Les dégâts ne sont pas de même ampleur qu'à la CFDT-transports, où 10 000 à 15 000 adhérents sur 58 000 auraient quitté le navire confédéral, mais la fédération santé-sociaux de la CFDT, la première au sein de l'organisation avec 130 000 militants (1), est elle aussi secouée par la crise.
A l'hôpital, dans les cliniques, dans les maisons de retraite... la CFDT paie comme ailleurs les pots cassés de son approbation de la réforme gouvernementale des retraites et fait, d'une manière générale, les frais des choix « réformistes » du syndicat. En matière de réduction du temps de travail, de valorisation des carrières, la politique d'accompagnement choisie par Nicole Notat et poursuivie par son dauphin a fait plus que ne pas séduire les professionnels de santé : elle a irrité jusque dans les rangs des cédétistes convaincus. Résultat, selon les chiffres de la fédération, « un peu plus de 1 500 adhérents » ont rendu - ou s'apprêtent à rendre - leur carte. Certains le font de manière isolée et discrète ; pour d'autres, c'est plus spectaculaire. Dès juillet, par exemple, une grosse majorité du syndicat de Lille-Armentières (1 100 adhérents, dont 450 sont finalement restés à la CFDT) s'est désaffiliée pour rejoindre SUD. Plus récemment, c'est toute la Haute-Loire (800 adhérents) qui a fait sécession et rallié, cette fois-ci, la CGT. A Rennes, la section du CHU et celle de l'hôpital psychiatrique ont disparu, au profit de SUD. Le phénomène touche l'hôpital public mais aussi et surtout, analyse la secrétaire générale de SUD-Santé Irène Leguay, le secteur social et les cliniques privées (cliniques dans lesquelles la CFDT est la première force syndicale).
Fuite il y a, donc, dans la maison que dirigea - et fit prospérer - pendant plus de cinq ans l'actuel secrétaire général de la Confédération, François Chérèque. Yolande Briand, qui lui a succédé en 2002 à la tête des santé-sociaux, relativise la situation sans se voiler la face : « Même si elle est beaucoup moins touchée que d'autres, la fédération santé est touchée. Evidemment, on ne regarde jamais avec satisfaction les adhérents s'en aller mais ceux de Lille et de Haute-Loire, très honnêtement, ne vont pas nous manquer. Alors bien sûr, il y a des dégâts collatéraux qui font partir des militants qu'on aurait préféré garder... » Sur la même longueur d'ondes que son secrétaire général qui, la semaine dernière dans « le Monde », analysait les départs comme une « clarification politique », Yolande Briand apparaît presque soulagée par le départ d'opposants internes trop virulents. Et il est vrai qu'elle s'estime relativement préservée à double titre : elle peut d'abord, comme elle le fait d'ailleurs, se comparer avantageusement à d'autres fédérations de la CFDT - les transports, bien sûr, mais aussi les fonctionnaires territoriaux ; elle peut ensuite se comparer sans rougir à des précédents historiques, et en particulier à la scission qui, en 1989, donna naissance à SUD - à l'époque, « plus de 5 000 adhérents, concentrés en Ile-de-France, étaient partis », se souvient-elle.
On peut effectivement considérer que la fédération santé-sociaux limite la casse. Cela ne l'empêche pas d'accuser le coup. Les résultats des dernières élections dans la fonction publique hospitalière (« le Quotidien » du 10 novembre) l'attestent. Avec 24,2 % des suffrages, la CFDT ne conserve que de justesse sa place de deuxième organisation syndicale de l'hôpital. Loin derrière la CGT qui s'étoffe un peu (32,9 % des voix), légèrement devant FO qui s'érode doucement (22,3 %). Au total, c'est plus de cinq points que la CFDT a perdu à l'hôpital depuis les dernières élections de 1999. Au profit sans doute un peu de la CGT mais aussi de SUD, dont le résultat est spectaculaire (passant de 4,2 à 7,9 %, SUD devient le quatrième syndicat de l'hôpital public).
Ces cinq points perdus ne sont pas pris à la légère par la CFDT. « C'est beaucoup, reconnaît Yolande Briand, il faut maintenant que nous analysions ce résultat, que nous le regardions de près. » Si la secrétaire générale dessanté-sociaux refuse de voir ce vote comme un refus en bloc des choix de son organisation, d'autres s'en chargent pour elle. Irène Leguay, de SUD-Santé, n'y va pas par quatre chemins : « Les professionnels veulent voir les organisations syndicales sur la ligne de l'offensive, pas sur celle de l'accompagnement. »
(1) Au total, la CFDT en revendique 889 000, ce qui en fait la première organisation syndicale française
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