«M ALGRÉ une baisse de la pression artérielle grâce aux différentes thérapeutiques depuis une trentaine d'années, la réduction de la mortalité et de la morbidité cérébrovasculaires (de l'ordre de 50 %) reste insuffisante. Les accidents coronariens liés à l'HTA ont en revanche moins diminué et les cas d'insuffisance cardiaque chez des sujets hypertendus depuis de nombreuses années augmentent », explique en préambule le Pr Yves Frances (hôpital Nord, Marseille).
Des recommandations plus exigeantes
Aujourd'hui, selon les recommandations en vigueur, la pression artérielle doit être abaissée à 140/90 mmHg chez l'hypertendu tout-venant ; il existe des différences en fonction des sous-catégories de patients. « Le pourcentage de patients dont la PA est normalisée est beaucoup plus faible que l'on croit », affirme le Pr Yves Frances. Les dernières statistiques sur ce sujet, publiées dans l'étude PHARE, montrent que seulement 31 % des individus hypertendus traités en France sont normalisés, la même proportion qu'aux Etats-Unis d'ailleurs. « Ce qui est largement insuffisant », insiste le Pr Frances.
Les facteurs qui apparaissent comme un frein au contrôle de l'HTA sont de plusieurs ordres : hygiénodiététiques, surcharge pondérale, apports sodés et facteurs psychologiques qui jouent un rôle dans le déclenchement d'une HTA comme dans la non-observance Du traitement.
HTA et hyperréactivité au stress
« Tout stress expérimental ou naturel entraîne une réponse hémodynamique avec élévation tensionnelle », explique le Dr Etienne Seigneur (hôpital européen Georges-Pompidou, Paris). La réactivité est supérieure chez les patients hypertendus par rapport aux patients normotendus. De plus, chez les patients normotendus, la réactivité hémodynamique est également supérieure chez les patients dont les ascendants sont hypertendus. Des études antérieures ont montré qu'il existe un lien entre l'HTA et l'hyperréactivité au stress médié par l'« hostilité », une dimension du pattern A, profil de la personnalité bien connu comme facteur de risque coronarien. L'hostilité est une dimension spécifique de ce pattern A, en particulier lorsque celle-ci est réprimée : la répression émotionnelle est très fréquente chez les hypertendus.
Les perturbations émotionnelles
Les liens entre HTA et perturbation émotionnelle se font dans les deux sens. On imagine facilement que les perturbations émotionnelles contribuent à la genèse de l'HTA, mais être hypertendu peut aussi générer des perturbations émotionnelles. L'effet « blouse blanche », bien connu, est l'une de ces perturbations qui contribuent à augmenter les chiffres tensionnels. Un autre aspect moins connu est le « trouble panique ». L'attaque de panique se traduit par des symptômes psychiques et somatiques, de la sphère cardio-vasculaire avec des palpitations et une élévation tensionnelle surtout systolique. Les patients « paniqueurs » ont un risque supérieur de développer une HTA par rapport aux patients « non paniqueurs ». Enfin, dans une étude de cohorte sur une population de patients anxieux chez lesquels l'incidence du trouble panique était élevée, l'incidence de l'HTA est également plus élevée que dans la population générale.
L'observance
L'observance et la non-observance sont des dimensions très importantes, respectivement du traitement ou du non-contrôle de l'HTA. « En pratique clinique, 20 % des hypertendus interrompent leur traitement après un an, insiste le Dr Etienne Seigneur, et c'est surtout le fait de patients qui ont une HTA modérée. »
L'observance se définit comme la concordance entre le comportement d'un patient et les prescriptions faites par le médecin, ainsi que le respect des conseils d'hygiène de vie. Plusieurs paramètres interviennent : le nombre de médicaments, la fréquence des prises et le nombre de prises quotidiennes, les effets indésirables générés par le traitement. « Au-delà de deux prises quotidiennes, l'observance chute énormément », précise le Dr Seigneur.
« Les bithérapies microdosées sont à cet égard une réponse à la mauvaise observance », ajoute le Pr Yves Frances.
Parmi les caractéristiques psychologiques prédictives de la compliance aux antihypertenseurs, on cite le pattern A, profil de personnalité du risque coronarien, qui présente également une faible observance dans l'HTA ; à l'inverse, les sujets qui ont un « lieu de contrôle interne » dont le comportement se détermine par rapport aux événements de vie et aux événements de santé, sont plus observants que les sujets qui ont un « lieu de contrôle externe ». Ces derniers pensent de façon générale que leur état de santé dépend plutôt de la chance, du hasard ou du destin ou encore du pouvoir médical, avec une hyperconfiance en la médecine. Enfin, l'isolement d'un patient est également un facteur de mauvaise observance.
Les facteurs hygiénodiététiques
« Les causes de résistances hygiénodiététiques à l'HTA sont éminemment fréquentes et leur contrôle est nécessaire : perdre du poids, lutter contre la sédentarité (facteur de risque à part entière), limiter les apports en sodium sont déjà des moyens simples », conclut le Dr Jocelyne Raison (hôpital européen Georges-Pompidou, Paris). L'association de ces moyens diminue la résistance et rend le contrôle de l'HTA plus facile.
D'après une Journée d'amphis en cardiologie parrainée par Byk France.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature