De notre correspondante
à New York
La maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ), comme les autres maladie à prions, est due à une dégénérescence neuronale qui résulte de l'accumulation de la forme pathologique de la protéine prion (PrP).
La majorité des cas (85 %) est sporadique, avec l'absence d'une mutation du gène de la protéine prion (observée dans la forme familiale) et l'absence d'une exposition iatrogène (traitement par hormone de croissance ou greffe de dure-mère).
Dans sa forme typique, la MCJ apparaît après la cinquantaine et associe une démence rapidement progressive et des myoclonies. Un syndrome akinétorigide précède souvent le décès.
Le diagnostic de la forme sporadique peut être soupçonné à partir de la présentation clinique et conforté par des examens complémentaires, comme l'EEG, l'IRM et l'analyse du liquide céphalo-rachidien (protéine 14-3-3). Toutefois, la certitude n'est acquise qu'après le décès, lorsqu'on retrouve la protéine prion anormale dans le tissu cérébral.
Les voies olfactives souvent touchées
Jusqu'à présent, aucun marqueur périphérique de la MCJ sporadique n'a été identifié. Une équipe italienne, dirigée par le Dr Salvatore Monaco (université de Vérone), a recherché la protéine prion anormale dans les voies olfactives, après avoir remarqué que le cortex et les voies olfactives sont souvent touchés dans la forme sporadique.
Chez neuf patients atteints d'une forme sporadique confirmée à l'autopsie, ils ont prélevé le cerveau, la lame criblée de l'ethmoïde et la muqueuse olfactive attachée avec l'épithélium respiratoire adjacent. Ils les ont analysés par immunohistochimie et western blot. Des comparaisons ont été faites avec les mêmes prélèvements chez cinq témoins de même âge et de six sujets atteints d'autres maladies neurodégénératives.
Leurs résultats sont très significatifs. Chez chacun des neuf patients atteints, la méthode immunohistochimique a détecté la protéine prion anormale dans le neuro-épithélium de la muqueuse nasale (cytoplasme et dendrites) et dans les voies olfactives centrales, mais pas dans l'épithélium respiratoire. En revanche, aucune protéine prion anormale n'a été trouvée chez les 11 témoins.
« Etant donné le petit nombre de patients, notent les chercheurs, nos résultats doivent être interprétés avec prudence, mais, si on les considère conjointement, ils suggèrent que le système olfactif est touché à un stade précoce de la maladie de Creutzfeldt-Jakob sporadique. »
Cette découverte suggère qu'une biopsie du tissu olfactif pourrait offrir un moyen de diagnostic précoce de la maladie et permettrait d'évaluer l'efficacité potentielle d'agents antiprions. On peut noter au passage que chez les patients porteurs du nouveau variant de la MCJ, la biopsie des amygdales révélant la présence de la protéine prion infectieuse a considérablement facilité le diagnostic.
Les procédures endoscopiques
Cette découverte soulève aussi des questions sur le risque infectieux. Ces patients représentent-ils une source d'infection ou ont-ils été infectés par voie olfactive ? Les procédures endoscopiques et chirurgicales concernant la voûte supérieure des fosses nasales pourraient-elles représenter un facteur de risque de transmission du prion anormal ? Aucun cas n'a jusqu'ici été décrit.
« Il reste à savoir aussi si l'épithélium olfactif représente une porte d'entrée de l'infection ou simplement un site d'infection durant la propagation des prions dans les circuits nerveux », notent les chercheurs. L'hypothèse que la forme sporadique pourrait être causée par des mutations somatiques du gène de la protéine prion dans les neurones adultes devient intéressante, ajoutent-ils. L'épithélium et le bulbe olfactifs sont des lieux de neurogenèse et pourraient donc offrir des points de départ de telles mutations somatiques.
« New England Journal of Medicine », 20 février 2003, pp. 711 et 681.
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