L'insulinothérapie intensive, visant à diminuer la glycémie en deçà de 1,10 g/l, réduit de manière générale la consommation de soins lourds et le risque des complications qui sont habituelles chez les patients en état critique, y compris la mortalité.
Les patients en situation critique et qui doivent être placés en soins intensifs pendant plus de cinq jours ont un risque de décès de 20 %. Ils sont par ailleurs victimes de lourdes complications : infections sévères, défaillance des organes vitaux (qui amplifie le risque d'une issue fatale). L'hyperglycémie, associée à une insulinorésistance, survient couramment dans les situations critiques.
Actuellement, on manque de données sur le devenir de ces patients n'ayant auparavant jamais souffert de diabète. On sait que chez les diabétiques qui présentent un infarctus du myocarde en phase aiguë, un traitement maintenant la glycémie à des taux inférieurs à 2,15 g/l, améliore significativement l'évolution à long terme. On sait aussi que l'hyperglycémie, avec ou sans insulinorésistance, peut amener directement ou indirectement des complications : infections sévères, polyneuropathies, défaillance organique multiple et décès.
Maintenir la glycémie entre 0,80 et 1,10 g/l
Une étude prospective a été réalisée dans une unité chirurgicale de soins intensifs chez 1 548 patients mis sous respirateur artificiel. Tous séjournaient en soins intensifs pour des interventions cardiaques, neurologiques, thoraciques, abdominales ; après un polytraumatisme, une transplantation ou des brûlures sévères. A l'admission, ils ont reçu soit un traitement insulinique intensif visant à maintenir la glycémie entre 0,80 et 1,10 g/l, ou bien un traitement conventionnel, c'est-à-dire une insulinothérapie seulement si la glycémie dépasse 2,15 g/l, avec un maintien de la glycémie entre 1,80 et 2,00 g/l.
Les résultats donnés à 18 mois sont en faveur du traitement insulinique intensif. Ce traitement réduit la mortalité à 4,6 %, tandis que, dans le groupe sous traitement hypoglycémiant conventionnel, elle atteint 8 % (p < 0,04).
« Les bénéfices du traitement insulinique intensif tiennent à l'effet sur la mortalité parmi les patients qui sont demeurés dans l'unité de soins intensif pendant plus de cinq jours », précisent les auteurs. On observe que 20,2 % des patient sont restés plus de cinq jours dans l'unité de soins intensifs avec le traitement conventionnel tandis qu'ils ne sont que 10,6 % dans le groupe sous insulinothérapie intensive (p = 0,005). L'effet le plus important est une réduction des décès attribuables aux défaillances organiques multiples en relation avec un foyer septique.
La mortalité totale réduite de 34 %
L'insulinothérapie intensive a également réduit la mortalité totale de 34 % pendant l'hospitalisation (après donc la sortie des soins intensifs), les septicémies de 46 %, l'insuffisance rénale aiguë nécessitant une dialyse de 41 %. Le nombre moyen de transfusions sanguines est diminué de moitié (ce qui reflète une amélioration de l'érythropoïèse ou une réduction de l'hémolyse) et les polyneuropathies liées à l'état critique de 44 %. La réduction du risque de polyneuropathies avec l'insulinothérapie intensive, sans intervention d'autres médicaments, suggère que l'hyperglycémie, le déficit en insuline ou les deux contribuent au dysfonctionnement axonal et à sa dégénérescence. « La relation linéaire qui unit les taux de glycémie et le risque de polyneuropathie indique qu'il est nécessaire de maintenir la glycémie à un taux le plus bas possible (proche de la normalité). »
Les patients du groupe sous insulinothérapie intensive ont eu un besoin moins grand et prolongé de ventilation mécanique et de soins intensifs. On évoque, à ce sujet, un rôle anabolique direct de l'insuline sur les muscles respiratoires et la réduction des polyneuropathies.
On note aussi une prévention de l'insuffisance rénale par l'insulinothérapie intensive. Or, mise à part une optimisation du statut hémodynamique, aucune autre stratégie n'a fait la preuve de son efficacité à cet égard.
« New England Journal of Medicine », vol. 345, n° 19, 8 novembre 2001, pp. 1359-1367.
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