L'étude Digami 2.
Les résultats de l'étude Digami 2 ont été présentés en première exclusivité à l'Easd 2004. Rappelons que la première étude Digami (Diabetes and insulin-glucose infusion in acute myocardial infarction) avait été menée en Scandinavie dans des centres d'unités de soins intensifs cardiologiques chez des patients hospitalisés pour un infarctus du myocarde (IM) en phase aiguë, dont un groupe mis d'emblée à l'insuline et un autre laissé sous un traitement conventionnel (1). « Cette étude avait fait grand bruit, se souvient le Pr Slama ; l'analyse de ses résultats ayant montré une dissociation très rapide des deux courbes de survie actuarielles, avec une efficacité supérieure de l'insuline sur la mortalité à un an. Ces résultats se sont maintenus dans les trois, voire cinq ans qui ont suivi le début de l'étude. » Il faut aussi noter, au passage, que l'étude montrait l'absence de conséquences des hypoglycémies sévères ou répétées. Une donnée qui vient battre en brèche l'idée de la dangerosité de l'insuline chez les insuffisants coronariens.
« A partir de Digami 1, un énorme effort a été réalisé dans tous les pays du monde pour inciter les cardiologues à mettre à l'insuline sous pompe tous les patients ayant une hyperglycémie en phase aiguë de l'IM. » Mais l'étude présentait des limites qui ont conduit ses auteurs à lancer Digami 2 avec une meilleure standardisation du traitement insulinique, maintenu au fil du temps, et un traitement oral intensif. Aucune différence significative n'est apparue entre ces deux groupes thérapeutiques. Certains en ont conclu que Digami 2 contredit Digami 1. Le Pr Slama s'élève contre cette interprétation, car, explique-t-il, « les patients partaient d'une HbA1c de 9 % dans Digami 1 et de 7 % dans Digami 2, et si la mortalité a été comparable dans les groupes de Digami 2, elle est bien inférieure à celle du traitement conventionnel en vigueur avant Digami ». L'insuline n'a pas donc de propriétés spécifiques et, quelle que soit la stratégie utilisée, l'essentiel est de normaliser la glycémie. On peut donc considérer que « Digami 2 corrige Digami 1 ».
L'étude Cards.
Cette réunion de l'Easd a été l'occasion de revenir sur les résultats de Cards déjà présentés à l'ADA. L'originalité de cette étude de prévention primaire des maladies cardio-vasculaires dans le diabète de type 2 par rapport aux autres études est qu'elle a porté sur un groupe ad hoc de diabétiques (et non un sous-groupe) qui avaient un profil tout-venant et ont été traités avec une dose « banale » d'atorvastatine, soit 10 mg. Ses résultats, conformes à ceux de l'étude HPS (réalisée avec une dose 40 mg), « posent une question que beaucoup ont résolue, même si elle n'est pas dans les textes, dit le Pr Slama : Il est de moins en moins éthique de priver les diabétiques de type 2 d'un traitement systématique par une statine ». En outre, nombre de spécialistes s'interrogent aujourd'hui sur l'utilité du bilan lipidique initial pour ce type de patients, puisque « quel que soit le profil lipidique le bénéfice est le même ».
Insuline glargine et insuline inhalée.
« On a également beaucoup parlé, sous l'instigation des firmes pharmaceutiques, de l'insuline glargine et de l'insuline inhalée », indique le Pr Slama. Hannele Yki-Järvinen a fait un plaidoyer vibrant pour que tous les diabétiques de type 2 soient passés à l'insuline glargine dès qu'ils n'étaient pas parfaitement contrôlés avec la metformine seule. Dans ce cas de figure, la diabétologue finlandaise est partisane d'une stratégie fondée sur l'insuline, avec ou sans metformine, en augmentant la glargine avec pour seule limite la normalisation de la glycémie à jeun sans tenir compte du nombre d'unités nécessaires. Elle estime que les échecs sont essentiellement liés à la peur d'augmenter les doses de cette insuline. Bémol du Pr Slama : « Il y a là un pas et un espace dans lequel s'intercalent les associations médicamenteuses, bi-, tri-, voire quadrithérapie demain, qui n'ont pas dit leur dernier mot. »
Enfin, les présentations sur l'insuline inhalée ont également été remarquées. Cette insuline a donné des résultats intéressants, en particulier sur la tolérance à très moyen terme, et sur le contrôle glycémique chez les diabétiques de type 2, laissant penser que cette thérapeutique pourrait dans l'avenir avoir une indication. Des questions « angoissantes » sur la tolérance à long terme du traitement ou « préoccupantes » sur son prix restent néanmoins posées, note le Pr Slama. Et cela d'autant plus que, pour avoir la même efficacité, la dose administrée par voie respiratoire doit être dix fois supérieure environ à celle donnée par voie sous-cutanée. « Intéressant et à suivre... »
*D'après un entretien avec le Pr Gérard Slama, Hôtel-Dieu, Paris.
40e réunion de l'Easd, Munich, septembre 2004.
(1) Malmberg K et al. Randomized trial of insulin-glucose infusion followed by subcutaneous insulin treatment in diabetic patients with acute myocardial infarction (Digami study): effects on mortality at 1 year. J Am Coll Cardiol. 1995;26(1):57-65
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