EN 2007, LA CROISSANCE du marché pharmaceutique mondial s'est élevée à 6,4 %, avec 712 milliards de dollars (458 milliards d'euros) de chiffre d'affaires. Un résultat qui pourrait sembler satisfaisant aux yeux des industriels du secteur, si une analyse sur plusieurs années ne laissait apparaître une érosion constante depuis l'année 2001, au cours de laquelle cette même croissance s'était élevée à environ 12 %. Encore convient-il de pondérer les résultats de 2007 à l'aune de ceux des pays émergents : en 2007, ils enregistrent en effet une croissance de leur marché de 15 %, alors que, dans le même temps, le marché américain ne croît que de 4 % (contre 8,1 % en 2006). Quant au marché de l'Europe de l'Ouest, il enregistre une hausse de 4,8 %. D'une façon générale, les pays émergents contribuent à hauteur de 25 % à la croissance globale du marché pharmaceutique, alors que les cinq premiers marchés européens (France, Allemagne, Royaume-Uni, Espagne, Italie) y contribuent à hauteur de 15 %. Globalement, les États-Unis restent le premier marché mondial, suivi par le Japon, la France, l'Allemagne, l'Italie, le Royaume-Uni, l'Espagne, le Canada, la Chine et le Brésil.
La Chine grignote des parts.
Mais, selon les projections d'IMS, ce classement pourrait rapidement évoluer. Ainsi, en 2011, la Chine pourrait rafler la cinquième place et le Brésil la huitième, devant le Canada et l'Espagne, respectivement neuvième et dixième.
IMS s'est aussi attaché à évaluer la valeur en dollars des médicaments ayant perdu leur brevet en 2007 : selon ses calculs, cette valeur s'est élevée à 26 milliards de dollars (16,7 milliards d'euros) pour l'année passée, contre 20 milliards (12,8 milliards d'euros) seulement pour 2006. Un résultat qui devrait peser dans les chiffres 2008, puisque les génériques qui découlent de ces pertes de brevet seront commercialisés à un prix bien inférieur à celui des princeps auxquels ils se substituent.
Sur ces 712 milliards de dollars de vente pour 2007, les dix plus gros laboratoires mondiaux ont réalisé 45 % des ventes globales. Mais ce chiffre est un peu l'arbre qui cache la forêt car, selon IMS, la croissance de leur chiffre d'affaires est deux fois inférieure à celle du marché global. Pis encore, les numéros un et deux, respectivement Pfizer et GSK, ont eu en 2007 une croissance négative de – 4,6 % et – 2 %. Enfin, «quatre aires thérapeutiques se taillent la part du lion», précise Corinne Segalen, présidente d'IMS Health France : l'oncologie (41,4 milliards de dollars – 26,6 milliards d'euros), le diabète (24 milliards de dollars – 15,4 milliards d'euros), l'asthme et la BPCO (23,7 milliards de dollars – 15,2 milliards d'euros) et les antipsychotiques (20,7 milliards de dollars – 13,3 milliards d'euros).
Pour l'économiste de la santé Claude Le Pen, «l'intervention croissante des agences régulatrices et des organismes payeurs a changé la nature de l'accès au marché». Si les laboratoires visaient auparavant des lancements globaux de nouveaux médicaments, pour pénétrer rapidement un nombre maximal de pays, ils privilégient aujourd'hui «des lancements optimisés multilocaux plutôt que globaux, supposant ainsi une prise en compte précoce des nouveaux enjeux réglementaires et économiques locaux». En effet, dans beaucoup de pays, même au marché mature, l'accès au remboursement devient plus sélectif, les conditions d'évaluation se durcissent et des systèmes d'encadrement budgétaire voient le jour en plus de la fixation des prix. En France même, note encore Claude Le Pen, la Haute Autorité de santé se voit confier de nouveaux rôles et est passée à la faveur du dernier PLFSS (le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2008) d'une mission d'évaluation strictement médicale à une mission d'évaluation médico-économique. Selon l'économiste de la Santé, la HAS est en train de changer de doctrine. Sa logique n'est plus «aucun patient ne peut être privé d'un traitement efficace pour des raisons économiques», mais «ce n'est pas parce qu'un produit est efficace qu'il doit nécessairement être remboursé; encore faut-il qu'il ne soit pas trop cher au regard du service rendu». Si bien que, selon Claude Le Pen, «un rapport de force institutionnel entre la HAS et le CEPS (comité économique des produits de santé, qui fixe notamment le prix des médicaments) est à prévoir, cette situation nouvelle est potentiellement source de conflit».
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature