Midi trente, début de la chute de neige sur Paris. Mon patient chinois peu loquace arrive plié en deux en baïonnette pour une sciatique. Hyperalgique ,il a traversé tout Paris en métro du XVe au XIXe ; je l’examine et la neige tombe de plus en plus.... Comme il est hyperalgique non manipulable, je lui fais avaler des antalgiques et lui injecte uneIM de Diclofenac. Trente minutes plus tard, il part dans la neige avec une ceinture que je lui prête et un manche à balai pour s’appuyer. Je l’accompagne inquiet dans la rue et il rebrousse chemin. Je l’ installe sur un banc sur le côté en chien de fusil et essaye de trouver un transport car il n'a pas de voiture et pas de famille à Paris.
Avec la neige, c’est la pagaille. Les taxis ne répondent même pas et les trois societés d' ambulance que je contacte disent n’avoir aucun véhicule disponible. Les menteurs ! Deux heures passent, je décide de lui faire un hiatus de cortisone car il a de plus en plus mal. Le stress certainement... Et là, malaise vagal, pieds surélevés, etc. J’appelle le centre15, impossible de passer. Je me débrouille tout seul avec les moyens du bord. Mon patient ne communique pas beaucoup, ne répond que peu à mes questions... On se débrouillera avec les paramètres... Objectif: pouls, tension artérielle, froideur des extrémités... Ouf, il revient et trois heures se sont écoulées.
La neige continue de tomber ; je rappelle le Samu : injoignables. Je traite les patients peu nombreux qui ont eu le courage de marcher dans la neige et contrôle mon Chinois jaune pâle... J’essaie plusieurs fois les taxis, les ambulances...Rien... Je tente les pompiers de Paris, ce n'est pas de leur ressort car il faut que le patient soit dans la rue pour qu’ils interviennent. Merci, les pompiers !
Cinq heures déjà que mon patient est dans mon cabinet et nous avons tous les deux sauté le repas de midi. Un petit gâteau chacun pour se remonter le moral. Il tente de joindre un collègue de bureau chinois qui va essayer de louer en vain une voiture. Il est 18h, le patient a mal et personne pour transporter cette sciatique hyperalgique aux urgences. Quelle pagaille ! Je me dis que même s’il y arrive, ils seront débordés et je profite du passage d' une patiente très ancienne et dévouée pour l’envoyer chercher de l’Actiskenan a la pharmacie. Et lui louer une chambre dans l’hôtel le plus proche. Il est vingt heures, le skenan fait effet. Je couche mon patient à l'hôtel et lui laisse quatre gélules pour la nuit.
Je peux enfin rentrer chez moi en marchant sur 10 cm de neige et là Hortefeux déclare ce n’est pas la pagaille. Le lendemain, mon patient chinois m’appelle, il va bien et rentrera en métro a l’autre bout de Paname. Pas de pagaille...
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