L'OBÉSITÉ n'attend pas le nombre des années. C'est ce que confirme l'étude de l'Observatoire régional de la santé de Paca menée dans des écoles maternelles de la région provençale en 2002-2003 auprès d'un échantillon représentatif de 3 000 enfants âgés de trois ans et demi à quatre ans et demi. Les chiffres sont déjà alarmants dans cette tranche d'âge puisque 11,7 % des garçons et 13,7 % de filles sont considérés en surpoids ou obèses. « C'est un petit peu moins que dans certains autres régions françaises comme le Nord, indique Pierre Verger, directeur adjoint de l'ORS, mais la fréquence reste tout de même élévée. L'obésité est un phénomène qui touche garçons et filles très tôt dans l'existence. »
Ces chiffres sont à recouper avec les catégories sociales et les conditions de vie des familles. Le pourcentage d'enfants obèses ou en surpoids est plus élevé dans les écoles situés en ZEP et en milieu urbain non ZEP qu'en milieu rural. Dans les ZEP, plus de 13 % des enfants souffrent de problèmes de poids. L'étude montre également que ces problèmes sont plus importants dans les zones à forte précarité économique que dans les secteurs plus favorisés. « Cela peut influer sur la priorité des actions à mener en fonction du niveau de précarité des enfants touchés », souligne encore Pierre Verger.
Des réponses collectives sont à apporter pour enrayer « ce qui est aujourd'hui une épidémie », comme le souligne le Dr Patrick De Boisse. « En 1965, il y avait 5 % d'ados obèses, aujourd'hui on évoque le chiffre de 15 %. Il faut faire de la prévention et ce dès la grossesse car une femme en surpoids qui donne naissance à un enfant de 4 kg donne naissance à un enfant à risque. » L'allaitement maternel aurait, selon lui, également des effets très positifs dans la prévention de l'obésité. « Encore faut-il informer les mères. » Ce pédiatre, président de l'association Autour de l'enfant, défend le dépistage précoce avec une équipe pluridisciplinaire, kiné, diététiciens, médecins libéraux, psychologues, etc. « Nous souhaitons pouvoir créer un réseau qui doit coordonner tous les acteurs qui œuvrent sur ce problème. » Ce projet de prévention devrait être soutenu par l'Urcam (Union régionale des caisses d'assurance-maladie) avec le fonds d'aide à la qualité des soins de ville (Faqsv).
Une meilleure alimentation chez les moins jeunes.
L'information en tout cas doit circuler autour de la lutte contre l'obésité. Car les chiffres ont augmenté ces dernières années de façon régulière. La deuxième enquête présentée par l'ORS, extension régionale d'une grande enquête nationale menée en 2003 sur les comportements de la population face aux risques de maladie, permet d'estimer la prévalence des problèmes de poids et fournit des éléments sur les habitudes alimentaires et l'activité physique des habitants de Paca. Ils sont un peu moins concernés par les problèmes de poids que la moyenne française : 39 % des hommes et 26 % des femmes sont en surpoids contre respectivement 44 % et 31 % pour la population nationale. Mais la différence n'est due qu'aux chiffres obtenus après quarante ans. Selon les spécialistes, tout s'explique par des habitudes alimentaires différentes. On consomme dans la région, régime méditerranéen oblige, davantage de poissons, de fruits et de légumes. Mais les spécificités régionales s'estompent quand on descend dans les tranches d'âge inférieures, avec un recours accru à la restauration rapide et aux boissons sucrées, bien plus important même qu'au niveau national. La nourriture n'est pas épargnée par l'uniformisation des habitudes. Ce qui ramène l'ensemble des résultats sur ces tranches 10-18 ans et 18-29 ans à un niveau quasiment égal - voire supérieur - à celui de la population française, quelles que soient cette fois les catégories sociales. Par ailleurs, l'enquête révèle que les Provençaux, quel que soit leur âge, sont moins enclins à pratiquer une activité sportive que la moyenne des Français.
Cette accélération du phénomène ne manque pas d'inquiéter les médecins dans leur ensemble. Soit parce qu'ils traitent les adultes obèses, soit parce qu'ils prennent conscience de leur rôle dans le dépistage précoce. Comme le Dr Patrick François, pédiatre également à Marseille, qui, en trois ans, a fait chuter de 10 à 15 %, selon les tranches d'âge, la prévalence de surpoids dans sa clientèle. « Il faut dépister tôt en traçant de façon systématique les courbes de corpulence, en impliquant tous les acteurs de la petite enfance, médecins scolaires, généralistes et pédiatres. Pour limiter la propagation de l'épidémie, on peut modifier les comportements par des actions éducatives et pédagogiques simples autour de manger mieux et moins, et lutter contre la sédentarité, de nouveau avec une prise en charge pluridisciplinaire. Cette prise en charge s'inscrit dans la durée. » Le Dr Patrick François suggère d'utiliser l'expérience des réseaux ville hôpital de prise en charge de l'obésité en pédiatrie (Repop), qui existent déjà à Toulouse, Lyon, Bordeaux ou Paris.
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