Les syndicats avaient été clairs. Pas de régulation du secteur 2 et des dépassements d’honoraires sans une revalorisation du secteur 1. Le relevé de conclusions finalement signé mardi dernier par la majorité des syndicats de médecins libéraux comporte les deux à la fois. Mais la surprise, c’est que les caisses sont allées un peu plus loin que prévu sur le second volet, notamment en direction du médecin traitant. Ce premier accord conventionnel porte d’ailleurs clairement la marque des priorités de santé du nouveau gouvernement, omniprésent dans les coulisses. Il ne s’est néanmoins cristallisé que mardi après-midi, au terme d’une réunion marathon qui a duré plus de 20 heures ! Car si les pouvoirs publics se montraient prêts à donner un vrai signe sur le secteur 1, ils voulaient avant tout obtenir la limitation des honoraires libres. Et c’est là que ça a failli coincer avec les syndicats de médecins.
Cette dernière réunion marque donc l’épilogue d’une négociation qui s’était ouverte le 25 juillet dernier, à la demande de la ministre de la Santé, Marisol Touraine. Et qui s’est éternisée au cours de deux réunions nocturnes dans les huit derniers jours. L’accord finalisé mardi après-midi épargnera donc aux médecins libéraux une suite du feuilleton au Parlement. Et les députés, qui discutent cette semaine du PLFSS 2013 n’auront donc pas besoin d’intervenir. Au total, 320 millions d’euros seront débloqués par les caisses, auxquels s’ajoutent 200 millions d’économies faites sur l’imagerie et, a priori, 150 millions des complémentaires santé.
Forfait médecin traitant pour chaque patient
Cet accord octroie donc des revalorisations plus importantes que prévu aux médecins généralistes dans le cadre du parcours de soins. Invitée surprise de la réunion de cette semaine, la revalorisation du forfait médecin traitant n’était en effet pas prévue dans le protocole proposé par les caisses la semaine dernière. C’est le président de la République lui-même qui a donné le « la » le week-end dernier, en intervenant à Nice lors du Congrès de la Mutualité Française, demandant «une généralisation du système des forfaits». Cette extension du forfait médecin traitant à l’ensemble de la patientèle du généraliste figure donc en toutes lettres dans l’accord. Concrètement, elle entrera en vigueur à partir du 1er juillet. Il s’agit certes d’un mini-forfait de 5 euros, très inférieur aux 40 du forfait ALD actuel, mais qui sera finalement accordé pour tous les patients de 16 ans et plus, et pas seulement cantonné, dans un premier temps, aux plus de 60 ans, comme cela a été envisagé un moment, au grand dam de MG France. Cette mesure sera financée «compte tenu de l’engagement financier de l’Unocam», précise prudemment l’accord, tant il est vrai que l’engagement des mutuelles demeure à consolider.
Ce nouveau forfait, baptisé RMA, se substitue au coup de pouce sur la tenue du volet médical de synthèse, qui était prévu dans la version 1 du protocole d’accord présenté la semaine dernière. D’inspiration MG France, c’est sûrement la mesure la plus symbolique pour les médecins traitants. Mais ce n’est pas la seule. À côté de l’actuel V Alzheimer, deux autres consultations lourdes seront en effet créées qui correspondent là encore aux priorités de santé du gouvernement.
Un C spécifique pour le grand âge
Sur le grand âge, les parties signataires ont en effet prévu des mesures d’amélioration de la prise en charge des personnes âgées. La CSMF avait proposé il y a dix jours à l’Assurance Maladie de créer une consultation pour les personnes âgées de plus de 80 ans. Les caisses se sont finalement ralliées à la proposition du syndicat de Michel Chassang, après avoir fait la moue dans un premier temps, au motif que le critère d’âge n’était, selon elles, pas le plus pertinent. Cette nouvelle consultation lourde prendra donc la forme d’un complément forfaitaire de 5 euros à chaque consultation d'un patient âgé pour, explique le protocole, « tenir compte de leurs comorbidités et de la complexité du suivi des traitements, en veillant notamment à la prévention de la iatrogénie médicamenteuse ». Cette rémunération supplémentaire par acte – que ne paieront pas les patients âgés, puisqu’elle sera versée trimestriellement par les caisses – doit intervenir à partir du 1er juillet 2013 pour les patients de plus de 85 ans, et à partir du 1er juillet 2014 pour les plus de 80 ans. Cela concerne 32 millions de consultations par an, soit un coût potentiel de 160 millions d’euros pour l’assurance-maladie.
Deux consultations post-hospitalisations
L’accord du 23 octobre colle aussi avec un autre chantier gouvernemental en matière de santé : mieux coordonner le travail ville-hôpital. Une perspective là encore évoquée par François Hollande à Nice : « Évitons des hospitalisations non pertinentes et faisons en sorte de faire travailler ensemble les professionnels ! », s’est exclamé samedi le président. La création de consultations de suivi de sortie d'hospitalisation participe à cet objectif. L’enjeu est de taille, alors que certains experts évoquent 2 milliards d’euros d’économies potentielles sur les hospitalisations inutiles. Deux actes longs vont donc être créés en sortie d’hospitalisation à partir du 1er juillet 2013 : la première pour les patients ayant subi une intervention chirurgicale «avec altération d’autonomie» et atteints d’une « pathologie chronique grave »; la seconde pour les patients insuffisants cardiaques au retour d’un épisode aigu. Ces nouvelles consultations valorisées à hauteur de 2C ne pourront être effectuées qu’une seule fois par les médecins secteur 1 et les signataires du « contrat d’accès aux soins », pour les patients nécessitant un suivi rapproché et coordonné, vus à domicile ou au cabinet. Alors même que le PLFSS 2013 prévoit des expérimentations sur le parcours de soins de la personne âgée entre la ville et l’hôpital pour favoriser le maintien à domicile, la convention apporte donc sa pierre à cet édifice.
L’accord rappelle aussi qu’un chantier – prévu dans le PLFSS – s’ouvrira « dans le courant du premier semestre 2013 » autour de la rémunération des professionnels de santé « qui assurent des services coordonnés autour du patient ».
Et les actes techniques aussi...
Enfin, les spécialistes secteur 1 sont aussi impactés. Particulièrement concernés par la Ccam technique, ils bénéficieront de sa revalorisation prévue en trois temps : 1er juillet 2013, 1er mars 2014, 1er janvier 2015. Celle-ci est en partie financée par les économies prévues sur les actes d’imagerie. En outre, des revalorisation de la CCam clinique sont prévues à leur intention et notamment le racourcissement du délai de fréquence de l’acte de consultant, côté 2C qui sera ramené de six mois à quatre.
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