« Au cours de l'insuffisance cardiaque, la réponse rénale est totalement inadaptée et ne vise qu'à protéger le rein », précise d'emblée le Dr Gilbert Deray, avant de proposer quelques remarques cliniques sur le rein cardiaque.
L'insuffisance cardiaque stimule le système rénine - angiotensine - aldostérone, responsable d'une rétention hydrosodée, d'une hyponatrémie, d'une hypokaliémie.
« Pour rompre le cercle vicieux qui s'est installé, il n'y a que deux solutions : la première consisterait à placer tous les insuffisants cardiaques dans une sorte de réserve, où on ne leur donnerait que très peu de sodium et beaucoup de potassium. La deuxième, poursuit le néphrologue , plus actuelle, est d'utiliser les agents pharmacologiques disponibles. »
L'objectif thérapeutique est d'améliorer la fonction cardiaque, d'obtenir une reprise de la diurèse avec les diurétiques sans aggraver l'insuffisance rénale ni les désordres hydro-électrolytiques, c'est-à-dire en assurant une reprise de la natriurèse. « Pour cela, on dispose des diurétiques, de la spironolactone, des inhibiteurs de l'enzyme de conversion et des antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II (AAII) dont la tolérance est globalement bonne », poursuit le néphrologue.
<\!p>Les diurétiques thiazidiques augmentent nettement les effets des diurétiques de l'anse. « Il faut faire très attention car même en associant des petites doses de chacun d'eux, on risque l'insuffisance rénale, l'hyponatrémie, l'hypokaliémie, le collapsus et, plus grave, le décès du patient en quelques jours », reprend le Dr Deray. L'idéal est de commencer par une petite dose de furosémide, une toute petite dose de thiazidique et ce dans le cadre d'une hospitalisation.
Concernant la tolérance des IEC et des AAII - qu'il s'agisse de l'insuffisance rénale ou de l'hypokaliémie -, elle repose sur l'existence de facteurs de risque : l'âge avancé, l'existence d'un diabète, d'une sténose de l'artère rénale, des chiffres de l'HTA et de l'association à des produits potentiellement néphrotoxiques comme les AINS, à l'exclusion de l'aspirine.
« Les facteurs de risque d'hyperkaliémie sous IEC ou AA II sont la supplémentation potassique, les diurétiques épargneurs de K+, l'insuffisance rénale sévère, le Bactrim, l'héparine, les AINS et peut-être les doses élevées d'IEC », précise Gilbert Deray.
La spironolactone associée aux IEC.
L'essai clinique RALES a clairement démontré le bénéfice du traitement de l'insuffisance cardiaque par la spironolactone. Dans cette étude, l'incidence des hyperkaliémies est très faible. Mais, enchaîne le Dr Deray, « le taux d'hyperkaliémies supérieures à 6 mmol/l est faible lorsque la kaliémie avant traitement est inférieure à 5 mmol/l, si la créatinine avant traitement est inférieure à 25 mg/l, si la dose de spironolactone est très faible ou lorsqu'un diurétique de l'anse est associé ». Depuis, dans un autre essai, il a été montré que l'incidence de l'hyperkaliémie au cours de l'association IEC et spironolactone peut être plus élevée, et ce d'autant qu'il existe un ou plusieurs facteurs de risque.
Les statines : l'avenir de rein cardiaque ?
Les expérimentations animales ont montré le bénéfice de l'association d'un IEC et d'une statine. En effet, chez le chien, l'administration d'un IEC seul abaisse la consommation d'oxygène rénale de 30 %, ce qui protège le rein. Chez un chien insuffisant cardiaque, facteur d'hypoxie rénale, la protection rénale induite par l'IEC n'est plus que de moitié, sauf si l'IEC est associé à une statine qui rétablit son effet protecteur « normoxiant ».
C'est l'une des nombreuses propriétés rénales favorables des statines. D'autres perspectives thérapeutiques viendront des antagonistes de l'endothéline qui préservent la fonction rénale et de l'omapatrilat (inhibiteur des vasopeptidases non encore commercialisé), efficace dans l'insuffisance cardiaque. Sous omapatrilat, la fonction rénale s'améliore en raison de son effet vasoconstricteur au niveau postglomérulaire .
D'après la communication du Dr Gilbert Deray (Paris)
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