/A 71 ». Créatrice de mode, Irène Coleman est en train de se faire voler son nom par des financiers sans scrupule. Histoire connue. En rien traitée ici. Dommage. On s'occupe de la famille, des névroses, des asservissements consentis de fille à mère, des échecs, des fausses réussites, de solitude, des couples qui se mentent et préfèrent le leurre parce que c'est confortable. La langue est efficace, mais jamais éblouissante. Il y a beaucoup de conventions dans cette comédie.
Annick Blancheteau, esprit de finesse, insuffle une vie merveilleuse à la pièce. Elle s'appuie sur une très bonne distribution. Aude Briant, comédienne subtile, est excellente dans le rôle ingrat de Delphine. Nadia Barentin, la mère tyrannique, se taille le grand succès de la soirée. C'est une actrice magnifique. Mais le fait qu'elle domine la représentation marque bien le déséquilibre de l'écriture. Parfois, on dirait que c'est elle, le personnage principal. Le soir où nous l'avons vu, Bernard Verley se tenait dans un retrait étrange, loin du personnage et c'est un peu dommage parce que, du coup, on a quelque mal à croire, tout simplement, à ce qui le lie à l'héroïne.
Muriel Robin, on l'a dit, est remarquable et ce n'est pas une découverte, mais la confirmation d'un grand tempérament de comédienne maîtresse de toutes les nuances du personnage, très originale, qui d'un soupir, d'un petit rire très particulier, donne à lire la détresse et la souffrance de la battante.
Théâtre Fontaine, à 20 h 30 du mardi au samedi, à 18 h en matinée le samedi. Durée : 1 h 45 sans entracte (01.48.74.74.40.). Le texte de la pièce est publié, avec un dossier documentaire et un cahier d'actualité, par L'Avant-Scène, n° 1 104. (10 euros).
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature