Il s’est fait connaître du grand public l’hiver dernier. Le professeur Pierre Coriat, comme pour défendre l’institution préférée des Français, l’hôpital public, avait mis sa démission dans la balance, si les pouvoirs publics persistaient à vouloir supprimer plus de 1000 postes par an dès 2010 à l’AP-HP. Jamais, avant lui, un président de CME de l’AP-HP n’avait suscité une telle couverture médiatique. Jamais un mandarin n’avait incarné avec autant de panache la figure frondeuse de David, victorieux face à Goliath. Car les pouvoirs publics ont reculé. Pour le moment. Le plan stratégique, qui doit être présenté dans les jours qui viennent, ne devrait pas comporter de suppression arbitraire de postes soignants, assure Pierre Coriat, sûr de son fait. Le chef de service d’anesthésie-réanimation de l’AP-HP a redonné vie à l’institution. Baroud d’honneur ou coup de bluff ? Le mandarin a le triomphe modeste : « Je suis chef de service et professeur des universités dernier échelon. Le courage dont j’ai fait montre n’était pas démesuré… » Si l’acte fondateur de sa fraiche légende ne lui paraît pas revêtir les attributs de l’héroïsme, Pierre Coriat, à près de soixante ans, peut se vanter d’un parcours aventureux, jonché d’obstacles qu’il a su franchir. « En 1975, lorsque j’ai choisi comme spécialité l’anesthésie, je pariais sur une spécialité qui balbutiait. Mais, au vu de ses actuels développement je suis content de ne pas m’être trompé de voie. » Force est de lui reconnaître un talent de visionnaire. Quelque quarante ans plus tard, Pierre Coriat se vante d’être le deuxième chercheur français le plus publié dans le domaine de l’anesthésie-réanimation. De quoi lui prêter une certaine assurance, qui va de pair avec une faconde toute méditerranéenne. « Ma famille est pied-noir, même si j’ai grandi à Paris. » Fils de pharmaciens d’officine, Pierre Coriat estime être d’extraction modeste. Est-ce la raison pour laquelle son discours est émaillé de termes progressistes, comme « modernité » et « démocratie » ? Car Pierre Coriat, à l’écouter, a placé sa vie entière sous le signe du progrès humain. Son mandat à la tête de la CME ? Il le met au service d’un « hôpital moderne », un écrin qui sertit « une pensée médicale démocratique ». Ses collègues de la CME toutefois sont moins élogieux. Et d’évoquer la dernière élection des membres médicaux du directoire où, malgré un vote majoritaire de la CME en faveur du professeur Olivier Lyon-Caen, Pierre Coriat lui a préféré un autre de ses collègues. Quant à sa vision moderne de l’hôpital public, elle ne va pas sans casse. Pierre Coriat est partisan de la fermeture du service de pédiatrie spécialisée de l’hôpital Trousseau. En invoquant des avancées scientifiques incontestables. « Les progrès du dépistage anténatal vont diminuer certains besoins de pédiatrie spécialisée », avance-t-il. Il n’empêche : ses collègues qui militent au Mouvement de défense de l’hôpital public (MDHP) ne partagent pas son avis. De quoi lui attirer des inimitiés ? D’autres lui reprochent ses accointances avec le pouvoir en place : à de nombreuses reprises, Pierre Coriat, et d’autres professeurs, ont été reçus au Château. Le héros passerait-il pour un vendu aux yeux de certains ? Peu lui chaut. Il s’estime être le défenseur d’un hôpital public moderne, quoi qu’en pensent la vox populi. Et se moque des idées toutes faites : « Je suis amateur de vélo et de golf. Faire du vélo, c’est bien vu. Mais faire du golf, pour un médecin… » Optimiste de nature, Pierre Coriat est particulièrement fier de l’un de ses trois fils, chef de clinique, qui a choisi la cancérologie digestive. « Une spécialité d’avenir », prédit-il. Dans un hôpital public moderne et démocratique ? Pour toute réponse, le président oppose un sourire rieur et confiant…
Pierre Coriat
Coriace
Publié le 05/07/2010
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Jean-Bernard Gervais
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Source : Décision Santé: 266
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