CELA FAIT DES MOIS que l'on parle de récession aux États-Unis et en Europe. Il est donc impossible que les acteurs de la Bourse ne découvrent qu'aujourd'hui le ralentissement économique. En outre, ne s'en rendraient-ils compte que depuis peu qu'une croissance de 0 % ou même un peu moins n'est pas de nature à provoquer des chutes répétitives de six à huit points en une seule journée. Une croissance nulle signifie qu'elle ne progresse pas. Cela ne veut pas dire que l'activité économique retombe à zéro, qu'il n'y a pas d'affaires à faire ou d'argent à gagner.
La consternation du grand public est aggravée par l'incompréhension : pour la plupart des gens, le système est à la fois extrêmement complexe et opaque, ce qui ne favorise guère la sérénité. En revanche, l'unique raison du comportement erratique des marchés, avec des pics et des abîmes, c'est qu'ils n'ont pas été rassurés par les différents plans mis en vigueur aux États-Unis et en Europe.
Il faut du temps.
Ils ne le sont pas pour une excellente raison : il faut du temps pour remettre en route la circulation des crédits interbancaires et pour que les banques reprennent des risques quand elles doivent financer des projets d'entreprise. Or, en France, le plan adopté par le gouvernement n'entrera en vigueur que cette semaine : il fallait bien qu'il fût d'abord voté par le Parlement. Si Nicolas Sarkozy a cru bon, la semaine dernière, d'annoncer que les crédits recommençaient à circuler en France, c'est très précisément pour indiquer un faible regain de confiance.
Pourquoi la crise financière a-t-elle pris une telle ampleur ? Beaucoup d'analystes pensent que l'abandon de Lehman Brothers par les autorités fédérales américaines a été une erreur qui a plombé le marché. C'est très possible, d'autant que le secrétaire américain au Trésor, Henry Paulson, a pris sa décision au nom du dogme libéral : il n'appartient pas à l'État de renflouer une affaire privée. Mais le dogme a été aussitôt abandonné lorsqu'il a bien fallu renflouer l'énorme assureur AIG. En même temps, on ne peut pas, comme le peuple américain, dénoncer l'aide aux banques à coups de milliards et reprocher à George Bush de laisser couler Lehman Brothers.
Autre raison possible de l'anxiété des marchés : l'idée de M. Paulson consiste à sortir les crédits à risque du bilan des institutions financières et de créer un organisme chargé de les gérer et de les négocier lors de jours meilleurs. L'idée de Gordon Brown, adoptée par Nicolas Sarkozy, consiste au contraire à faciliter, milliards à l'appui, la circulation des crédits. Il semble bien que le plan Brown ait été mieux accueilli par les marchés. Mais l'interdépendance entre l'Amérique et l'Europe a eu raison de la remontée de la cote.
L'IMPORTANT ETAIT D'EVITER UNE PANIQUE GENERALE
Il faudra des mois, sans doute des années, pour que les cotations reviennent à des niveaux plus raisonnables. Aussi bien le sort des foyers français n'est-il pas lié directement aux errements de la Bourse. La mobilisation des instances européennes a eu pour effet principal d'écarter un danger mortel : le retrait de leurs comptes en banque par les citoyens européens ; M. Sarkozy, et c'est son mérite, a évité un tel naufrage, qui aurait ruiné riches et pauvres à la fois et se serait sans doute traduit par une crise du type de 1929, avec une contraction d'un quart à 30 % de l'économie, un chômage massif, une misère généralisée.
Il est logique, dans une démocratie, de critiquer l'action gouvernementale ; mais nous dirons, pour notre part, que le pays a eu de la chance d'avoir, en Nicolas Sarkozy, un président français et européen qui s'est comporté avec détermination et se montre inlassable. Le reste de la discussion relève franchement de la rhétorique et de ce que nous appellerons la politicaillerie. Dans une période aussi troublée, il n'est ni mauvais ni inutile de définir les priorités.
Les conséquences demeurent.
Tout cela n'empêche ni la « crise de l'économie réelle » ni ses conséquences qui seront tragiques, surtout pour les plus pauvres. M. Sarkozy, c'est clair, n'entend pas relâcher ses efforts. Non seulement il continue de multiplier ses contacts européens, non seulement l'Europe des vingt-sept a approuvé les plans européens de relance, mais le chef de l'État entend accomplir plusieurs choses : pendant le week-end, il s'est rendu, en compagnie de José Manuel Barroso, chef de la Commission européenne, chez George Bush pour le convaincre d'une réforme du système financier mondial, lequel n'a pas changé depuis 1944. Car il n'est plus question que le cataclysme de cette année se reproduise ; et il veut que l'Europe s'engage à procéder à une relance économique à l'échelle de l'Union, étant entendu qu'il a déjà pris des mesures pour financer les PME, qui seront les seules créatrices d'emploi l'an prochain.
Selon un sondage publié vendredi par « le Figaro », 60 % des Français approuvent le plan Sarkozy. Que ce plan n'ait pas produit instantanément le retour au calme des marchés et instauré la prospérité en France ne signifie pas qu'il n'était pas indispensable ni, qu'il ne nous ait pas évité un cataclysme.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature