DE NOTRE CORRESPONDANTE
LE TABAC nuit aussi gravement à l’hôpital. Dans la soirée du 15 mars, une patiente, hospitalisée dans un service de pneumologie de l’hôpital de la Croix-Rousse, a tranquillement allumé une cigarette dans sa chambre, bien imprégnée d’oxygène. Ce qui devait arriver est arrivé : son geste a été suivi, séance tenante, d’une forte explosion, puis d’un incendie. «La chemise de nuit de cette patiente était en train de s’embraser lorsque les soignants sont arrivés dans la chambre», indique le Pr Jean-Claude Guérin, chef du service concerné. L’alerte a immédiatement été donnée et les pompiers sont parvenus à maîtriser le feu. Le Samu a également dû intervenir, afin de prendre en charge la patiente, victime de brûlures.
En raison des fumées présentes dans le service, les autres malades ont été évacués, avant de pouvoir réintégrer leur chambre une heure plus tard. Quant aux dégâts matériels relatifs à cet accident, ils seraient relativement «importants», observe Jean-Claude Guérin, qui précise que «le lit s’est entièrement consumé et la chambre est devenue inutilisable».
Si cet accident semble avoir été géré avec beaucoup de sang-froid et de professionnalisme, il pose quelques questions sur les moyens qui ont été mis en oeuvre pour l’éviter. A ce sujet, le Pr Guérin affirme avoir proposé à plusieurs reprises des substituts nicotiniques à cette patiente, qui, de plus, aurait été mise en garde contre les risques qu’elle courait à fumer dans sa chambre, quelques heures avant l’accident. «C’est une malade difficile, avec une grosse dépendance tabagique, qui est dans le service depuis très longtemps», précise-t-il. Et d’ajouter : «Depuis qu’on la connaît, on lui donne tous les conseils nécessaires sur le tabac, en tenant compte de deux choses: c’est une ancienne toxicomane et elle est dans la phase terminale d’une maladie évolutive, donc on ne peut pas, non plus, être excessivement directif.»
Vers une tolérance zéro ?
La lutte contre le tabac à l’hôpital devrait pourtant être un impératif absolu. «C’est un risque majeur, commente Pierre-Louis Freydière, chargé de la sécurité aux HCL. Statistiquement, il est à l’origine de 30 % des incendies.» Des modules de sensibilisation à la sécurité sont régulièrement proposés aux personnels des HCL. Pourtant, il y a encore des soignants qui permettraient aux malades de fumer dans leur chambre, dans les couloirs ou dans des pièces consacrées fumoirs.
«L’hôpital sans tabac reste un idéal difficile à atteindre», constate le Pr Guérin. Selon une enquête interne réalisée récemment par le Dr Raoul Harf, chargé de la lutte antitabac pour les HCL, 95 % des médecins interrogés estiment que, s’il est un lieu où le tabac devrait être banni, c’est bien l’hôpital. De la même manière, cette enquête montre qu’il n’y aurait plus qu’un médecin sur six à considérer que le patient hospitalisé doit pouvoir fumer parce que cela relève de sa liberté individuelle. En résumé, une grosse majorité de praticiens plaide pour que l’hôpital sans tabac soit considéré non plus comme un idéal vers lequel il faudrait tendre, mais comme un objectif à réaliser séance tenance.
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