Devançant la publication du rapport du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance-maladie (attendu avant Noël), des députés ont organisé un débat public sur « la place du médicament dans la modernisation de l'assurance-maladie ».
A l'occasion des ces 3es Rencontres parlementaires sur le médicament, le Dr Catherine Sermet, directrice de recherche du CREDES, a rappelé que « les Français sont les plus forts consommateurs en Europe ». Cette consommation de médicaments équivaut en valeur à « 29 milliards d'euros en 2002 », soit « 1,9 % du PIB » (produit intérieur brut) et « 20,6 % de la consommation médicale totale », derrière l'hôpital (45 %) et devant les honoraires des médecins (12 %).
Selon des chiffres des Entreprises du médicament (LEEM) de 2001, la quasi-totalité (92,3 %) du marché pharmaceutique correspond à des spécialités remboursables (à prescription obligatoire ou facultative). A l'heure où le gouvernement parle beaucoup de « responsabiliser les patients », en particulier sur le plan financier, Yves Aubriot, P-DG de Theraplix (Aventis), estime que l'automédication, par définition non prescrite et non remboursée, « doit prendre sa place, même si sa place économique est et restera modeste ». Mais, souligne-t-il, l'automédication ne pourra pas se développer si elle ne retrouve pas « son statut de véritable médicament ». En effet, les vagues de déremboursement de médicaments à service médical rendu (SMR) insuffisant entretiennent, selon Yves Aubriot, « la confusion entre le remboursement et la notion d'efficacité thérapeutique ».
Un problème d'éducation
« Il y a peut-être un problème de responsabilité du consommateur, mais aussi un problème de coresponsabilité entre le consommateur, le médecin et le pharmacien d'officine », a affirmé le Dr Catherine Génisson, députée PS du Pas-de-Calais. « Le consommateur ne demande qu'à être responsable », mais il se heurte à « l'absence totale d'information indépendante et objective », a fait remarquer Jacques Mopin, vice-président de l'association UFC-Que choisir ?. En revanche, Bernard Lemoine, vice-président délégué du LEEM, a conclu son intervention en précisant qu' « une bonne utilisation du médicament par le patient ne pourra se faire sans un travail d'éducation mené en collaboration avec tous les acteurs de la chaîne de santé », y compris, bien sûr, les entreprises du secteur, quand bien même elles sont juge et partie.
Pour Christophe Rateau, directeur délégué de la Mutualité française, « il y a quelque malhonnêteté à se défausser tous sur les patients et à leur faire porter la responsabilité, car c'est d'abord aux autres acteurs de balayer devant leur porte ». Le représentant de la Mutualité vise ainsi « les prescripteurs, l'Etat et les financeurs ». L'Etat, parce qu'il omet notamment, dans la grande majorité des cas, de faire des études post-AMM (autorisation de mise sur le marché), et les financeurs de l'assurance-maladie, parce qu'ils ont « la grande responsabilité de décider ce qui doit être pris en charge ou pas ». La Mutualité française a, pour sa part, assumé cette responsabilité en décidant « de ne pas prendre en charge la différence de prix avec le TFR » (tarif forfaitaire de responsabilité sur la base du prix des génériques).
De son côté, Christian Babusiaux, conseiller maître à la Cour des comptes, a pointé du doigt les pouvoirs publics en démontrant que les conditions préalables à une régulation des dépenses de médicaments ne sont pas réunies. A ses yeux, le cadre français ne satisfait pas ou peu les « quatre principes de base » d'une régulation que sont « une vue d'ensemble » du marché, « une autorité de régulation » (la Commission de la transparence, même récemment améliorée, n'en ayant pas selon lui les prérogatives), « la transparence » et l'existence de « critères clairs et affichés » pour la fixation des prix.
Et les prescripteurs, dans tout ça ? Pour jouer leur rôle, il faut notamment que les professionnels de santé soient « bien formés et informés », a rappelé Michel Heinrich, député UMP des Vosges. Yves Bur, député UMP du Bas-Rhin et président du groupe d'études parlementaire sur le médicament et les produits de santé, verrait volontiers les médecins responsabilisés financièrement par « un intéressement à la pratique », afin de respecter des objectifs chiffrés prévus par des « contrats collectifs ou individuels » comme ceux prévus d'ailleurs par le PLFSS 2004.
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