Couples homosexuels et adoption : bataille de pétitions

Publié le 06/05/2001
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P OUR la famille française, c'est l'heure du grand chambardement : enfants naturels ou adultérins vont être mis sur un pied d'égalité avec les autres. L'Etat va rappeler aux parents leurs obligations dans le cadre des divorces et des familles recomposées et l'homoparentalité tente de se faire une place.

L'adoption du pacte civil de solidarité (PACS), à l'automne 1999, a préparé le terrain à cette évolution des mœurs. Le Pr Jean-François Mattei déclarait à l'époque au « Quotidien » (12 octobre 1999) : « Le danger du PACS, avec son statut juridique, est de permettre de revendiquer légalement le droit à l'adoption d'un enfant. Et la Cour européenne des droits de l'homme, en défendant le principe de non-discrimination, n'y fera pas obstacle », prévoyait le député UDF. C'est pourquoi, de manière à tenir à l'écart toute officialisation de l'homoparentalité, deux de ses confrères, collègues RPR du Palais-Bourbon, déposeront, en mai 2000, une proposition de loi contre le principe de l'adoption d'un enfant par un couple homosexuel, y compris lorsque les postulants sont liés par un PACS.
Le texte précise : « L'adoption peut être demandée par toute personne âgée de plus de 28 ans et ne vivant pas en couple avec une personne de même sexe. » Dans la foulée, le Dr Renaud Muselier s'emploie à écarter toute « dérive » en appelant la population à signer une pétition, qui a recueilli, à ce jour, plus de 100 000 signatures, dont 266 de députés et sénateurs.

Une requête en Conseil d'Etat

En fait, le déclencheur aura été un jugement de première instance du tribunal administratif de Besançon (Doubs) de février 2000 accordant à une institutrice du Jura de 39 ans, vivant avec une femme psychologue scolaire, une demande d'agrément en vue d'adopter un enfant, ce que lui avait refusé le conseil général du Jura en novembre 1998. Mais la cour administrative d'appel de Nancy (Meurthe-et-Moselle) n'a pas retenu la requête de l'enseignante, qui s'est alors tournée vers le Conseil d'Etat. Lequel s'est prononcé négativement sur une affaire similaire. L'intéressé, Philippe Frettet, professeur agrégé de 47 ans, attend l'avis de la Cour européenne des droits de l'homme sur la recevabilité de sa plainte, qui doit intervenir en juin prochain.
Dans ce remue-ménage des mentalités, l'Association des parents et futurs parents gays et lesbiens (APGL) a décidé de réagir à son tour en prenant fait et cause pour l'institutrice jurassienne. Une pétition, en circulation depuis février 2001, compte plus de 2 000 signatures (1). Avec l'APGL militent entre autres pour l'homoparentalité, la Ligue des droits de l'homme, Agir contre le chômage !, l'Union des familles laïques, Michel Rocard, Claude Evin, le sociologue Alain Touraine, l'anthropologue Françoise Héritier et des médecins, dont le Dr Frédéric Jésu, pédopsychiatre (voir ci-dessous).
Rappelons que l'adoption est ouverte aux célibataires depuis 1966, mais que la jurisprudence en exclut, pour l'instant, ceux qui vivent en couple homosexuel.

(1) Tél. 01.47.97.69.15. Site Internet www.apgl.asso.fr.

Philippe ROY

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6912